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Un Curaçao cocktail Kluivert

Par Adrien Candau
Un Curaçao cocktail Kluivert

Surtout connu pour son fameux cocktail bleuté, le Curaçao, petite île antillaise au large du Venezuela, a démontré ces dernières années qu'il sait aussi jouer au football, en se qualifiant pour la Gold Cup. Une première depuis 1973. Un exploit notamment rendu possible par le passage éclair - mais décisif - d'un homme : Patrick Kluivert.

Une île de 150 000 habitants. À peine 442 km2 de superficie. La capitale, Willemstad, bâtie par les colons hollandais, qui ressemble à une sorte de mini Amsterdam plantée dans un environnement paradisiaque, où les locaux et touristes peuvent profiter d’une quarantaine de plages au sable immaculé. Et au milieu de tout ça, l’équipe de Curaçao de football, qui offre au pays tout entier un shot d’adrénaline en participant pour la première fois depuis plus de quarante ans à une grande compétition internationale. Personne ne l’attendait, mais voilà bien le Curaçao parti à l’abordage de la Gold Cup, aux États-Unis. Sans une once de complexe.

L’âge de l’indépendance

Pour prendre la mesure de l’exploit, il faut se rendre compte que la dernière fois que le Curaçao s’était qualifié pour la compétition en 1973, il jouait sous la bannière des Antilles néerlandaises. Un conglomérat de six îles administrées par les Pays-Bas, qui joignent leurs forces pour former une seule et unique sélection nationale. Une Fédération dissoute en 2010, quand le Curaçao et la partie néerlandaise de l’île de Saint-Martin ont décidé par référendum de former des états autonomes au sein du Royaume des Pays-Bas. La FIFA accorde alors au Curaçao le statut de successeur direct des Antilles néerlandaises. « Un choix logique, explique Nathan Carr, journaliste spécialisé dans le football caribéen et créateur du site The home of caribbean football. L’équipe était déjà composée en très grande majorité de joueurs originaires du Curaçao, donc cela semblait normal de les voir reprendre le flambeau des Antilles néerlandaises. Finalement, l’équipe n’a perdu que très peu de joueurs à la suite de cette division. » . Néanmoins , en s’affirmant comme « pays autonome » , disposant de sa propre constitution et d’un gouvernement, le Curaçao assume désormais sa double identité. Une identité multiculturelle et caribéenne, symbolisée par le papiamento – l’une des langues officielles du pays, qui trouve entre autres ses racines dans l’espagnol, le portugais, le français et divers dialectes africains -, mais aussi néerlandaise, puisque le pays reste intégré au sein du Royaume des Pays-Bas, alors que d’autres fonctions régaliennes comme la Défense restent administrées par le pouvoir central hollandais. Une synthèse que l’équipe nationale du Curaçao va reproduire avec succès, en construisant les bases d’un nouvel âge d’or grâce à la nomination d’un entraîneur lié à l’île et dont le nom inspire le respect et l’admiration au royaume de Hollande : Patrick Kluivert.

On n’attendait pas Patrick

Car avant de s’offrir un emploi suspicieusement fictif au PSG, Kluivert a sérieusement bossé à des milliers de kilomètres de la capitale francilienne et de sa Hollande natale. Pas pour le fric, encore moins pour la gloire. Mais bien pour honorer son histoire familiale, qui prend pour partie source au Curaçao : « Ma mère vient de l’île et je veux rendre au Curaçao ce qu’il nous a donné. Voilà pourquoi je suis là » , déclare l’ancien Ajacide en mars 2015, alors qu’il vient de prendre la tête de l’équipe première. En l’espace d’une année, jusqu’à sa démission en mars 2016, le grand Pat ne va pas chômer. D’abord en usant de sa popularité pour convaincre de nombreux joueurs liés au Curaçao, mais nés et jouant aux Pays-Bas, de venir représenter le pays de leurs parents ou grands parents. Parmi eux, Eloy Room, le portier du Vitesse Arnhem, le défenseur d’Aston Villa Leandro Bacuna ou encore l’ailier du Slavia Prague, Gino van Kessel, tous rapidement considérés comme des titulaires indiscutables du onze type. « Le Curaçao s’est toujours appuyé sur sa diaspora aux Pays-Bas, mais le phénomène a pris une autre dimension grâce à Kluivert. Pour avoir parlé avec les joueurs, je peux vous confirmer que le fait que Kluivert ait pris la tête de l’équipe nationale a joué un rôle majeur dans leur décision » , pose Nathan Carr.

Pirates des Caraïbes

Pour le reste, Kluivert, sans doute au courant que le Curaçao fut l’une des îles symboles de l’âge d’or de la piraterie, met sur pied une équipe prête à partir à l’abordage : « Il y a clairement eu un tournant opéré avec Kluivert, il a donné au Curaçao une vraie identité de jeu offensive, axée sur la possession et la circulation de balle. Ce n’est pas un hasard si le Curaçao est l’équipe qui a marqué le plus de buts lors des éliminatoires de la Coupe caribéenne des nations » , explique Nathan Carr. Résultat : le Néerlandais parvient à valoriser le talent « d’une des meilleures générations de footballeurs de l’histoire de l’île » , selon le vice-président de la Fédération de football du Curaçao, Stanley Coffy. Avec Kluivert, le Curaçao se qualifie pour la Coupe caribéenne des nations et la Gold Cup 2017. Mais échoue au troisième tour des qualifications des éliminatoires du Mondial 2018. « Une déception » pour le natif d’Amsterdam, qui met fin à son expérience de sélectionneur, non sans affirmer « sa fierté d’avoir permis à l’île de progresser » .

Et si le grand Pat s’en est allé rejoindre le Vieux Continent, son héritage demeure. Pas fou, son adjoint, Remko Bicentini, qui lui a succédé, a veillé à rester dans la lignée du projet de son prédécesseur. Tant et si bien que le Curaçao a remporté pour la première fois de son histoire la Coupe caribéenne des nations en juin dernier, en battant la Jamaïque en finale. Et n’a pas peur de jouer crânement sa chance lors de la Gold Cup, dans un groupe où l’on trouve également le Mexique, le Salvador et la Jamaïque : « Quoi qu’il arrive, le futur de notre équipe nationale s’annonce très positif… Bien sûr, nous ne jouons pas contre un adversaire de la qualité du Mexique toutes les semaines…, relève Bicentini. Mais nous avons remarquablement aiguisé notre style de jeu. Maintenant, nos joueurs réalisent qu’un petit pays comme le Curaçao peut être un adversaire difficile, même pour le Mexique. » Les pirates, les vrais, ne sont jamais tout à fait rassasiés.

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Par Adrien Candau

Propos de Nathan Carr et Stanley Coffy recueillis par AC

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