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Ultra Gone solitude

Par Nicolas Kssis-Martov
Ultra Gone solitude

Les incidents très graves qui viennent de se produire à Bastia ne sont pas simplement emblématiques de l’insularité corse dans le football. Car depuis le début de la saison, l'Olympique lyonnais se retrouve au centre et au cœur d'une série d'incidents, qui, s'ils sont bien évidemment de nature fort différente, ne peuvent, par la seule répétition, tenir du simple hasard. Il existe bel et bien un cas lyonnais aujourd'hui en L1. Ce club est désormais dans les faits le plus haï, ou maudit, selon les points de vue, de France. Et il lui arrive des choses que ne vivent pas les autres. Il va devoir apprendre à vivre avec...

« Un fait social se reconnaît au pouvoir de coercition externe qu’il exerce ou est susceptible d’exercer sur les individus » , expliquait en son temps le sociologue Emile Durkheim. Autrement dit, en langage courant, si la multiplication des événements ne fonde pas une logique, elle révèle peut-être le poids des prophéties auto-réalisatrices. Bref, l’Olympique lyonnais n’est pas mauvais, mais il est désormais maudit, et il suffit de le croire pour que cela se rèvèle vrai et tristement vérifié. La longue liste des batailles livrées, des blessés sur le terrain et des bleus sur le corps étrenne déjà une saison qui s’apparente à un chemin de croix. Le pire n’est donc plus d’avoir comme seule motivation de se battre pour conserver une si précieuse place de quatrième, vingt points derrière le podium, en leader de ce second championnat qui commence autour des 50 points. Il faut savoir digérer les soirs de match qui sentent le fumi ou la lacrymogène et plier sans rompre.

Le Kop, Aulas, les penaltys

On reconnaît ce nouveau statut de l’OL à quelques traits distinctifs de ces « maisons » confrontées à une telle situation de pestiféré. Subir et encaisser forge les humeurs et les comportements. De la direction aux tribunes, les Lyonnais partent au front, malgré les propos encore candides d’un Génésio qui clamait dans les vestiaires d’Armand-Cesari : « On ne va pas à la guerre. » Bien sûr que si ! Et seuls contre tous, sous les jets de pétards, les assauts des hooligans turcs, les agressions de stadiers à Bastia. Les Gones ne fuient pas. Ils n’esquivent pas. Il savent que cela ne servirait à rien. Jean-Michel Aulas a poussé pour que le match ait lieu dimanche soir, n’essayant même pas de résister aux pressions d’un préfet apeuré : « Fallait convaincre. On va y aller, mais… Vous direz que c’est grâce à moi. » Il avait déjà souhaité rejouer absolument le match contre Metz. Il s’est campé dans le kop pour se tenir auprès de ses troupes durant le quart de finale contre le Beşiktaş, pendant que, partout autour du Parc OL, la tempête se déchaînait, et que, seul au milieu des éclairs, il défiait le destin dans l’œil du cyclone. Quel président, dans un autre club en pareille posture, se sentirait, se permettrait, oserait le faire ?

L’Olympique lyonnais n’est pas seulement le club sur lequel tout le monde tape ou se défoule, dont on attend la venue pour lâcher les chiens. On a surtout l’impression que n’importe quel type d’explication peut justifier l’inexcusable ou de déroger à l’ordinaire : des tirs provocateurs de Ghezzal dans le torse d’un gamin, à la volonté de s’amuser innocemment avec un objet pyrotechnique. Ajoutez à cela un sentiment de quasi-légitime défense qui animent tous les adversaires des Gones, soi-disant principaux bénéficiaires des erreurs des hommes en noir. Le président monégasque Vadim Vasilyev avait professé le credo de cette sainte conviction dans la nocivité des incubes lyonnais. « Je pense que le résultat de ce match a été décidé par l’arbitrage. Je n’ai pas l’habitude de parler de l’arbitrage, mais ce soir je vais dire tout haut ce que tout le monde pense tout bas. L’Olympique lyonnais est favorisé par l’arbitrage. Il faut mettre fin à ça. C’est inexplicable. » Ce dogme, souvent médiatiquement répété, que le penalty a été inventé pour permettre à l’OL de gagner, a figé dans la conscience collective cette théorie du complot version LFP. Il suffit qu’Aulas se range derrière Noël Le Graët pour qu’aussitôt il devienne le nouveau boss du foot français.

Un statut à part dans l’Hexagone

L’OL n’est pas le premier à devoir composer avec une telle étiquette, qui suppose que les grosses équipes sont protégées pour conserver leur toute puissance. Le vade mecumde la saison 2016-2017 ne fait finalement que réactualiser ce lieu commun. Et dans la France qui gronde et qui confond populisme et révolte avant la présidentielle, l’OL cristallise étonnement et encore le refus du tout puissant dans le foot. Avec, en corollaire, le droit de lui cogner dessus, il oubliera vite, comme tous les privilégiés. Ce rôle lui colle finalement à merveille, et lui permet de conserver un statut à part dans l’Hexagone. Il remplit une vraie fonction, pour en revenir à la sociologie. Dans tous les championnats existe « ce » club sur lequel tout le monde se met d’accord pour le détester. « Je supporte toutes les équipes anglaises sauf Tottenham » rigolait l’écrivain anglais John King, fan de Chelsea. En retour, les supporters lyonnais y trouvent une inspiration unique, leur(s) histoire(s) ne ressemble(nt) à aucune autre, quel que soit le palmarès…

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