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Top 10 : Déclarations politiques délirantes sur les incidents du Trocadéro

Par Anthony Cerveaux, Nicolas Kssis-Martov et Quentin Blandin
Top 10 : Déclarations politiques délirantes sur les incidents du Trocadéro

Les événements violents du Trocadéro ont suscité une pluie de réactions et de commentaires, parfois balancés sans retenue ni réflexion. Dans ce registre, les politiques ont fait très fort. Beaucoup n'ont toujours rien compris à ce qui se passe autour du football et aux difficultés du PSG avec ses supporters. Entre amalgames, bévues, contre-vérités ou mauvaise foi, on a eu droit à un somptueux florilège de déclarations délirantes. Voici une petite liste des 10 occasions de se taire…

« On n’a pas anticipé la connexion entre ce que l’on avait vu lors des manifestations contre le mariage pour tous et les hooligans qui gravitent autour du PSG. Là, il y a eu la conjonction des deux et évidemment ils s’en sont donnés à cœur joie. »

Jean-Christophe Cambadélis, député PS de Paris

La liaison est habile, arrangeante même pour la gauche : voir des activistes d’extrême droite rejoints par des hooligans de Boulogne pour reproduire au Trocadéro et en plus grand, le bordel plus feutré des fins de « Manif pour tous » . Mais elle s’arrange beaucoup avec la réalité. Il n’y avait pas plus de hooligans et de fachos parisiens face au Palais de Chaillot que de communauté Black-Blanc-Beur à la fin des cortèges de Frigide Barjot. N’en déplaise au député de Paris, les pillages du Trocadéro et de ses environs ne ressemblent guère aux violences habituelles des hooligans, bel et bien absents des festivités du 16e arrondissement.

« Grâce à une politique très ferme d’interdictions de stades et un travail d’échanges avec les clubs de supporters, l’État et le PSG avaient réussi à ramener le calme dans les tribunes du Parc des Princes et l’on ne pouvait que s’en féliciter »

Valérie Fourneyron, ministre des Sports

Le communiqué de la ministre des Sports est précipitamment publié dans la soirée suivant les incidents du Trocadéro. Echange avec les groupes de supporters parisiens ? Ils ont presque tous été dissous au printemps 2010. Dialogue de la part du PSG ? Les supporters contestant la politique du club l’attendent depuis près de 3 ans… Echanges nationaux avec les associations de supporters ? Le congrès des supporters de 2010 est resté lettre morte. La ministre des Sports s’est néanmoins reprise deux jours plus tard, en distinguant les ultras des casseurs et en soulignant l’intérêt d’une politique de prévention contre le hooliganisme, alors que la politique actuelle est presque uniquement répressive.

« S’il se confirme que ceux-ci [les fauteurs de troubles, ndlr] sont membres d’un club de supporters identifié pour ses débordements et ont déjà été sanctionnés pour des violences répétées en particulier dans l’enceinte et aux abords du Parc des Princes, nous demandons la dissolution de ce club [de supporters, ndlr], conformément aux dispositions prévues par la loi »

Jean-Marie Le Guen et Christophe Caresche, députés PS de Paris

Décidément le PS n’est pas à l’aise avec les supporters, mais si une palme devait être décernée, elle reviendrait sans hésitation à Christophe Caresche. Après avoir rédigé en 2007 avec Claude Goasguen, le projet de loi instaurant la possibilité de dissoudre les groupes de supporters considérés comme violents, le député de Paris a forcément dû suivre la dissolution en 2010 des associations du virage Auteuil (Supras, Authentiks, Grinta) ainsi que des bandes hooligans de Boulogne (Milice et Loubards). Il n’y a donc plus grand-chose à dissoudre d’autant que le PSG entrave fortement toute reconstitution de groupe de fans. Tout cela n’empêche pourtant pas Caresche de réclamer la dissolution des « clubs » de supporters, alors que le Parc des Princes ne compte plus aucun groupe (hormis les quelques dizaines de membres des Titifosi et des Hoolicool)… Souhaite-t-il dissoudre les bandes de potes qui vont ensemble au Parc ?

« Ceux qui avaient été exclus du Parc des Princes sont venus se venger »

Bertrand Delanoë, maire de Paris

Mardi matin, réaction hâtive et musclée pour compenser la légèreté de ses déclarations de la veille minimisant les incidents : c’est la faute des ultras, responsables selon le maire de Paris de « l’essentiel des violences » . Il faut dire que l’argument est idoine : les violences contre ce PSG qui fait désormais l’unanimité ne peuvent être que le fait d’aigris, de revanchards. Il est loin le temps où Pascal Cherki, adjoint au maire de Paris, prenait la défense des Tigris Mystic, groupe ultra du virage Auteuil… La veille, déjà, Bertrand Delanoë avait montré sa fébrilité dans l’appréhension du dossier en déclarant, alors que le Trocadéro se transformait en champ de bataille : « C’est dommage qu’il y ait eu une poignée de perturbateurs, les débordements ont été contenus, la fête n’a pas été gâchée » . Bien vu.

« La fête a été gâchée par ceux-là même qui ont été exclus du Parc. Ils n’y ont définitivement pas leur place »

Anne Hidalgo, première adjointe et candidate PS à la mairie de Paris

La ligne a dû être définie très tôt à la mairie de Paris ce mardi matin puisqu’à 8h32, Anne Hidalgo met ses tweets dans les pas de Delanoë, histoire là aussi de montrer qu’après les inacceptables incidents de la veille, on est sur le pied de guerre du côté de l’Hôtel de Ville. Quitte à verser dans le stéréotype : les 13 000 supporters qui n’ont pas vu leur abonnement au Parc renouvelé en 2010 par le plan Leproux apprécieront. Surtout, elle enchaîne immédiatement avec un plus consensuel « De tout cœur avec les vrais supporters parisiens… » oubliant que dans les premiers, il y a aussi très certainement des seconds.

« Nos champions méritent mieux, nous nous retrouverons pour fêter la victoire au Stade de France »

Nathalie Kosciusko-Morizet, candidate UMP à la mairie de Paris

Le PSG est devenu un élément incontournable de la vie parisienne, de ce point de vue les Qataris ont réussi leur coup. Alors que ce qui aurait dû être un grand moment jubilatoire pour Bertrand Delanoë prenait des allures de fiasco, la tentation de la récupération politicienne en vue de la campagne municipale a fait entendre sa petite voix entêtante. Nathalie Kosciusko-Morizet la parachutée s’est donc immédiatement précipitée vers son smartphone histoire de se poser en grande sauveuse de l’honneur bafoué du club parisien et de ses « vrais » supporters. Bonne idée de les inviter à se rassembler au Stade de France ! Sauf que le PSG joue au Parc des Princes. Encore un merveilleux couac de com’ démontrant qu’elle connaît encore moins l’histoire du club de la capitale que Zlatan et Nasser Al-Khelaïfi réunis… Ou qu’au contraire de son propre camp politique parisien, elle souhaite un départ du club vers la soucoupe du 9-3… La campagne municipale promet d’être drôle. Rachida Dati nous manque déjà !

« C’est la faute des voyous, des hooligans, des racailles, on les appelle comme on veut »

Eduardo Rihan Cypel, député PS

Un député PS né au Brésil aussi inculte sur la culture foot, cela laisse songeur. Entre la banalité du « les méchants ne sont pas les gentils » , la confusion entre les termes, et le mélange entre les hooligans parisiens –absents des violences – et les « racailles » , terme dont la gauche laissait penser qu’il appartenait au sieur Sarkozy, inutile de dire qu’il reste du travail pour former nos élites aux subtilités du monde des tribunes. Cela dit, de « C dans l’air » à « Enquête exclusive » , les télés ont multiplié les raccourcis et les amalgames. Le député PS a dû vouloir se mettre dans le ton.

« Il n’est manifestement plus possible d’organiser le moindre événement dans les grandes villes de France, la population étant à la merci de racailles que les pouvoirs successifs, de droite comme de gauche, loin de neutraliser, s’évertuent à protéger par idéologie »

Marine Le Pen, présidente du Front National.

Comme la capitale reste hors de porté électorale du FN, Marine Le Pen joue sur la peur suscitée par les images de verres brisés et de lacrymos du Trocadéro pour décrire un Paris où désormais la vie est impossible, les gens se terrent, et où la fête de la musique ou encore les bals du 13 juillet seraient interdits par des jihadistes de banlieues. Elle a aussi parlé de casseurs pas intégrés socialement, quand l’un des prévenus habite le 8e arrondissement… Et elle a pris la défense des supporters parisiens injustement accusés, sans avoir pris la peine de regarder la tête des gars du virage Auteuil présents sur place qui ne font sans doute pas partie de ses plus fidèles électeurs. Mais elle a une excuse : elle est plutôt rugby !

« Vous aviez choisi la rue contre le Parlement lors des manifestations contre le mariage pour tous, alors que même des groupuscules d’extrême droite, violents et déterminés, sévissaient. Aujourd’hui, M. le député, on ne vous entend pas concernant les coupables [de lundi soir], les ultras et les casseurs qui défient les lois et l’autorité. Alors, à l’évidence, dans le pays et dans la République, l’ordre a changé de camp. Vous êtes pour le désordre, ici c’est l’ordre républicain »

Manuel Valls, ministre de l’intérieur

Si le souci d’ordre républicain qui anime le ministre du Barça est plus que louable et juste, un peu plus de professionnalisme et d’anticipation n’aurait sûrement pas nui à la justesse de sa ligne de défense. Si la rue ne décide pas des lois, les débordements ne sont pas non plus une justification pour refuser le droit démocratique de protester. En général, la gauche défend ce point de vue. Mais Manuel Valls est-il vraiment de gauche ?

« Les casseurs sont sûrement des descendants d’esclaves ils ont des excuses. #Taubira va leur donner une compensation ! »

Jean-Sébastien Vialatte, député UMP du Var

On avait presque oublié que nous étions quelque jours après « la journée officielle de commémoration de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions » et des polémiques autour des « réparations financières » réclamées par certaines associations et intellectuels. Le député du Var Jean-Sébastien Vialatte, lui, n’a pas manqué l’occasion de tisser un trait d’humour « FN-compatible » à ce sujet. Depuis il a confessé ses regrets alors que des menaces de procès planent sur lui. Pas sûr pourtant que cette phrase fut si involontaire que cela…

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