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Top 1000 : les meilleurs joueurs du championnat de France (340-331)

Par Quentin Ballue, Jérémie Baron, Adel Bentaha, Raphaël Brosse, Clément Gavard et Steven Oliveira, avec toute la rédaction de SF

Quel est le meilleur joueur de l'histoire du championnat de France depuis sa création en 1932 jusqu'à 2022 ? Statistiques, palmarès, trajectoires personnelles, classe, dégaine, empreinte laissée : autant de critères qui nous ont permis d'établir notre classement très subjectif des mille joueurs les plus marquants de Division 1 et de Ligue 1. Le credo d'un feuilleton qui va durer précisément 100 jours.

#340 - François Heutte

François Heutte
Lille (1957-1959), Racing Paris (1959-1964), Saint-Étienne (1964-1965), Lille (1965-1966), Reims (1966-1967)

Fut un temps à Paris où ce n’était pas le PSG qui dépensait sans compter, mais plutôt les Bleus et Blanc du Racing Club. À la fin des années 1950, on parle encore en francs, mais les sommes déboursées par le club de la capitale sont folles pour l’époque. Si le PEL est craqué pour poser 26 millions de francs sur l’Ivoirien Tokpa et en faire le joueur le plus cher de l’histoire, le Racing n’en a pas oublié d’en poser 16,25 de plus pour s’attacher les services d’un attaquant de poche isarien qui s’était déjà fait un nom dans le Nord, au LOSC. Pendant deux ans et après s’être révélé en D2 à Rouen avec une dernière année à douze buts, François Heutte a fait les beaux jours des Dogues, faisant trembler les filets à 22 reprises en deux saisons et notamment une fois en moins d’une minute lors d’un derby face à Lens en 1958.

Et bien en a pris au Racing de mettre le petit François dans sa hotte pour un petit paquet de biff’ car le Parc des Princes va être témoin de l’éclosion de son attaquant, et ce, dès sa première saison avec treize buts. C’est d’ailleurs à l’issue de cet exercice qu’il honorera deux de ses neuf sélections en Bleu lors du premier Euro de l’histoire en 1960. Cerise sur le gâteau, ses deux buts (en deux matchs car il n’y avait que quatre équipes engagées) dans la compétition le placent en co-meilleur buteur. François Heutte a poursuivi sur sa lancée, faisant partie de la machine de guerre offensive du Racing Paris, composée notamment du Polonais Cisowski, meilleure attaque du championnat de 1959 à 1962 et détenant toujours le record avec 118 banderilles plantées en l’année 1959. Le seul regret qu’Heutte pourra avoir de ses cinq saisons à Paris restera les deux titres manqués d’un rien : en 1961, lorsqu’un nul fait tout capoter à la dernière journée, et la saison suivante, quand les Bleu et Blanc perdent le titre au goal average pour un seul but.

Le buteur poursuivra ensuite sa route en D1, arpentant Saint-Étienne, revenant à Lille ou passant par Reims. Cela avant de finir sa carrière dans sa deuxième maison qui avait pris une sacrée claque depuis son départ, rétrogradée au niveau amateur jusqu’en Division d’honneur au niveau amateur (4e niveau). Son retour chez le rebaptisé Racing Club de France au début des années 1970 redonne des couleurs à son équipe qu’il ramène en D3. Le jeu est terminé pour Heutte, il peut raccrocher les crampons à 34 ans en laissant derrière lui 97 buts en 155 matchs de D1.

#339 - Laurent Robert

Laurent Robert
Montpellier (1994-1999), PSG (1999-2001)

N’en déplaise à Jérôme Rothen, la plus belle patte gauche passée par le Paris Saint-Germain n’est pas la sienne, mais bien celle de Laurent Robert. C’est bien simple, le Réunionnais savait tout faire avec son pied gauche. Des centres, des corners, des passes laser, des transversales de 50 mètres, des coups francs, des frappes. Bref, celui qui a refusé l’AJA car il faisait trop froid et qui a préféré lancer sa carrière pro du côté de Montpellier régalait à chaque fois qu’il touchait le cuir avec son pied gauche. Pour le plus grand malheur des gardiens adverses qui avaient mal au main tellement Laurent Robert envoyait des pralines surpuissantes.

Une aptitude qui lui vient de son paternel, comme il l’expliquait dans un entretien fleuve à So Foot en 2014 : « Mon père était footballeur, il était avant-centre. La frappe du gauche que j’ai, il l’avait des deux pieds ! Ça vient de mon père. Tout dépend de tes appuis. Je me disais : « Allez, putain, je vais rentrer dedans, je vais fracasser tout le monde avec ma frappe. » Mon but, à chaque fois, c’était de faire mal et que le gardien le sente. Comme ça, il évitera le prochain ballon. » Et cela fonctionne, puisque celui qui aurait dû être au Mondial 2002 a planté 15 pions avec le PSG pour sa dernière saison en France avant d’aller régaler Newcastle. Et dire que sans les embrouilles à répétition avec Luis Fernandez – « Tous les grands, tous les joueurs qui avaient une notoriété supérieure à lui, il n’aimait pas ça. Il a été un grand joueur, il n’y a rien à dire là-dessus. Mais c’est vrai qu’à l’époque, c’était très compliqué de travailler avec lui. Le mec arrive et il te sort. Les raisons, c’était que je ne voulais pas travailler ou que je faisais ma star. Ce sont toujours les réponses d’un entraîneur qui ne peut pas te saquer. Ou il allait dire au président que je ne voulais pas jouer, que je me la pétais. C’est facile de parler ainsi. T’arrives, tu veux monter ton équipe. Peut-être que ma tête ne lui plaisait pas. » – le PSG aurait pu se présenter avec un duo Laurent Robert – Ronaldinho. Même si Luis aurait été capable de les mettre tous les deux sur le banc.

#338 - Jean-Jacques Kretzschmar

Jean-Jacques Kretzschmar
LOSC (1945-1946 puis 1947-1948), CO Roubaix-Tourcoing (1946-1947 puis 1948-1952), Sète (1953-1954)

La légende du – défunt – Club olympique de Roubaix-Tourcoing. Deux fois champion de France (avec Lille en 1946 aux tout débuts du club, et avec le CORT en 1947), JJK a surtout rayonné chez les Cortistes, avec qui il inscrira 65 pions en première division, un record pour le club du Nord. Étant le fils d’Henri Kretzschmar, vice-président du LOSC jusqu’en 1956, Jean-Jacques a également été l’un des acteurs d’une drôle d’histoire qui aurait eu lieu à l’automne 1945 et que narre Le Petit Lillois : avant un déplacement à Rennes avec le LOSC, le fils Kretzschmar et son entraîneur Georges Berry se brouillent, et ce dernier annonce quelques jours plus tard qu’il ne titularisera pas son avant-centre en Bretagne, malgré l’absence de la gâchette René Bihel aux avant-postes. Problème, le père s’en mêle jusqu’à faire intervenir le président Louis Henno, qui lâche au coach : « J’ai décidé que Jean-Jacques jouerait à Rennes. Prenez vos dispositions. » Mais Berry est têtu et décide de ne pas faire le voyage, laissant son équipe en autogestion… Pour une victoire 4-1 au stade de la route de Lorient, le 7 octobre. Henno n’aura jamais d’excuses de la part de son coach, qui sera prié de plier bagage à la fin de saison. Tout ça à cause d’un petit merdeux de vingt ans, qui ne mettra pas longtemps à faire parler son talent par la suite, à Roubaix.

Crédit photo : Bibliothèque numérique de Roubaix

À lire : La Grande Histoire du LOSC, de Patrick Robert, aux éditions Hugo Sport.

#337 - Jean Swiatek

Jean Swiatek
Bordeaux (1945-1947 puis 1949-1954)

La grande évasion. Puis l’irrésistible ascension. Né en Pologne, le petit Janek (renommé plus tard Jean) Swiatek arrive en France à l’âge de quatre ans, ses parents venant travailler dans une mine de sel de Meurthe-et-Moselle. À 17 ans, le jeune homme se fait déjà remarquer sur les terrains, mais la Seconde Guerre mondiale passe par là. Enrôlé de force pour participer au STO, il ne met que quelques mois à s’échapper et atterrit à Bordeaux. Le début d’une très belle histoire d’amour entre le club au scapulaire et ce défenseur au physique impressionnant (1,83 m, 80 kg), qui devient et demeure un joueur majeur des Girondins de l’après-guerre. En tant que capitaine, il guide ainsi les Marine et Blanc jusqu’à leur tout premier titre de champion (1950). « Au club, il n’y avait aucun vedettariat, précise l’international français dans un entretien accordé à Sud Ouest. J’ai fait de la pub pour des pâtes et un apéritif, on m’a payé avec deux bouteilles et des paquets de pâtes ! À cette époque, avec mon magasin d’articles de sport, ça permettait de continuer à vivre. » Son magasin, c’est Gallice et Swiatek, qu’il ouvre avec son coéquipier et ami René Gallice. Une belle manière de prolonger l’idylle avec la cité aquitaine.

#336 - Jean Baeza

Jean Baeza
Cannes (1965-1966), Monaco (1966-1968), Red Star (1968-1969), Lyon (1969–1974)

Ceux qui répètent chaque week-end en voyant son short remonté qu’ils n’aimeraient pas se frotter à Nicolas Pallois sur un terrain n’ont sans doute jamais croisé la route de Jean Baeza. Né en Algérie, le défenseur a fait l’essentiel de sa carrière en France, de Cannes à Monaco en passant par le Red Star, dont il est le dernier joueur à avoir été appelé en équipe de France au moment où il portait le maillot audonois. Mais c’est surtout à l’OL que le bonhomme rugueux à souhait a marqué les esprits dans les années 1970, formant une paire très solide avec Ljubomir Mihajlović, avec Raymond Domenech pas très loin. Une terreur pour les attaquants, même s’il ne se gêne pas pour planter treize fois dans l’élite en 271 apparitions et neuf saisons. « Un immense joueur, dira son pote Bernard Lacombe à son décès en 2011. C’était un tueur à gage. Pas un n’a fait ce qu’il a fait. Même nous, parfois, il voulait nous choper. » L’attaquant autrichien de Nice Helmut Metzler en fera les frais en voyant le défenseur lui casser la jambe. Bons baisers de Baeza.

#335 - Jean-Claude Hernández

Jean-Claude Hernández
Monaco (1960-1968)

Ce sont des petites histoires telles que celle-ci qui font tout le sel et représentent toute la richesse du championnat de France. Gardien de Monaco, Jean-Claude Hernández se blesse au bras à l’occasion d’un match contre Valenciennes, le 7 octobre 1962. Le portier d’1,78 mètre ne peut évidemment plus tenir sa place entre les bois, mais, les remplacements n’étant pas encore autorisés, il poursuit la rencontre… en attaque. À la 84e minute, l’avant-centre de fortune décoche une reprise de volée des vingt mètres qui fait mouche, devenant ainsi le premier gardien de l’histoire de la D1 à marquer dans le jeu. De quoi sceller le succès (3-1) d’une ASM jusque-là en grande difficulté au classement et qui finira sa saison en trombe, avec un doublé Coupe-championnat à la clé. Également sacré champion deux ans plus tôt, l’homme aux 230 matchs dans l’élite avec le club du Rocher a donc trouvé une façon peu commune pour un dernier rempart de se faire remarquer.

#334 - Stéphane Paille

Stéphane Paille
Sochaux (1982-1987 puis 1988-1989), Montpellier (1989), Bordeaux (1989-1990 puis 1993-1994), Caen (1991-1993), Lyon (1994)

C’est à Sochaux que le feu de Paille a été allumé, et il s’est développé jusqu’à se transformer en brasier. L’attaquant haut-savoyard a enflammé le championnat dans les années 1980, poussant le curseur à 15 buts en 1984-1985 et 1988-1989. «  C’était un avant-centre complet, technique, puissant, qui savait décrocher, remiser, participer au jeu, doué pour tout dire. Il avait trouvé à Sochaux l’environnement idéal pour s’épanouir  » , se rappelle son ancien coéquipier Jean-Christophe Thomas. Au sommet de la vague, Stéphane Paille est même élu joueur français de l’année par France Football en 1988. « Sur le terrain, c’était un gagneur, un attaquant pur, abonde Marcel Dib. Il avait le sens du but, c’était le prototype de l’avant-centre moderne. Je l’ai vu jouer avec Cantona, c’était quelque chose !  »

« Il dégageait une énorme maturité dans son jeu malgré son âge. Dans le vestiaire, c’était un chambreur. Il me disait souvent : « Quand je suis à côté de toi, c’est facile de devenir un bon joueur. » Mais avec lui aussi, c’était facile de jouer parce qu’il comprenait bien le jeu » , confiait Mecha Baždarević. Dernière couche, avec Philippe Montanier : «  Quand je repense à Stéphane, c’est le match retour contre Saragosse qui me vient à l’esprit (avec Caen, en 1992). C’est un avant-centre, mais il a évolué comme libéro et s’en est très bien sorti. On avait préparé bien sûr, mais l’entraîneur l’avait placé là pour profiter de son intelligence, de ses qualités de relance et de placement. Pour qu’un avant-centre, normalement égoïste, soit dans l’adhésion totale à ce type de coup tactique, cela démontre un grand sens du collectif. » Les meilleurs partent toujours les premiers…

#333 - Guy Calléja

Guy Calléja
Bordeaux (1959-1960 puis 1962-1969)

Rien qu’en voyant l’élégance avec laquelle il portait le maillot au scapulaire, on devine qu’il en a été l’un des meilleurs soldats. Défenseur central – ou milieu défensif – 100% local, car natif du port de la Lune et formé chez les Girondins, il a été le pilier bordelais durant toute la décennie des 60s, ayant connu la D2 avant de vivre les années de loser magnifique de la formation du 33, avec qui il a été triple finaliste de la Coupe de France (1864, 1968 et 1969) et trois fois vice-champion de France (1965, 1966 et 1969). Au point d’être le modèle du jeune Alain Giresse : « Il y avait un joueur à l’époque qui marquait, c’était Guy Calleja, racontera Gigi dans l’émission NousLesGirondins du média Girondins Analyse. C’était le symbole de Bordeaux, un local, il était de Cauderan, et c’était le capitaine. Ce fut un joueur marquant, international, installé avec l’équipe de France. Mais lui, c’était un homme de devoir, un numéro 6, qui était représentatif de ce qu’on évoque quand on parle d’être Girondins. » Devenu entraîneur, il était destiné à prendre les rênes de son club de cœur, mais c’est au Gazélec d’Ajaccio, où il a terminé sa carrière de joueur, qu’il a finalement officié.

#332 - Rafael Santos

Rafael Santos
Nantes (1963-1965), Nice (1965-1969)

Acteur majeur du titre de 1965 avec le FC Nantes, Rafael Santos a régalé chez les Canaris, puis chez les Aiglons. L’Argentin se fait alors un malin plaisir à déplumer les défenses. « Réputé pour sa combativité et son adresse technique » , il a appliqué la même recette à l’OGC Nice, où il claque 14 buts en 29 matchs dès sa première saison, et mène le Gym à la deuxième place du championnat en 1968. « Rafael était un vrai Argentin, un vrai gagneur ! Il n’arrêtait pas de râler, se rappelait Bernard Blanchet. C’était une surprise à l’époque de le voir débarquer à Nantes. Il s’est vite adapté, car il était très accueillant et super sympa. Rafael travaillait beaucoup. » Milieu offensif ou avant-centre, Santos a inscrit la bagatelle de 58 buts dans l’élite. Un Argentin qui ne lâchait rien.

#331 - Bernard Lech

Bernard Lech
Lens (1963-1969), Nancy (1970-1971), Reims (1971-1975), Angers (1976-1977), Paris FC (1978-1979)

À France Football, Bernard Lech confiait : « La condition physique, le jeu de tête, la puissance, ça se travaille. La technique, c’est une chose que l’on possède. » Et la technique, le milieu offensif l’avait. Admiratif de Pelé et Beckenbauer, le natif de Montigny-en-Gohelle se reconnaissait « une bonne clairvoyance, un certain sens du jeu et une belle frappe des deux pieds » . Des qualités qu’il a immédiatement démontrées à Lens, aux côtés de son frère Georges et sous le regard de leur père, jardinier pour le Racing. L’artiste a joué la même partition du côté de Nancy, Reims, Angers et au Paris FC (autant d’équipes qui jouaient au mieux le milieu de tableau, au pire le maintien), pour porter son total à 78 buts en D1. Tellement immanquable qu’il a été interviewé par le musée du Louvre-Lens pour raconter son histoire, en compagnie de son frère.

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Par Quentin Ballue, Jérémie Baron, Adel Bentaha, Raphaël Brosse, Clément Gavard et Steven Oliveira, avec toute la rédaction de SF

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