Vincent, ton genou gauche t’ennuie un peu en ce moment, mais je crois que ce n’est pas la pire nouvelle…
(Rires) C’est vrai que depuis que j’ai emménagé à Sheffield, je n’ai toujours pas internet. Y a un mec qui est passé pour mettre la télé il y a trois semaines, et en gros, ici, c’est un autre qui vient t’installer internet. Celui-là n’est toujours pas venu, et le premier, bah je crois qu’il n’a pas très bien bossé, puisque la télé ne marche pas…
Du coup, tu fais comment ?
La plupart du temps, je suis chez Atdhe Nuhiu, notre attaquant autrichien. C’est lui qui me propose à chaque fois, on est limite en colocation (rires). Même ma Playstation est chez lui ! C’est con parce que mon appartement est au 18e étage d’une jolie tour, en plein centre ville, c’est hyper bien placé. Mais du coup, je n’en profite pas encore…
Sheffield, c’est le foot, les Arctic Monkeys, mais ça n’a pas la réputation d’être la ville la plus funky du monde… Tu t’occupes comment ?
Ce n’est pas la fête, mais il y a de quoi faire. Il y a un cinéma juste à côté de la maison, on va prendre des cafés, on se balade. Au final, la qualité de vie change en fonction de l’endroit où tu joues, mais les journées restent sensiblement les même. La vérité, tu la connais : j’attends internet (rires) !
En partant de Nantes pour aller à Beira Mar, tu as dû apprendre le portugais, que tu parles plutôt bien aujourd’hui. Ça se passe comment en anglais ?
Très bien. J’ai un niveau que je qualifierais de meilleur que scolaire et ça s’améliore de jour en jour. L’avantage avec le coach, Carlos Carvalhal, et son staff, c’est que je peux aussi parler en portugais, comme ça je ne perds pas trop mon niveau !
Vous pouvez aussi parler de Braga, d’où il est natif et club par lequel tu es prêté. Ça donne quoi cette saison ?
Ça se passe plutôt bien. J’essaye de les suivre au maximum, d’autant plus que j’ai un excellent ami là-bas, Rafa. Là, ils sont quatrièmes, à un point de Rio Ave et 4 du Sporting et de Porto. Benfica est à un point derrière. Honnêtement, avec tous les départs qu’il y a eus cet été, Santos et Danilo à Valence, Eder à Swansea, Rúben Micael en Chine, Felipe Pardo en Grèce, Zé Luis à Moscou, Tiago Gomes à Metz, ils s’en tirent plutôt bien.
À Braga, j’allais souvent dans une petite cantine typique où t’as l’impression que ta grand-mère cuisine. Bon, ta grand-mère qui affiche un maillot de Ricardo dans son restaurant, hein…!
En ce qui te concerne, pourquoi as-tu quitté le navire ?
Avec le changement de coach, ma situation au Portugal était devenue un peu floue. Puis j’ai eu l’opportunité d’aller en Angleterre. Alors on dit souvent que c’est pour aller en deuxième division, mais quitte à être cliché, je vais te le dire : tant que tu n’es pas ici, tu ne te rends pas compte. Je savais que ça serait bien, mais pas à ce point-là. En matière d’intensité, d’infrastructures, de stades et d’ambiance, c’est complètement fou. Et puis Sheffield Wednesday, c’est un club historique, ici. Pour moi, la plupart des équipes de deuxième division anglaise peuvent battre des équipes de Ligue 1. Tu sais, mardi, on joue contre QPR, c’est plein alors qu’on est un mardi soir et qu’Arsenal joue en C1. En face, il y a Sandro, le mec a des sélections avec le Brésil. La semaine dernière, on joue Hull City, il y a Diamé, Abel Hernández. Même nous, on a des super joueurs.
Tu comprends qu’en France, on critique des choix de carrière comme celui de Payet, ou le tien d’ailleurs, d’un outsider de Liga Nos à une équipe qui jouait le milieu de tableau en D2 anglaise.
Bien sûr que je comprends. Mais je comprends aussi les mecs qui font toute leur carrière en deuxième division ici. Il faut quand même se rendre compte, ou au moins essayer, de ce que c’est pour un joueur de football de jouer tout le temps dans un stade plein, de passer à la télé, de vibrer, quoi. La semaine prochaine, on joue Arsenal en Coupe chez nous, c’est déjà sold out et je peux te dire que j’ai hâte…
Braga, c’était pas mal non plus, quand même…
Braga, c’était le temps. J’y ai fait une trentaine de matchs et au-delà du sportif, en matière de qualité de vie, c’est juste incroyable. Il fait tout le temps beau, la vie est pas chère, la nourriture est bonne, Porto est à vingt minutes en voiture. Tu as les avantages d’être à côté de la grosse ville, mais d’avoir ta petite tranquillité. Tu ne manques de rien. Les infrastructures aussi sont top là-bas, en matière de soin, c’est super. Et puis au niveau sportif, tu as les trois grands, mais Braga commence à les titiller. Ils n’ont pas encore les supporters et le palmarès de Porto ou de Benfica, mais depuis quinze ans, ils font un super boulot.
T’en penses quoi, toi, quand en France on a dit que l’OM allait se balader dans sa poule ?
Je pense que Braga peut taper l’OM. Surtout à domicile et surtout au vu de la forme actuelle de l’OM. Les gens qui méprisent les équipes portugaises ne connaissent pas bien le foot. En France, parfois, on se croit supérieurs. Il y a le PSG, certes, il y a l’OM, qui est un club historique, mais Monaco n’est pas en Ligue des champions, Lyon va se faire sortir. Au Portugal, les compétitions européennes sont très importantes. C’est un petit pays, la Ligue 1 est plus relevée que la Liga Nos, mais nous, on ne faisait pas tourner en C3. Benfica et Porto, ils seront toujours là, tu peux en être sûr. Ça sera plus difficile pour Braga à Marseille, mais ce jeudi soir, ils ont leurs chances.
Qu’est-ce qu’il te manque de Braga ?
Le soleil et surtout la nourriture… On avait une petite cantine dans laquelle on allait souvent. Tu sais, un truc typique où t’as l’impression que c’est ta grand-mère qui cuisine. Bon, ta grand-mère qui affiche un maillot de Ricardo dans son restaurant hein…! Mais un truc familial, quoi. J’y retourne en novembre là, pour passer mon permis. Ça me fait plaisir.
Profites-en bien, parce que pas de vacances de Noël pour toi cette année…
Ça, c’est sûr. Le 26 on joue Birmingham, le 28 Middlesbrough et le 2 janvier, on reçoit Fulham. Mais l’avantage, c’est que du coup, toute la famille vient me voir pour faire Noël ! Ça change. Bon, je dois te laisser, je vais mater le match chez Modou Sougou (rires) !