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Stéphanie Frappart, pionnière parmi les premières

Par Maxime Renaudet
Stéphanie Frappart, pionnière parmi les premières

À deux mois du Mondial féminin en France, Stéphanie Frappart arbitrera le match Amiens-Strasbourg ce dimanche. Habituée à officier en Ligue 2, elle deviendra la première femme à arbitrer un match de Ligue 1 et succédera à Martine Giron, Nelly Viennot, Florence Guyot et Corinne Lagrange, seuls visages visibles de l’arbitrage féminin français. L’occasion de retracer leurs parcours, et de rappeler que le chemin vers l’égalité est encore long.

En-fin. En annonçant Stépanie Frappart comme arbitre du match entre Amiens et Strasbourg ce dimanche, la FFF nous rappelle qu’il aura fallu attendre plus de cinquante ans pour qu’un match de première division française soit arbitré par une femme. Car c’est bien en novembre 1967 que la première arbitre est officiellement certifiée, trois ans après que la Fédération française a décidé de mettre en place des licences pour les femmes. À 21 ans, Martine Giron devient alors la pionnière du corps arbitral féminin français.

Pourtant, l’épreuve du temps et l’anonymat de cette première ne permettent guère d’en savoir plus sur son parcours. Et si l’arbitrage féminin émerge avant la reconnaissance officielle du football féminin, c’est bien ce dernier qui va se développer le plus, tant avant qu’après le début du XXIe siècle. Mais ces deux causes sont liées l’une à l’autre puisque dans le même temps, en 1968, l’Italie crée un championnat de football féminin. Un an plus tard, une Coupe d’Europe non officielle voit le jour en Angleterre car le football féminin n’est pas encore un sport officiel aux yeux des régisseurs du football masculin, l’UEFA et la FIFA. La première Coupe du monde féminine suit l’année suivante, mais encore et toujours de manière officieuse, sans que les instances dirigeantes ne la reconnaisse.

Nelly et les autres

Après Martine Giron en 1967, il faut faire défiler la frise chronologique jusqu’au début des années 1990 pour trouver une nouvelle arbitre française s’étant frayé un chemin parmi les hommes. Nelly Viennot reste sans doute l’arbitre tricolore la plus connue de toutes, et la Bas-Normande est une pionnière à son tour puisqu’elle a été la première à officier en première division masculine. C’était en avril 1996 lors d’une rencontre entre le PSG et Martigues, un an après qu’elle avait arbitré son premier match international chez les femmes. Contrairement à Stéphanie Frappart, Nelly Viennot était arbitre de touche, confiant sans amertume que l’opportunité d’officier au centre ne s’était pas présentée à elle. Plus étonnant, elle est également la première, en 2002, à avoir déjugé une décision arbitrale à l’aide de la vidéo. C’était lors d’un Lille-Guingamp, match de première division où le carton rouge adressé à Sylvain N’Diaye avait été retiré grâce au ralenti vu par Nelly.

En 2006, elle n’est pas loin de devenir la première femme à arbitrer une Coupe du monde masculine. Mais après avoir été pré-sélectionnée, elle n’est pas choisie à la suite d’un test de sprint. « Quand j’ai débuté en France, on ne passait que des tests féminins, mais petit à petit on essayait de se rapprocher des tests des hommes. À l’étranger en revanche, je passais déjà les mêmes tests que les hommes, donc ce n’est pas nouveau. Et puis, les choses ont rapidement évolué en France. Mais de nous-mêmes, déjà, on essayait de se mettre au niveau des hommes pour leur montrer que nous aussi, nous pouvions y arriver » , confiait-elle à la fin de sa carrière. En France, Nelly Viennot formait avec Corinne Lagrange et Florence Guyot le trio d’arbitres féminins au niveau national. C’est à ce moment-là que la FFF leur a proposé de faire la touche au plus haut niveau. Si ses deux comparses sont moins connues qu’elle, Florence Guyot a pourtant été la première femme à arbitrer un match de championnat de France masculin au niveau national. C’était en 1994.

Stéphanie Frappart, première du nom

Quand Nelly Viennot prend sa retraite sportive en 2007 avant de devenir observatrice pour l’arbitrage féminin auprès de la FFF et de la FIFA, la grande figure de l’arbitrage féminin est désormais suissesse. Elle s’appelle Nicole Petignat, et en 2003 elle est la première à arbitrer un match de coupe européenne lors de la rencontre de tours préliminaires de Coupe UEFA opposant Stockholm à Reykjavik. Encensée à l’époque par Stéphane Chapuisant, elle exerce très régulièrement sur les pelouses de première division suisse en qualité d’arbitre centrale, parvenant à se faire un nom dans l’arbitrage international. Mariée un temps à Urs Meier, arbitre suisse de la finale de la Ligue des champions 2002, elle arrête sa carrière en 2008. La relève européenne sera prise quasi automatiquement par l’Allemande Bibiana Steinhaus, première femme à arbitrer un match de première division dans l’un des cinq grands championnats.

Ce dimanche, Stéphanie Frappart sera donc la seconde, entrant dans l’histoire du football français alors même que son prédécesseur, Nelly Viennot, l’imaginait déjà en 2017 : « En France, on a la chance d’avoir Stéphanie Frappart qui est en Ligue 2 et que j’aimerais voir gravir le dernier échelon. Mais c’est vrai que c’est très compliqué, car en plus des prestations sur le terrain, il y a aussi les tests physiques, les tests vidéo. » Si elle sera mise sous le feu des projecteurs lors d’Amiens-Strasbourg, elle n’est pas la seule à pointer le bout de son sifflet sur le terrain des hommes.

Bientôt imitée ?

À 38 ans, Manuela Nicolosi a été nommée arbitre-assistante Fédérale 2 en 2018. Un peu moins d’un an plus tard, elle assistait Benjamin Lepaysant lors du match de Ligue 2 entre Béziers et Orléans. Il ne serait donc pas étonnant de la voir à son tour sur les pelouses de L1 prochainement, elle qui a officié lors de plusieurs compétitions internationales féminines aux côtés, justement, de Stéphanie Frappart.

À 35 ans, celle qui arbitre en Ligue 2 depuis 2014 va en tout cas devenir le nouvel étendard de l’arbitrage français féminin. L’an dernier, sur près de 25 000 arbitres, seules 825 étaient des femmes. Un ratio bien inférieur à celui du handball où près de 7000 femmes prennent le sifflet chaque semaine. En soufflant dans le sien ce samedi, elle va entrer dans l’histoire. Tout en rappelant que l’arbitrage comme le football n’échappe pas encore aux engrenages qui empêchent les femmes, à tous les niveaux du système, de s’affirmer dans un monde d’hommes.

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