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Top 100 : Humiliations suprêmes (de 40 à 31)

Par Alexandre Aflalo, Mathias Edwards, Jérémie Baron et Florian Rainho

Parfois, on pose le pied sur un carré vert sans avoir conscience que l'on va en sortir en ayant perdu un peu de nous-mêmes. En voici 100 exemples, avec à chaque fois un tortionnaire et une ou plusieurs victimes. Un top pour public averti.

#40 - Di María face à l'AEK Athènes

Benfica – AEK Athènes (2-1)

17 décembre 2009, phase de groupes de C3 (J6)

Parmi toutes les qualités dont il dispose, Ángel Di María a quand même un défaut : il n’a pas vraiment de pied droit. Sur ses 141 buts en club depuis 2005, seuls 10 sont venus de sa mauvaise patte. Heureusement, pour ça, Ángel a un remède infaillible : il maîtrise à la perfection le coup du foulard. Exemple : lors d’un match de poules de Ligue Europa contre l’AEK Athènes en 2009, alors qu’il vient de faire un petit pont à ce pauvre Nikolaos Georgeas, Di María préfère s’assurer le but et ponctuer son humiliation avec un coup du foulard plutôt que de faire confiance à son mauvais pied, qui aurait sans doute envoyé le ballon dans les gradins de l’Estádio da Luz. Et cette action dans les oubliettes du football.

Taux d’humiliation : 87%, le gardien n’a absolument rien compris à ce qu’il se passait.

#39 - Ronaldinho coiffe Gurpegi

FC Barcelone – Athletic Bilbao (1-1)

17 janvier 2004, Liga (J20)

Selon le site de référence partir.com, les étés bilbayens peuvent être assez chauds, avec une température moyenne de 26 degrés en juillet, et 27 en août. Ce qui ne pose aucun problème à Carlos Gurpegi. Depuis janvier 2004, l’homme est immunisé à vie contre tout coup de soleil, fort de trois sombreros offert par Ronaldinho.

Taux d’humiliation : 41,7%, soit le prix de trois sombreros géants en paille de chez Cdiscount (frais de port non inclus).

#38 - Marc Batta sur Rui Costa

Allemagne – Portugal (1-1)

6 septembre 1997, qualifications pour la Coupe du monde

C’est une chanson de geste ou plutôt de mains. Marc Batta cherche ses cartons de la main gauche, puis les glisse dans celle de droite. D’abord, il montre subrepticement le jaune au coupable désigné, puis lève dans le ciel de Berlin ce 6 septembre 1997 le rouge. À l’aide de deux doigts, il lui rappelle qu’il s’agit du second (comme s’il n’était pas au courant), puis lui demande de dégager. Sortir, c’était bien l’intention de Rui Costa. Incrédule, le jeune Sergio Conceição se demande s’il peut toujours entrer sur la pelouse comme prévu. Son regard se perd sur le dos de Marc Batta reparti à son devoir tel le maréchal des logis-chef, Cruchot, après avoir verbalisé un automobiliste à l’entrée de Saint-Tropez. Le crime du Portugais ? Avoir un peu trop traîné les pieds au moment de sortie. La balle affaire. Tout un pays regarde encore son meneur de jeu pleurer dans son haut de survêtement Sagres, quand Ulf Kirsten égalise pour l’Allemagne (1-1 résultat final). Depuis, la mémoire portugaise a oublié Kirsten et les points bêtement perdus contre l’Arménie ou l’Irlande du Nord en chemin. Pour elle, le bourreau n’est pas allemand, mais bien français : Batta reste l’unique responsable de la non-qualification portugaise pour cette Coupe du monde presque à la maison.

Taux d’humiliation : 90% sur le coup pour un Rui Costa mis au coin par un prof peau de vache pour avoir oublié de signer son carnet de correspondance. Autant que pour Marc Batta 17 ans plus tard. À l’occasion d’un match européen de Benfica à la Luz, un dirigeant de la fédération portugaise tente d’organiser la grande réconciliation entre les deux hommes. Batta est prêt à accepter la poignée de mains, mais Rui Costa, devenu directeur sportif de Benfica, l’envoie sur les roses. « Je lui pardonnerai quand il se sera excusé auprès de mon pays » , justifiera-t-il dans les colonnes de A Bola. Même dans le très catholique Portugal, il existe des limites au pardon.

#37 - Le « Bolasie flick »

Tottenham – Crystal Palace (0-0)

6 décembre 2014, Premier League (J15)

« Je le faisais dans la cour de récré. » Quand Yannick Bolasie parle de sa botte secrète, on bascule tout de suite dans le romantique. En ce mois de décembre à White Hart Lane, lorsqu’il dévoile son tour de passe-passe au grand jour, les victimes s’appellent Christian Eriksen et Roberto Soldado. L’enchaînement est tellement irréel que le Congolais sera obligé de prouver que oui, il savait ce qu’il faisait. Qu’importe que Joe Ledley ait du sang sur les mains pour n’avoir pas converti le caviar du Lyonnais de naissance : aujourd’hui, le Bolasie flick est une marque déposée. Maintenant, quand Kalash Criminel lâche « J’t’efface comme Yannick Bolasie, comme Riyad Mahrez » , vous savez pourquoi.

Taux d’humiliation : 2%, comme la tension artérielle des deux martyrs au vu du temps qu’ils mettent à comprendre que le magicien des Eagles est en train de leur filer entre les doigts.

#36 - Ribéry plante Messi

Bayern – Barça (4-0)

23 avril 2013, demi-finale aller de C1

Francky le voulait, ce Ballon d’or. Il a tout fait pour, et même plus, allant jusqu’à planter le séant du Roi Léo dans le gazon de l’Allianz Arena, d’un simple crochet extérieur. Ce soir-là, les Allemands s’imposeront 4-0 avec 37% de possession de balle. Soit 14% de plus que le score de Ch’ti Franck au classement du Ballon d’or. Dur.

Taux d’humiliation : 23,36%, comme le pourcentage de votes glanés par Ribéry à l’élection du Ballon d’or 2014.

#35 - Le « Cruyff turn »

Pays-Bas – Suède (0-0)

19 juin 1974, phase de groupes de Coupe du monde (J2)

Ils sont peu à avoir donné leur nom à un geste. Et encore moins à l’avoir donné à une humiliation. Mais le 14 batave était de ceux qui avaient décidé de marquer l’histoire. Feinte de passe à gauche, crochet intérieur du droit, demi-tour en sens inverse, pas un regard pour l’adversaire au sol – ici le pauvre Jan Olsson. Aussi simple en apparence que dégradant pour l’adversaire, connu de tous, mais efficace à chaque fois, le « Cruyff turn » était la signature d’un des plus grands joueurs de tous les temps. On parie qu’il fait danser les anges, là-haut ?

Taux d’humiliation : (4 Ligues des champions + 10 titres de champion des Pay-Bas et 5 d’Espagne + 2 clopes à la mi-temps) x 14 = 294%

#34 - Ben Arfa sur Blackburn

Newcastle – Blackburn (2-1)

7 janvier 2012, 3e tour de FA Cup

Lorsque les bardes conteront dans plusieurs millénaires la légende hatémienne, ils auront de quoi pousser la chansonnette. Il y a eu toute sorte de polémiques, ses innombrables embrouilles avec ses entraîneurs, son entraînement sur la plage déguisé en poussin, sa mise au placard au PSG et cette vidéo complètement folle … mais il y a aussi eu du football. Et du beau football. La quintessence de Ben Arfa se savoure en une séquence d’à peine dix secondes, lors desquelles le H zig-zague comme une tornade dans la défense de Blackburn, beaucoup trop vif pour être arrêté, avant de crucifier le gardien d’une frappe imparable. Alan Pardew le qualifiera de « plus beau but qu’[il] ait jamais vu » . Le genre d’action qui fait se rendre compte du monumental gâchis qu’aura été sa carrière.

Taux d’humiliation : 86%, comme le nombre de matchs disputés par Hatem à Newcastle. un chiffre qui monte à 95% si on ajoute son année en prêt à Hull.

#33 - Firmino sur Raphael Wolf

Werder Brême – Hoffenheim (1-1)

30 août 2014, BuLi (J2)

C’est pour ça qu’on l’aime, petit Firmin : il donne souvent l’impression d’être un bambin qui souhaite juste s’amuser avec la sphère qui lui colle aux pieds. Et quoi de mieux que le no look goal pour ça ? C’est même devenu une de ses spécialités : la Premier League y a goûté, mais avant ça, la Buli avait déjà eu affaire au scélérat brésilien. En ce sens, sa réalisation face au Werder relève du petit chef-d’œuvre : contrôle de l’espace pour éviter la sortie pleine balle du dernier rempart adverse, conclusion sans même jeter un œil à la cage. Ronnie peut être fier du monstre qu’il a créé.

Taux d’humiliation : 41%, comme le nombre de millions d’euros que posera Liverpool à la fin de cette exercice pour que l’Auriverde vienne claquer des pions de ce genre à Anfield. Humilier par simple plaisir personnel, telle est la vie que Firmino a décidé de mener.

#32 - Chedjou sur Ibrahimović

PSG – Lille (1-0)

27 janvier 2013, Ligue 1 (J22)

Le sourire du Z dit absolument tout, sur cette action. Évidemment, il y a le sentiment d’humiliation « classique » de se faire glisser un petit pont alors qu’on presse comme un mort de faim. Mais surtout, il y a cette sensation étrange et absurde que ce soit lui, Zlatan Ibrahimović, star de la Ligue 1 et terreur des défenses, qui se fasse rentrer un « panna » dévastateur par Aurélien Chedjou, qui a fait ça avec une telle assurance que l’on aurait dit qu’il avait attendu ce moment toute sa vie. Tellement chaud que huit mois après, il a calé exactement le même entre les guibolles de Dario Cvitanich. Pas exactement le même client, mais la même sensation.

Taux d’humiliation : 60%. Une belle majorité, car c’est bien exécuté et fait proche de son but, mais Lille perd le match 1-0 sur un CSC de Chedjou, donc c’était la moindre des choses.

#31 - Zambo sur Carvajal

Villarreal – Real Madrid (2-2)

1er septembre 2019, Liga (J3)

Faites d’abord doucement couler votre pâte sur votre surface bien huilée, si possible à l’aide d’une louche. Étaler soigneusement, et une fois que vous obtenez une couleur roux clair sur la première face, n’oubliez pas de retourner la chose avec le plus de délicatesse possible. Bon appétit, et n’oubliez pas le beurre salé.

Taux d’humiliation : 62%, comme la minute à laquelle André Zambo Anguissa est sorti du banc ce soir-là, et c’était visiblement suffisant pour faire du latéral droit du Real sa chose. Mais au fait, comment dit-on « crêpe » de l’autre côté des Pyrénées ?

Par Alexandre Aflalo, Mathias Edwards, Jérémie Baron et Florian Rainho

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