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Un agneau, des Agnelli

Par Valentin Pauluzzi
Un agneau, des Agnelli

Le président de la Juventus fête ses 40 ans, dont les cinq derniers à trimer pour redonner les lettres de noblesse à une équipe en pleine crise identitaire lors de son arrivée. Le bilan frôle l'excellence, mais la famille guette.

En parcourant l’historique des présidents de la Juventus, vous remarquerez qu’un Agnelli n’occupait pas la plus haute fonction depuis 1962. Les frangins Gianni et Umberto avaient décidé de laisser cette place au mythique Giampiero Boniperti, mais aussi à leurs hommes de confiance, tels les avocats Chiusano et Grande Stevens. Après l’intermède Cobolli Gigli/Blanc pour gérer l’après-Calciopoli, un autre « agneau » a repris directement les choses en mains en 2010. Andrea avait 35 ans à ce moment-là et paraissait quelque peu acerbe. Une barbe et cinq ans plus tard, il peut admirer les huit trophées conquis, plus quelques finales perdues.

Des oncles prestigieux et un second papa

« C’était un gamin, il avait beau être le fils d’Umberto, il était très timide et n’osait pas trop nous approcher. Tout Agnelli qu’il était, il restait un petit émerveillé devant ses idoles. Ça se voyait dans ses yeux. C’était surtout son oncle qui était présent, mais quand son père débarquait, il était toujours accompagné d’Andrea qui venait nous faire un petit coucou dans les vestiaires » , confie Sergio Brio, défenseur bianconero de 1978 à 1990. Il serait d’ailleurs intéressant de savoir si un Agnelli qui ne supporte pas la Juventus existe. Impossible de renier ses racines lorsqu’on finit sur les genoux de tonton Michel ou Dino. De fait, Andrea Agnelli pouvait difficilement échapper au poste de président de la Juve, même si le destin lui a donné un malheureux coup de main. « Son demi-frère Giovannino avait dix ans de plus et était déjà plus en âge de comprendre certaines choses. On avait un vrai rapport, il venait en mise au vert, dormait dans notre hôtel. Sans rien enlever à Andrea, pour avoir bien connu Giovannino, c’était un grand bonhomme et la famille misait beaucoup sur lui. » Il décède en 1997 d’un cancer de l’intestin à seulement 33 ans. De onze ans son cadet, Andrea effectue le parcours classique de richissime héritier, le lycée à Oxford, l’université Bocconi de Milan. Puis il intègre progressivement la galaxie FIAT, mais surtout, il traîne avec les dirigeants bianconeri de l’époque, la fameuse triade Moggi-Giraudo-Bettega qu’il ne reniera jamais malgré leurs déboires judiciaires. « J’ai grandi avec Giraudo, c’est plus qu’un ami pour moi, c’est presque un second père, et l’affection est au-dessus de tout, affirmera-t-il lors d’une de ses premières interviews en tant que président. Je veux m’inspirer de leurs compétences professionnelles, c’est-à-dire l’efficacité et la capacité de rénovation. » Aussitôt dit, aussitôt fait, intronisé en 2010, et après une première saison de rodage, la Juve décroche quatre Scudetti et se retrouve en finale de Ligue des champions en mai dernier. Un quasi-sans-faute. Quasi, puisque tout n’est pas parfait.

Une ex-femme, une maîtresse et un cousin aux aguets

800 000 euros par an. C’est la pension alimentaire que lui demanderait l’Anglaise Emma Winter, après un mariage qui a duré dix ans. Des vicissitudes privées qui n’ont en apparence aucun rapport avec la Juventus, si ce n’est qu’Andrea s’est amourachée de Deniz Akalin, la femme de son ex-directeur marketing. « Ex » depuis le mois de septembre et le départ de Francesco Calvo pour le FC Barcelone, son nouvel employeur. Cocu mais content, puisque cette histoire de mœurs et de fesses aurait coûté 2 millions d’euros d’indemnité de licenciement. Ainsi, les adieux du trio Vidal-Pirlo-Tévez ne sont pas les seuls à avoir affaibli la Juventus qui perd aussi un cadre très compétent au regard des 140 millions d’euros ramenés dans les caisses grâce aux derniers contrats signés. Sans oublier les dégâts collatéraux avec le président qui finit en une de tous les magazines people, que ce soit en se baladant avec sa nouvelle compagne ou en s’embrouillant avec l’ancienne. Un déficit d’image auquel la lignée Agnelli ne nous avait pas habitués, hormis les penchants du cousin Lapo pour la blanche et les shemales.

Pas de quoi non plus fragiliser la position du coureur de jupons, mais attention, l’autre cousin le tient à l’œil. Il s’agit de John Elkann, petit-fils de « l’Avvocato » et président de l’Exor, la holding qui regroupe toutes les propriétés de la mif’. Les rumeurs voudraient qu’il ait participé en sous-main à la destruction de la Juventus à l’été 2006, pour se débarrasser de la direction en place. Les faits démontrent qu’il n’a en tout cas rien fait pour la défendre. Jamais vraiment enthousiasmé par la Vieille Dame, son désintérêt est proportionnel à l’amour qu’Andrea y porte. C’est peut-être là que les séjours initiatiques dans le vestiaire de la grande Juve du Trap font la différence. À bien y penser, on tient peut-être notre premier Agnelli non juventino. Et en forçant un peu les traits du plus calculateur des héritiers, il ne serait pas étonnant que l’idée de vendre le club lui ait déjà traversé l’esprit.

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