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Victor Moses, parce qu’il vient de loin

Par Gabriel Cnudde
Victor Moses, parce qu’il vient de loin

À 24 ans et après deux saisons en prêt à Liverpool et à Stoke City, Victor Moses aimerait bien gagner sa place au sein de l'effectif de Chelsea de José Mourinho. Un défi de taille qui semble ne pas pouvoir effrayer le Nigérian, qui a surmonté, dès son plus jeune âge, bien des épreuves.

Le 6 novembre 2007, le Ninian Park de Cardiff City fait la connaissance d’un jeune joueur de 16 ans, pur produit du centre de formation de Crystal Palace. Ce jour-là, les Blue Birds disputent la quinzième journée de Championship face aux Eagles. Après l’ouverture du score de Darren Purse et l’égalisation de Ben Watson sur penalty, le match perd en intensité. L’entrée de Victor Moses à la 72e minute de jeu n’y changera rien. Mais qu’importe, le jeune attaquant obtient ce qu’il était venu chercher : un peu de temps de jeu pour faire ses preuves. Pari réussi pour le Nigérian qui dispute, lors de la saison 2007/2008, seize matchs et inscrit son premier but en professionnel le 12 mars lors d’un match nul face à West Bromwich. Une fois sa carrière lancée, Victor Moses voyage dans toute l’Angleterre, de Crystal Palace à Wigan, de Wigan à Chelsea, de Chelsea à Liverpool, puis de Liverpool à Stoke City. Des voyages ridicules au regard de celui qui a changé sa vie, alors qu’il n’était âgé que de 11 ans.

Guérilla religieuse et grand voyage

Un jour de 2001, alors que le soleil brille sur l’État de Kaduna, au nord-ouest du Nigeria, le jeune Victor décide une fois de plus d’aller jouer au football avec ses amis. Là, dans les rues, ils voient des blessés défiler sous ses yeux sans vraiment comprendre. Ses parents, Austin et Josephine, auraient dû fuir la région depuis longtemps, mais ça, Victor ne le sait sans doute pas. Depuis quelques semaines, l’État de Kaduna est secoué par une guérilla religieuse opposant les communautés musulmanes, souhaitant instaurer la Sharia, au nord, et les communautés chrétiennes, au sud de la région. Contrairement aux autres chrétiens, Austin et Josephine, un pasteur et sa femme, ne fuient pas et accueillent dans leur maison les blessés des affrontements. Mais ce jour-là, quand le jeune Victor rentre chez lui, il ne trouve plus qu’une maison fumante sans âme qui vive à l’intérieur. À 11 ans, Victor devient brutalement orphelin et n’a que très peu d’idées de ce à quoi va ressembler le futur.

Heureusement, son oncle parvient à lui faire quitter presque immédiatement le pays. Alors qu’il débarque en Angleterre et pose ses valises à Londres, le jeune Nigérian n’a qu’un ballon de football et un anglais approximatif pour s’intégrer. Avec son nouveau statut de demandeur d’asile, Victor Moses se fraie un chemin jusqu’à l’équipe d’un petit club local en Tandridge Youth League. Là, il progresse, encore et toujours, jusqu’à ce que des scouts de Crystal Palace le repère et en fasse leur priorité. « Ce voyage depuis le Nigeria était très long. Moi, je veux rester fort et travailler pour rester fidèle à moi-même, que ce soit sur les terrains de football ou ailleurs. Je remercie Dieu d’être là aujourd’hui » , explique-t-il lui-même à Betshoot. À force de travail et d’efforts, Victor parvient donc à s’imposer au sein de l’effectif des Eagles, avec qui il dispute trois saisons, soit 58 matchs pour onze buts. Un bilan certes mitigé, mais qui lui ouvre les portes des compétitions internationales.

Three Lions ou Super Eagles ?

Dès 2005, Victor Moses choisit de représenter sa nation adoptive. Il remporte d’ailleurs avec les U16 le Victory Shield, et aide même les U17 à se hisser jusqu’en finale de l’Euro U17 en Belgique, en marquant par exemple contre la France, en demi-finale. À la fin de cette compétition, l’attaquant reçoit même le Soulier d’or pour ses performances. De quoi lui ouvrir les portes des sélections U19 et même U21, en 2010. À ce moment précis, tout le monde imagine que Victor Moses a fait son choix et que plus rien ne le fera changer d’avis. Pourtant, en 2011, l’attaquant ne peut résister à l’appel de son pays natal. Le 1er novembre, la FIFA l’autorise – ainsi que son compatriote Shola Ameobi – à évoluer pour l’équipe A du Nigeria. Depuis, le natif de Kaduna est accueilli comme un héros à chaque fois qu’il pose un pied à terre dans son pays d’origine. En déclarant sa flamme aux pays qui n’a pas su défendre ses parents, le joueur de football est devenu un exemple de patriotisme, de foi et de pardon pour tous ses compatriotes.

Après une saison en prêt à Stoke City, marquée par plus de blessures que d’apparitions et de buts, le Nigérian ne se montre pas très enclin à prolonger son expérience du côté du Britannia Stadium. Seulement, un retour à Chelsea semble bien ambitieux tant la hiérarchie des attaquants paraît être figée à Londres. Quoi qu’il en soit, et quoi qu’il lui arrive, Victor Moses ne regrettera certainement pas son choix. Et c’est l’une de ses forces : l’attaquant semble ne jamais revenir sur l’une de ses décisions. Et certainement pas sur celle d’avoir choisi le Nigeria plutôt que l’Angleterre : « Je suis certain que de là où ils sont aujourd’hui, mes parents sont fiers de moi. Ils doivent me regarder de là-haut et se sentir fiers. »

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