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Un supporter d’Angoulême raconte son calvaire : « Le plus important, c’est qu’on m’ait rendu ma dignité d’homme »

Propos recueillis par Quentin Fredon

Philippe Jouy, ancien membre de l'association de supporters du club de football d'Angoulême Commando fada, a été violenté, extorqué et violé pendant deux années. Devenu handicapé à 80% depuis ces agressions, cet Angoumoisin veut que son histoire, aussi dramatique soit-elle, serve d'exemple pour que cela ne puisse plus se reproduire.

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Ce mardi 20 février se tenait le procès de quatre individus jugés pour des faits de violences, de viols et d’extorsion sur un supporter du club de football d’Angoulême. Trois d’entre eux ont écopé de lourdes peines, allant de 10 à 18 ans de réclusion, le dernier a été relaxé. Les quatre prévenus et la victime faisaient partie d’un même collectif de supporters, le Commando fada. Les faits remontaient à une période allant de 2015 à 2017, à une époque où Philippe Jouy, aujourd’hui âgé de 52 ans, avait été racketté, battu, violé. Il a gardé des séquelles de cette barbarie et a été reconnu adulte handicapé en 2022. Il raconte cette histoire sordide, son histoire, pour que cela ne se reproduise plus.

 


Pouvez-vous nous raconter la violence et le harcèlement que vous avez vécus à l’époque ?

J’ai connu Damien* en 2004 par le travail, on est vite devenus amis et il m’a proposé d’aller voir un match, ça m’a plu. Avant certaines rencontres, on buvait beaucoup, mais ça ne me dérangeait pas à l’époque. Après, on s’est séparés pendant assez longtemps, jusqu’en 2011-2012. À ce moment-là, je lui ai demandé s’il voulait qu’on retourne aux matchs en formant un groupe de supporters. Au début, ça se passait très bien, et en décembre 2015, j’ai dû rater une rencontre à cause d’une fête de famille. Damien est devenu fou furieux, m’a menacé, il a abîmé la voiture de mon père qui a déposé 12 plaintes entre 2015 et septembre 2017, sans suites. Pendant cette période, j’ai subi des violences, des viols, on m’a versé un liquide corrosif sur le dos… Je ne vous raconte pas la douleur causée.

Damien était un personnage violent quand vous le fréquentiez ?

Non, à l’époque, non. Ça a commencé en 2015, c’est un beau bébé quand même, il est imposant. 1,95 mètre pour plus de 130-140 kilos, c’est quelqu’un qui a l’habitude des « substances illicites », mais il n’était pas violent.

Entre ces faits et le jugement qui a été rendu cette semaine, sept années sont passées. Pourquoi cela a pris autant de temps ?

J’ai déposé ma première plainte en octobre 2017, il a fallu que La Charente libre publie un article en novembre 2017 pour que l’instruction se lance et en janvier 2018, les premières arrestations ont commencé. Après, il a fallu attendre que la justice mette en place le procès, mais c’était très long.

Sur les quatre personnes accusées, l’une a été relaxée.

Lui était plus une victime qu’autre chose. Je ne l’ai vu que deux fois dans cette affaire. Lors de mon témoignage, j’ai dit la vérité, il ne m’a jamais frappé. Les viols, c’était Damien, mais c’est un ami devenu bourreau. Pendant certaines des violences, il s’occupait de ses enfants à côté et j’ai voulu faire la différence entre le bon père et le bourreau.

Qu’attendiez-vous de ce procès ?

Il y allait forcément y avoir une punition, mais le plus important, c’est qu’on m’ait rendu ma dignité d’homme. Maintenant, j’attends que mon avocat me contacte pour mes dommages et intérêts.

Comment expliquez-vous cette violence de leur part à votre égard ?

J’étais le plus faible des quatre « psychiquement », même si parmi les trois condamnés, un était mineur au moment des faits. Damien est quelqu’un de très imposant physiquement, il est très manipulateur. Lors de son expertise psychiatrique, il a fait peur aux jurés qui voulaient le condamner à une plus grande peine que la juge.

Les prévenus m’ont également “éclaté” l’oreille gauche, j’ai plusieurs dizaines de points de suture. Damien et ses 140 kilos m’écrasaient le pied, j’ai le pied droit violet depuis sept ans.

Le caractère antisémite de cette affaire n’a pas été retenu, vous le regrettez ?

Oui, je le regrette. Si l’un des prévenus fait appel lors de cette affaire, je verrai avec mes avocats si on ne peut pas se servir de ça également.

Depuis cette histoire, vous êtes devenu handicapé.

Je suis reconnu handicapé à 80%, je ne peux plus travailler. Si on me touche, j’ai peur de ma propre violence. Je dois rester enfermé chez moi, auprès de mes proches. Sans le soutien de mes proches et de mon frère handicapé lui aussi, je ne sais pas si je m’en serais sorti. Les prévenus m’ont également « éclaté » l’oreille gauche, j’ai plusieurs dizaines de points de suture. Damien et ses 140 kilos m’écrasaient le pied, j’ai le pied droit violet depuis sept ans.

Votre club ou votre association vous ont-ils aidé ?

L’association (le Commando fada) n’existe plus, ce n’était que nous quatre, elle a été liquidée par le préfet. J’ai vu plusieurs fois le président du club d’Angoulême, il m’a apporté son soutien en dehors du tribunal, il a prouvé que certaines personnes du groupe étaient mauvaises. Je ne demande pas d’aide financière de sa part, je voulais juste qu’il apporte son témoignage, la justice m’a rendu ma dignité, elle a fait son travail.

Avez-vous été dégoûté du foot et de tout ce qui l’entoure ?

Je suis et suivrai toujours mon équipe, j’aime encore le foot. Je ne suis pas retourné au stade parce que certaines violences se sont déroulées autour du stade, mais je suivrai toujours mon club sur internet. C’est hors de question d’y retourner, cela me rappelle trop les violences que j’ai subies.

Le football connaît de plus en plus de violences, même en amateur.

Je trouve ça inadmissible. Par exemple, quand je vois des parents agresser des dirigeants pour des bricoles, ce n’est pas normal. Il faut parler, il faut s’expliquer. On peut être supporter de foot, boire de l’alcool, mais toute violence, qu’elle soit envers un club ou envers des supporters, c’est pas ça supporter son équipe. Je veux à tout prix que mon histoire, aussi dramatique qu’elle soit, serve de leçon, je ne veux plus jamais que cela se passe à nouveau, que ce soit moi ou une autre personne.

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Propos recueillis par Quentin Fredon

*Le témoin de cette affaire a souhaité ne pas donner les noms de ses agresseurs.

Remerciements à La Charente libre

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