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Roger, l’autre fils Nicollin

Par Corentin Pastoret
Roger, l’autre fils Nicollin

Roger Milla n'est resté que trois ans à Montpellier. Pourtant, son parcours avec la bande à Louis Nicollin reste définitivement lié à l'ascension du club au plus haut niveau.

« Ah Roger Milla, je ne peux pas dire que c’est mon fils parce qu’il est noir, mais c’est un garçon attachant. En plus, tu te rends compte, il a joué jusqu’à quarante ans. C’est un phénomène. » Cette déclaration, du Nicollin dans le texte, traduit une relation quasi filiale entre les deux hommes, une amitié de plus de trente ans. D’ailleurs, lorsque mlactu.fr interroge Louis Nicollin à propos du Camerounais, le patron devient vite nostalgique d’une période révolue, celle du Montpellier Paillade SC au maillot rouge. Une époque qui se trouve à des années-lumière de son titre de champion de France.

Lorsque le Camerounais pose ses valises dans le Sud, le club végète en deuxième division depuis quatre ans. Milla, lui, a de l’expérience et une stature internationale. Le joueur a disputé huit saisons en D1, à Saint-Étienne et Bastia notamment, et reste sur une CAN 86 où il a terminé meilleur joueur et meilleur buteur. Pour s’offrir l’attaquant, Loulou casse la tirelire pour la première fois et lui propose un salaire à la hauteur de ses performances. Symbole des ambitions montpelliéraines, Milla doit permettre à la Paillade d’entrer dans une nouvelle ère. L’objectif : la première division.

Un duo d’enfer avec Laurent Blanc

À trente-quatre ans, le Lion ne peut plus se permettre de perdre de temps, et, dès ses premiers pas dans l’Hérault, la Butte Paillade rugit de plaisir. Sur le front de l’attaque, la recrue star rejoint un pur produit de la formation locale : Laurent Blanc. À l’époque, le Gardois, tout juste vingt et un ans, joue encore milieu offensif. Entre eux, pas de conflit générationnel, au contraire. Les deux hommes enchaînent les buts et développent une complémentarité détonante : la clé de la réussite montpelliéraine. « On se chambrait sur le nombre de buts. Je lui disais :« Je suis peut-être plus vieux que toi, mais c’est moi qui terminerai meilleur buteur de l’histoire du club » » , se souvient le Camerounais lors d’un entretien avec Arnaud Ramsay, auteur d’une biographie de Laurent Blanc. Au terme de la saison, impossible de les départager, dix-huit buts chacun. Louis Nicollin peut sourire. La Paillade vient d’être sacrée championne de D2.

De retour en D1, Milla est plus confiant que jamais : « Franchement, je n’en vois pas beaucoup qui me soient supérieurs. À mon âge, je fais mieux que tous ces petits jeunes ou que des étrangers. Je suis un gagneur, un râleur aussi. » Un tempérament qu’il confirme un certain 9 avril 1988. Ce soir-là, le Camerounais se permet de planter un triplé contre Saint-Étienne, son ancien club. Un match auquel il n’aurait pas dû participer en raison d’un récent retour de la CAN, mais Milla insista pour jouer. Petit nouveau de D1, Montpellier bizute les ogres de l’élite : 4-1 contre le PSG, 6-0 contre Brest, 4-0 face à Marseille, 6-1 aux dépens du Matra Racing. La Paillade finit troisième du championnat avec la meilleure attaque (68 buts). L’inusable Camerounais, quant à lui, termine une nouvelle fois meilleur buteur avec quinze réalisations.

Une histoire sans fin

Fort de ces succès, Louis Nicollin poursuit son recrutement quatre étoiles avec la venue de Carlos Valderrama, mais la mayonnaise ne prend pas. Pour la grande première de Montpellier en Coupe d’Europe, le club s’incline lourdement (0-3, 1-3) face au Benfica. La fête est gâchée. À l’image de son club, Milla perd de son tranchant (sept buts en championnat), mais maintient quelques coups d’éclat : triplé contre Laval, doublé contre le PSG et deux buts face à Nice. Après trois ans dans l’Hérault, Milla s’envole vers l’île de la Réunion et devient un an plus tard une star planétaire.

Le Cameroun vient de réussir l’exploit de se qualifier pour les quarts de finale de la Coupe du monde. Grand artisan de l’épopée des Lions indomptables, Milla n’en oublie pas pour autant Montpellier et l’emblématique Loulou. Au soir d’une victoire contre l’Argentine (1-0), il obtient le maillot de Diego Maradona et l’offrira plus tard à son ami collectionneur. D’ailleurs, les rumeurs vont bon train concernant un retour de Milla à la Mosson. « Si le président Nicollin veut bien, je crois que je peux faire encore quelque chose. Comme je l’ai dit, il me faut un club où ça joue bien, et moi, je ne ferai que finir les actions » , explique-t-il alors à des journalistes. Finalement, le Camerounais reviendra souvent à Montpellier, pas comme joueur, mais en ami du président. Trente ans après ses débuts sous le maillot rouge, il reste très attaché à la Paillade. En 2012, il confie au site internet du club : « Je fais toujours partie de l’ensemble de Montpellier. C’est le club de ma vie. Vous savez, j’ai joué dans cinq clubs en France et c’est le club où je me suis senti le plus à l’aise. » Preuve que l’image de Roger Milla est toujours liée au club montpelliérain : en 2010, sur le plateau du Canal Football Club, Samuel Eto’o déclare vouloir terminer sa carrière à Montpellier « pour faire plaisir à Roger » . Tout est dit.

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