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WhoMadeWho : « Michael Laudrup était un génie du football »

Par Matthieu Rostac
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Football et musique ont toujours été intimement liés dans la vie de Jeppe Kjellberg, guitariste des WhoMadeWho. La preuve : « J'étais un gardien apprécié pour ma témérité et ma hargne. Un jour, cette fille que j'aimais bien est venue nous encourager au bord du terrain et m'a dit : "On dirait que tu cries très fort pour encourager tes coéquipiers, mais on t'entend presque pas, en fait." Je pense que je lui dois en partie ma carrière de musicien et ma façon de chanter. » Désormais, en matière de ballon rond, Kjellberg prend plus de plaisir dans un canapé que sur un terrain avec toujours cette même idée : jouer avec les moyens du bord et se transcender. Qu'il s'agisse du Danemark du regretté Richard Møller Nielsen ou du Barça de Lionel Messi.

Quelle équipe tu supportes et pourquoi ?

Je n’ai pas vraiment d’équipe favorite. Disons qu’à l’époque, je supportais l’équipe nationale danoise, mais ils jouent bien trop mal ces derniers temps pour que je les suive. Ils ont clairement besoin d’un renouvellement de génération. Il y a plein de petits nouveaux qui se bousculent au portillon et qui n’attendent qu’une seule chose : être testés. Bon, bien sûr, des joueurs comme Eriksen sont exempts de tout reproche. Sinon, j’adore regarder Barcelone jouer parce que tu sais, être une grande équipe de foot, c’est un peu comme jouer dans un groupe. Tous les joueurs sont vraiment dépendants les uns des autres dans l’équipe. Messi est le meilleur joueur du monde notamment parce qu’il a cette faculté très particulière d’interagir avec ses coéquipiers. Son jeu colle parfaitement à celui du Barça et tu ne peux pas l’imaginer ailleurs que dans ce club. Mais il ne faut pas oublier que s’il est le meilleur joueur du monde, c’est parce que ses coéquipiers se défoncent pour lui. Je pourrais presque comparer ça à notre groupe : trois entités complètement différentes, avec différents talents dans différents genres ou territoires musicaux. Quand nous sommes ensemble et que tout le monde joue juste, chacun se transcende et devient une partie de quelque chose de grand. D’ailleurs, l’équipe du Danemark s’inspire pas mal du système de jeu du Barça en ce moment : de belles passes, de beaux mouvements, etc. Mais bon, ils ont juste pas le niveau pour le faire, donc ça donne une pâle copie du Barça, sans âme. C’est dommage parce que ton équipe doit être capable de fonctionner avec les talents que tu as à disposition. Je pense que Morten Olsen devrait arriver avec quelque chose de plus personnel, de plus « danois » , en fait. Si c’est, bien entendu, possible.

Ça veut dire quoi « plus danois » ?

Je pourrais pas te dire exactement ce que c’est. Juste une façon de jouer dictée par les éléments à la disposition et pas une fantaisie de Morten Olsen. Par exemple, la Suède s’en sort très bien de cette manière. Ils ont un joueur très fort, Zlatan, toute l’équipe s’adapte à son tempérament et maintenant, ils défoncent tout.

Revenons au Barça : un souvenir en particulier ?

Je me rappelle surtout les avoir énormément suivis au début des années 90 quand Michael Laudrup y jouait. Laudrup était un génie du football. Il avait beaucoup d’élégance et de flair sur le terrain. Bon, il n’a pas joué en 1992 à cause d’une embrouille avec Richard Møller Nielsen. L’exemple typique de l’artiste aux idées très arrêtées, dont l’ego se met parfois en travers d’une possible rédemption. J’ai rencontré beaucoup d’artistes qui souffrent également de cette maladie ! Bref, pour revenir au Barça, à l’époque, seules deux choses importaient pour moi : être un ado grunge avec un look de zombie et regarder le Barça tous les samedis sur le canapé de mes parents ! Malheureusement, j’étais défoncé la plupart du temps à cette époque, donc c’est un peu flou. Ça me permettait surtout de me relaxer, de me vider la tête. Mon Nirvana à moi. Nirvana dans le seul Valium, je veux dire. Maintenant, quand on est en tournée, mon moment préféré, c’est : aller dans un grand hôtel, allumer la télévision, tomber par hasard sur un match de foot quelconque et couper le son. Ça me relaxe complètement. Ma vie est remplie de sons, de musique et d’interactions sociales. Donc quand j’en ai l’occasion, je profite du silence. Ou alors d’une bonne musique. Et j’apprécie la pure et silencieuse beauté de ce sport…

En tant que Danois, je suppose que tu as des choses à raconter sur l’Euro 92 ?

Le coach de l’époque, Richard Møller Nielsen, vient tout juste de décéder. Il avait absolument pigé le fait de tirer le meilleur parti de ces joueurs plutôt quelconques et il leur a fait jouer les meilleurs matchs de leur vie. À mon sens, c’est la chose la plus noble qu’un coach puisse faire et je le respecte pour ça. Il n’a pas eu la carrière qu’il méritait en tant que coach. Il a eu les meilleurs résultats de toute l’histoire du football danois, mais il n’a jamais eu le don de la parole, il n’était pas très doué avec les mots. Franchement, je trouve cette histoire assez triste. Le mec n’a même pas été inscrit au Hall of Fame du football danois et il s’en est allé sans reconnaissance. Ceci dit, maintenant qu’il est mort, son image a évolué et les gens le reconnaissent à sa juste valeur. C’est très danois comme façon d’agir. Concernant l’Euro 1992, je me rappelle surtout qu’au moment de cette finale légendaire, je participais à mon premier Roskilde Festival. C’est incroyable, ce sentiment d’unité et cette euphorie qui se sont emparés des gens après qu’on a battu l’Allemagne 2-0. Tout le monde courait dans tous les sens, enlaçant des inconnus. Je me rappelle en train de courir comme un dératé après l’annonce de la victoire pour aller voir Nirvana défoncer la scène. Littéralement. Un pote à moi avait perdu sa godasse, mais on s’en foutait : il y avait des choses plus importantes qui se produisaient ce soir-là. Une nuit absolument épique ! Ça reste forcément mon plus beau moment de football.

Il paraît que t’aimes le championnat allemand, aussi ?

Ouais, j’adore l’énergie déployée par les équipes allemandes. Je dois reconnaître que je suis toujours impressionné par la puissance du Bayern ou du Borussia Dortmund. Ils sont efficaces, agressifs. C’est l’esprit allemand dans sa plus pure essence, appliqué sur un terrain de football et transcendé par le sport. C’est juste fascinant à regarder.

Tu as déclaré sur Facebook : « Jouer au football avec des musiciens de jazz peut s’avérer très dangereux » . Qu’est-ce que ça veut dire ? Je jouais au football avec des amis musiciens de jazz tous les lundis à 22h. Et bien que notre idée de jeu soit basée sur un idéal brésilien, disons, on ne joue pas avec autant de grâce. Beaucoup de blessés. J’ai même dû arrêter pour m’éviter des frayeurs !

Le nouvel album des WhoMadeWho, Dreams, est sorti le 3 mars dernier chez Darup Associates La page Facebook des WhoMadeWho Les WhoMadeWho seront en concert le 19 avril prochain au Trabendo

Par Matthieu Rostac

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