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Stade rennais, sèche tes larmes

Par Maxime Brigand, à l'Emirates Stadium
Stade rennais, sèche tes larmes

Ils se sont battus, ils ont perdu, l'aventure s'achève. Si gagner permet de franchir les étapes, perdre permet à un groupe d'apprendre et de grandir. Cette défaite à l'Emirates doit être un acte fondateur pour le Stade rennais de Stéphan.

Et puis, le deuxième acte commence. Il y a d’abord, le fil conducteur : conserver sa personnalité, vivre et non se replier, se pointer sur scène « avec l’objectif et l’ambition de marquer au moins un but car, si on se contente de défendre, on va rencontrer de grandes difficultés » . Ensuite, le lancement des dialogues, la gestion des échanges et des quelques monologues entamés par des Gunners venus pour « jouer, jouer, jouer » . Prise de conscience, il est 21h15, on jette un œil à la table de marque : jeudi soir, le Stade rennais, qui arrivait en huitième de finale de la Ligue Europa pour tout gagner, a tout perdu en quinze minutes, laissant dans un premier temps filer l’avance qu’il avait validée une semaine plus tôt chez lui, s’ouvrant dans un second à une secousse encore plus importante. Sur le bord du plateau, Julien Stéphan, jeune guide d’une troupe de rêveurs qui grimpait pour la première fois un col d’une telle catégorie, comprend : « On imaginait qu’Arsenal attaquerait très fort la partie, mais, entre l’imaginer et le vivre, il y a une différence. Là, mes joueurs ont été pris dans trop de domaines… En première période, la marche était un peu haute et, en face, c’était le niveau Ligue des champions, même si le deuxième but, qui est clairement hors jeu, ce que tout le monde a vu, change beaucoup de choses. On a rencontré du haut de gamme, ça va nous enrichir. » Oui, une semaine après avoir roulé Arsenal en Bretagne (3-1), les Rennais ont été éjectés de l’Emirates (3-0) et de la Ligue Europa.

La mesure du fossé

Oublions un temps le résultat. On savait qu’Arsenal était supérieur au Stade rennais, Julien Stéphan le savait, tout le monde le savait. Ce qu’on ne savait pas, en revanche, en arrivant à Londres, c’est jusqu’où était capable de nous emmener cette équipe enthousiasmante et terriblement joueuse lorsqu’elle se donne les moyens de son expression collective. Ce qui nous amène à nous concentrer uniquement sur la performance, là même où, jeudi soir, certains hommes (Sarr, Grenier, Ben Arfa…) ont pu mesurer la taille du fossé qui sépare le haut niveau du très haut niveau. « En première période, on a pu réaliser tout ça car Arsenal était plus dense athlétiquement, plus fort techniquement, plus mature que nous, a expliqué Stéphan après la rencontre. Globalement, on est juste tombés sur plus fort que nous et il faut maintenant digérer les choses. Il faut surtout féliciter les joueurs pour leur parcours remarquable et remarqué. Finalement, je me dis qu’on perd peut-être notre qualification sur la seconde période du match aller, où on a eu la possibilité de marquer un quatrième but… C’est quelque chose qui fait partie de l’apprentissage. »

De son côté, le supporter de football est habitué à assumer les défaites. Celui du Stade rennais peut-être un peu plus que les autres, mais cette campagne européenne aura permis d’offrir un regard neuf sur un club qui ne cesse de structurer depuis plusieurs années, qui a prouvé par l’aventure qu’il avait de l’audace dans les veines, mais aussi un peuple derrière lui, un vrai. Jeudi soir, à l’Emirates, les 5000 supporters bretons auront été difficiles à sortir et auront même eu le luxe de voir Salma Hayek agiter sous leur nez un maillot de Sarr comme une gosse de dix-huit piges. L’image était belle alors qu’à quelques mètres de là, Clément Grenier et Benjamin Bourigeaud ne savaient plus trop où aller, rincés par des semaines émotionnellement riches et une dynamique positive qui vient de se casser d’un coup, brutalement. Voilà Julien Stéphan face à un premier vrai défi : trouver le bon ressort pour garder ce groupe psychologiquement droit et le pousser vers la quête d’une finale de Coupe de France. Rennes a aussi une fin de championnat à assurer et une nouvelle dynamique sportive à sécuriser. Cette aventure ne doit être qu’un début car perdre fait partie du jeu. Ce qui compte maintenant, c’est la façon de se souvenir, la façon de tomber, la façon d’apprendre. L’expérience, c’est avant tout ça : apprendre à perdre, face à plus fort que soi et aux « éléments contraires » . Un nouvel acte commence.

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