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Sainté-Lyon : je vous déteste, cordialement

Par Mathieu Rollinger
Sainté-Lyon : je vous déteste, cordialement

Si les rencontres sont toujours aussi électriques en tribune et engagées sur le terrain, les relations entre Saint-Étienne et Lyon semblent être de plus en plus apaisées en dehors des confrontations directes. Si bien que le derby ressemble de plus en plus à un match de voyous joué par des gentlemen.

Le parcage visiteur du Chaudron ne sonnera pas creux en ce jour de derby. Mais ce ne sont pas des chants lyonnais qui y seront entonnés. En effet, l’AS Saint-Étienne a offert les places vacantes en partie inférieure à des associations caritatives et des clubs partenaires et ouvert à la vente celles en partie supérieure. Les supporters de l’OL sont une nouvelle fois privés du court déplacement jusqu’à Geoffroy-Guichard par les autorités. Et ce ne sont ni les gilets jaunes, ni l’état d’urgence qui ont poussé la préfecture à prononcer cette interdiction, la justifiant par « un antagonisme ancien et très fort(qui) oppose les supporters de ces deux équipes, et qui s’est traduit par des incidents graves lors des dernières rencontres » .

Et celui que tout le monde a encore en tête a eu lieu la saison dernière, quand Nabil Fekir a célébré le cinquième but de son équipe en toisant le kop stéphanois, maillot tendu à bout de bras. Un geste perçu comme une provocation, plongeant le match dans un chaos indescriptible, alors que la démonstration lyonnaise sur le terrain suffisait déjà à ranger ce match dans la catégorie des derbys les plus chauds de l’histoire. Au match aller au Parc OL, l’engagement était encore une fois au rendez-vous (cf. l’agression de Rafael sur M’Vila), la qualité de jeu un peu moins, mais ce sont quand même les Gones qui s’étaient imposés sur un but de Jason Denayer.

Se haïr avec respect

C’est une constante : les Lyon-Saint-Étienne et les Saint-Étienne-Lyon offrent toujours une parenthèse de passion et de tension assez rare en Ligue 1. D’autant plus quand ces équipes sont au coude-à-coude dans la lutte pour le podium – les Verts sont troisièmes avec deux points d’avance sur l’OL. Même les Olympicos ou les Classiques semblent avoir du mal à tenir la comparaison. Ceci dit, il faut tout de même pointer un phénomène : si la rivalité régionale reste vécue intensément par les supporters, est palpable le jour J dans les effectifs et exacerbée le temps de 90 minutes, elle se vit de manière apaisée lorsque les clubs regagnent leurs pénates respectifs. Il n’y a qu’à voir la solidarité affichée entre deux coachs qui se respectent avec une vraie sincérité.

En novembre dernier, Bruno Génésio était (déjà et une fois de plus) sous le feu de la critique. Et c’est Jean-Louis Gasset en personne qui était venu à sa rescousse, pour expliquer combien il était difficile d’entraîner dans un club où on a joué de longues années. « Quand ce sont des entraîneurs cotés qui perdent, ce n’est jamais de leur faute. Quand ce sont des entraîneurs du cru, quand ça gagne, c’est grâce aux joueurs, et quand ça perd, c’est pour lui, affirmait-il en faisant référence à sa propre expérience montpelliéraine. Franchement, je lui tire mon chapeau, à Génésio. Personne n’a relevé qu’il a battu Manchester City ou alors, pas fort. » Deux mois plus tard, dans un mois de janvier compliqué pour Lyon, Bruno Génésio attend encore un signe de sa direction pour une prolongation. Celle-ci dépendra vraisemblablement de la performance lyonnaise dans un match comme celui de Sainté, plus que le huitième de Ligue des champions contre Barcelone. Ne comptez donc pas sur Gasset pour dérouler le tapis rouge à son homologue, ni pour l’enfoncer un peu plus en cas de victoire des Verts ce dimanche.

La fin des bagarres de clochers

Même topo du côté de joueurs de plus en plus issus de l’extérieur : le combat imposé dans le derby se fait plus par respect des traditions que par réel antagonisme. Ces dernières années, Lyon a perdu Lacazette, Gonalons, Tolisso, Grenier ou Ferri. Que des Gones pur jus biberonnés à cette rivalité. Parmi les titulaires actuels, ce genre de match garde une signification particulière uniquement pour Lopes, Aouar et Fekir… Idem côté stéphanois, où seul le capitaine Loïc Perrin doit avoir ce derby chevillé au corps, quand Pierre-Yves Polomat aura bien du mal à aller chercher des noises à un Lyonnais comme il l’avait fait avec Corentin Tolisso. En tribune présidentielle, même Jean-Michel Aulas semble avoir perdu l’envie de faire de l’ASSE sa cible privilégiée, trop occupé à tailler les Marseillais.

Certes, ce match devrait notamment offrir un joli bras de fer entre Wahbi Khazri, en feu actuellement et souvent inspiré contre cet adversaire – décisif à 8 reprises en 8 rencontres de championnat face à l’OL avec 4 buts et 4 passes décisives –, et Nabil Fekir – impliqué dans 5 buts en 7 matchs de L1 contre Sainté avec 2 buts et 3 passes décisives. Mais le combat au sens strict du terme devrait se réduire à une période délimitée par deux bises : une claquée avant le toss, l’autre après le coup de sifflet final. Et dans l’absolu, une baston de 90 minutes à la loyale, c’est tout ce qui nous intéresse.

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