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Sala : « Les moments compliqués font partie de la vie »

Propos recueillis par Florian Manceau
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Avant de défier Rennes, qu'il n'a encore jamais vaincu en huit confrontations toutes compétitions confondues malgré trois buts marqués, Emiliano Sala prend un peu de temps pour se raconter. Mais sans se la raconter, à l'heure où il représente toujours le deuxième meilleur buteur de Ligue 1.

Tu culmines à 1,87m, soit bien davantage que la majorité des attaquants du championnat de France. Mais outre ta taille, tu étais déjà au-dessus des autres quand tu étais petit ?J’étais très mince, mais j’allais très vite ! Bon ma force, c’était déjà le travail et l’amour du but.

Ta toute première équipe, c’est le Proyecto Crecer. C’est un gros club, une entité connue en Argentine ?Non.

Quand j’étais petit, je ne changeais pas de crampons tous les quatre mois.

C’est dans une toute petite ville, où tout le monde se connaît, et le club joue dans une petite ligue. Un genre de championnat régional on va dire, dans lequel se confrontent des petits villages voisins.

Tu n’as pas forcément eu une enfance facile, ta famille n’ayant pas énormément de moyens. C’était compliqué de se fournir en chaussures de foot ou autre équipement pour pouvoir faire ce que tu aimais ?Moi et mon petit frère, on n’a jamais vraiment manqué de rien. Nos parents ont toujours tout fait pour nous, mais on savait bien qu’ils redoublaient d’efforts et qu’on devait respecter ça. Donc je ne changeais pas de crampons tous les quatre mois. C’est clair que je ne pouvais pas avoir ce que je voulais quand je le voulais.

Certains entraîneurs ayant voyagé en Argentine pour observer les centres de formation, comme Pascal Gastien que tu as d’ailleurs connu à Niort, notent que la concurrence est bien plus féroce qu’en Europe.

Si le foot n’avait pas marché, j’aurais continué les études et serait peut-être devenu professeur.

Que les jeunes se font presque la guerre sur les terrains… Déjà, les installations, les équipements, le matériel et le confort global sont moindres. Après, on dit qu’on a beaucoup de tempérament… Et c’est vrai qu’on a tous une énorme envie, une grosse faim de devenir professionnel, d’être sélectionné pour faire des essais en Europe. On était très proche hein, mais disons que quand le match commençait et qu’on te regardait, chacun faisait son maximum. On se donnait à 150% pour être appelé.

Tu as passé énormément d’essais aux Girondins de Bordeaux avant de finalement être pris en 2010. Tu savais ce que tu voulais faire si ça ne fonctionnait pas avec le ballon rond ?Non, j’ai toujours voulu être footballeur. Si ça n’avait pas marché, j’aurais continué les études et serais peut-être devenu professeur. Un truc lié au sport, quoi.

Raconte-nous ton arrivée à Bordeaux. Les dirigeants t’ont promis quelque chose, ils t’ont assuré que tu jouerais en équipe première ?Non, rien du tout.

Le meilleur moyen de traverser les moments difficiles est de travailler.

J’ai commencé en CFA 2 avec Patrick Battiston et Marius Trésor, et ça se passait bien. Je marquais pas mal de buts, et j’ai rapidement intégré le groupe de l’équipe première. J’ai fait mon premier match avec les professionnels à Lyon en Coupe de France (défaite 3-1 le 8 février 2012, N.D.L.R.), mais je continuais à évoluer avec la réserve. Moi, je voulais surtout jouer, continuer ma progression et prendre de l’expérience. Alors quand Orléans m’a appelé pour un prêt, j’ai tout de suite dit oui.

Mais quand tu reviens après une saison passée en troisième division (19 buts), la problématique est la même…Les dirigeants bordelais considéraient que la marche était trop grande entre le National et la Ligue 1. Niort est arrivé, et je ne me suis pas posé la question : j’ai foncé.

Ligue 2 donc, puis Ligue 1 avec un nouveau prêt à Caen… Chose étonnante, tous les coachs qui t’ont eu sont unanimes : tu joues chaque match comme une rencontre de Coupe du monde.

Je suis à l’écoute des personnes qui peuvent à mon sens m’apporter. Mais quand il s’agit d’autres personnes…

Même quand tu es prêté dans un autre club que celui auquel tu appartiens. Il ne t’est jamais arrivé d’avoir une baisse de motivation ou un petit coup de déprime lors de ce parcours assez difficile ? Je ne nie pas que j’ai parfois passé des moments compliqués. Ça fait partie de la vie. Mais quand ça arrive, je me dis que le meilleur moyen de les traverser est de travailler pour justement continuer à progresser. J’ai toujours fonctionné comme ça, en restant discret et tranquille, en faisant ce que j’aime.

« Rester discret et tranquille » , c’est effectivement une de tes forces. Notamment face aux critiques que tu as pu entendre sur ton jeu. Tu en as bavé, quand même ? C’est quelque chose qui te touche, oui. Après, ça dépend de la façon dont sont formulées ces critiques. Et ça dépend aussi de qui les formule.

Je n’ai pas été approché par la sélection.

Moi, je suis quelqu’un d’assez ouvert et je suis près à écouter les conseils, je suis à l’écoute des personnes qui peuvent à mon sens m’apporter. Mais quand il s’agit d’autres personnes, je ne fais pas gaffe. Il y aura toujours des mécontents.

La France donne l’impression d’avoir du mal avec le profil d’attaquant que toi ou Olivier Giroud représentez. Tu penses que c’est mieux compris à l’étranger ?Ce profil est sans doute plus adapté à l’Angleterre ou à l’Allemagne, par rapport à l’intensité, au jeu mis en place. Donc oui, c’est peut-être mieux vu dans ces pays-là.

Depuis le début de la saison actuelle, tu as gagné en reconnaissance, car tu fais partie des meilleurs buteurs de Ligue 1. Est-ce que ta notoriété a également augmenté en Argentine ?Forcément. Être meilleur buteur argentin en Europe, on m’en a parlé. Surtout que je n’étais pas hyper connu au pays puisque je suis parti très tôt, à vingt ans. Mais je n’ai pas été approché par la sélection. En même temps, je suis conscient de la qualité et de la quantité des attaquants argentins existant dans le monde et dans les plus gros clubs d’Europe.

Mais ça reste dans ta tête…Ce n’est pas une obsession, mais ça représenterait effectivement beaucoup de défendre les couleurs de mon pays.

À lire : le portrait total d’Emiliano Sala dans le numéro 162 de SO FOOT, toujours en kiosque.
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Propos recueillis par Florian Manceau

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