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Rennes est-il en train de faire n’importe quoi ?

Par Clément Gavard
Rennes est-il en train de faire n’importe quoi ?

À quinze jours de la clôture du mercato estival, le Stade rennais n'est pas prêt. De passage au Roazhon Park pour la première fois de la saison à l'occasion de la réception du PSG dimanche soir, Julien Stéphan va devoir composer avec un groupe affaibli par le mercato et quelques pépins physiques. La conséquence des nombreux départs de l'été et d'un recrutement qui peine à se dessiner. Une stratégie dangereuse mais compréhensible, dont la réussite pourrait dépendre de la prochaine quinzaine.

La route de Lorient va enfin retrouver sa routine footballistique. Avec la réception du Paris Saint-Germain, dimanche soir, pour le premier match de la saison à domicile, les supporters rennais vont pouvoir partager leurs inquiétudes autour d’une galette-saucisse et d’une bière, et se poser une question redondante depuis le début de l’été sur les bords de la Vilaine : mais bordel, à quoi joue le Stade rennais ? L’euphorie de l’aventure européenne et de la victoire en finale de la Coupe de France est déjà retombée pour laisser la place au stress, à la panique, voire à l’incompréhension chez les amoureux du SRFC face au chantier du mercato estival. Personne ne s’attendait à autant de bouleversements. Non, le sacre du 27 avril devait être un point de départ plus qu’une fin en soi, le déclic permettant à Rennes de se rapprocher de la cour des grands.

François Pinault, le propriétaire du club depuis deux décennies, n’avait pas dit autre chose à Ouest-France après le titre : « Le Stade rennais doit changer de catégorie. S’installer de manière permanente dans les quatre-cinq premiers du championnat. Ce qui n’est pas un mince défi. Nous allons à nouveau jouer la Coupe d’Europe et nous aurons, je l’espère, une nouvelle belle aventure. » Un discours vague mais ambitieux, laissant de la place pour de nouveaux rêves chez les supporters rennais, comblés par le trophée tant attendu, mais désireux de voir Rennes surfer sur la vague de la gagne pour entrer dans une nouvelle ère. Pour réussir leur pari, les dirigeants rennais auraient pu miser sur la stabilité – l’approche la moins risquée -, mais ils ont préféré opter pour une toute autre stratégie. Résultat : à deux semaines de la fermeture des portes du mercato, l’inquiétude a pris le dessus sur l’enthousiasme dans la capitale bretonne.

La fuite des cadres

Il faut revoir le onze de départ de la finale de Coupe de France, moins de quatre mois plus tôt, pour constater la saignée d’envergure au sein de l’effectif rennais. Parmi les titulaires lors de cette soirée historique, ils sont six à avoir plié bagage cet été. Hatem Ben Arfa avait montré la voie à ses petits copains dès le mois de mai en remettant en question le jeu proposé par Julien Stéphan, histoire de faire comprendre à tout le monde qu’il n’avait pas l’intention de rempiler pour une deuxième année. La suite ? Un long flottement autour de la prolongation du technicien rennais – agacé par les propos de HBA et déçu par le manque de soutien de la part de sa direction -, et une ribambelle de départs. Edson Mexer a filé libre à Bordeaux, Benjamin André a choisi Lille, Mehdi Zeffane a quitté le club à la fin de son contrat, Tomáš Koubek a été poussé vers la sortie (Augsbourg), Ismaïla Sarr est parti à Watford et Ramy Bensebaini a finalement opté pour un transfert au Borussia Mönchengladbach. Un exode massif.

Les dirigeants ont-ils subi ces multiples départs ? Pas sûr, Olivier Létang n’ayant jamais déclaré un joueur comme intransférable, comme pour faire comprendre aux clubs intéressés que des négociations étaient possibles. Puis, si la vague départs est impressionnante, chacun d’eux trouve une certaine logique. Ben Arfa n’était pas conditionné pour faire de vieux os en Bretagne, Mexer et André avaient besoin d’un nouveau défi après cinq années passées à Rennes, Koubek ne faisait plus l’unanimité au club, alors que Sarr et Bensebaini disposaient d’une belle valeur marchande. Problème : les suiveurs du SRFC ne s’attendaient pas à voir autant de tauliers talentueux et charismatiques quitter le navire, alors que la gestion difficile des prolongations de contrat depuis deux ans a pu mettre la club en position de faiblesse. En tout, une petite vingtaine de joueurs (jeunes et prêts compris) ont quitté le club pour réduire l’effectif actuel à trente-deux joueurs professionnels, dont sept néo-pros. Une opération dégraissage compréhensible (la masse salariale a largement été réduite), mais dangereuse puisqu’elle a peut-être pu donner des envies d’ailleurs à des Grenier ou Bourigeaud, qui ne devraient finalement pas bouger. Ce qui ne change rien au fameux constat inquiétant : au 18 août, Rennes a bien l’air de s’être affaibli.

Le compte à rebours est lancé

Car au rayon des arrivées, le mercato a pour l’instant été beaucoup plus calme. Deux grosses opérations (Niang définitivement transféré pour 15 millions et Tait pour 9 millions), deux belles pioches chez les gardiens (Mendy et Salin) et un joueur de complément expérimenté (Morel). De quoi faire de la place à la nouvelle pépite rennaise, Eduardo Camavinga, prolongé jusqu’en 2022 cette semaine, ainsi qu’aux autres jeunes prometteurs du centre de formation (Boey, Nyamsi, Gboho, Da Cunha, Trouillet…). Mais Stéphan en est conscient, son groupe a besoin de plusieurs retouches pour être compétitif sur une saison à quarante-cinq matchs minimum. « C’est nécessaire de se renforcer dans tous les secteurs de jeu, dans toutes les lignes, avait-il indiqué à la veille du Trophée des champions, avant même les départs de Sarr et Bensebaini. On a besoin d’avoir des joueurs d’expérience, des joueurs qui apportent de la maturité et aussi de la personnalité à cet effectif, qui est certainement trop jeune aujourd’hui. » Et si, comme souvent ces dernières années, le club bretillien attendait les dernières longueurs du mercato pour s’activer ?

Si Létang disait récemment « travailler sereinement » et faire « selon les opportunités » , Stéphan a affirmé être « convaincu » que le boulot de la cellule de recrutement – dont le fonctionnement est très flou – allait aboutir avant la réception du PSG. Depuis plusieurs semaines, les rumeurs plus ou moins sérieuses se multiplient (Koscielny, Nzonzi, Raphina, Claude-Maurice, Vida, Gonalons…) sans qu’aucune n’ait pour l’instant abouti. La conséquence d’une radinerie ou d’une véritable prudence ? Le père Pinault avait certifié ne pas vouloir entrer « dans ce cirque fou des grands clubs européens » , tout en assurant vouloir continuer à investir. Létang avait lui donné un autre élément de réponse au printemps sur le plateau de Téléfoot : « Pour l’année prochaine, il y a des règles à respecter comme le fair-play financier et la DNCG. Vous ne pouvez pas dépenser l’argent que vous ne générez pas. Donc on ne peut pas faire n’importe quoi. » Un discours sensé qui aurait probablement dû être celui de l’OM ces dernières années. Mais avec la vente record de Sarr (estimée à 38 millions d’euros), Rennes devrait avoir les moyens de passer à l’action pour enregistrer trois recrues – le minimum nécessaire – afin de donner un sens à sa stratégie contestée. Et permettre aux supporters de se trouver de nouveaux héros.

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