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Rayan Cherki, le talent c’est maintenant

Par Clément Gavard
Rayan Cherki, le talent c’est maintenant

Pour sa troisième titularisation chez les professionnels, Rayan Cherki a sorti le grand jeu, samedi soir, lors du succès de l'OL contre Nantes (4-3) en seizièmes de finale de la Coupe de France. Étincelant et épatant dans le jeu, le gamin de 16 ans s'est illustré avec un doublé et deux passes décisives. Et il a surtout envoyé un message aux dirigeants lyonnais : la meilleure recrue du mercato de janvier, c'est lui.

Les habitués du stade Marcel-Saupin connaissaient déjà le phénomène : le 18 mai dernier, Rayan Cherki avait marqué les esprits en inscrivant un but dantesque, au bout d’un numéro de soliste, lors d’une défaite de l’OL contre Nantes (1-3) en quarts de finale du championnat U17. Huit mois plus tard, jour pour jour, la pépite rhodanienne a réalisé son premier chef-d’œuvre chez les professionnels, toujours dans la cité des Ducs de Bretagne, dans un seizième de finale de Coupe de France remporté par Lyon (4-3). Chaque histoire a besoin d’un point de départ, et celle de Cherki a probablement connu le sien dans la soirée de samedi. Sur le chemin du retour de la Beaujoire, à quelques kilomètres de Saupin, ou même directement dans les gradins, les quelque 24 000 spectateurs présents ont certainement compris qu’ils avaient assisté à l’éclosion d’un gamin spécial. Un talent pur.

Pour sa huitième apparition chez les pros, et sa deuxième titularisation contre un club de Ligue 1, Cherki n’a pas attendu très longtemps pour commencer son récital. Après 54 secondes de jeu, il a ouvert le score d’un joli enchaînement pied droit-pied gauche, avant de s’offrir un doublé d’un plat du pied tranchant huit minutes plus tard. Quoi d’autre ? Il a délivré deux vraies passes décisives, d’une justesse folle dans la profondeur, pour Martin Terrier et Moussa Dembélé, mais aussi provoqué un penalty, manqué par le second. Une prestation de très haut vol pour un joueur de 16 ans et 154 jours, qui a presque joué comme un vétéran face aux Canaris, au point d’enfiler le costume de médiateur dans les dernières minutes tendues de la rencontre. « Cette maturité à 16 ans ? Je l’ai acquise grâce à eux, grâce à mes coéquipiers qui m’ont beaucoup aidé, et aujourd’hui c’est grâce à eux que j’en suis là » , posait Cherki au micro d’Eurosport, quelques secondes après le coup de sifflet final. Un discours déjà bien rodé, porté sur le collectif plus que sur sa performance, et un casse-tête pour les décideurs lyonnais : pourquoi lâcher des dizaines de millions cet hiver quand la meilleure recrue pour la deuxième partie de saison se trouve juste sous leur nez ?

Garcia et le costume de CPE

Cette fois, le talent du Gone ne sera plus jamais confidentiel. Les éloges ne viendront plus seulement du microcosme lyonnais, mais d’un peu partout en France, voire en Europe. Une question d’époque. À Nantes, Cherki s’est imposé comme une promesse. Au-delà des chiffres, le milieu offensif formé à l’OL a été épatant dans le jeu : des choix quasiment toujours justes, une facilité technique déconcertante, de l’insouciance, un sens du déplacement et une intelligence de jeu redoutable. Une copie bluffante, qui n’a pas surpris son coéquipier Martin Terrier : « C’est un phénomène. Beaucoup de gens misent sur lui. Je ne veux pas m’avancer trop vite, car on a connu des futurs grands qui n’ont ensuite pas fait la carrière qu’on leur prédisait. Mais, moi, je mets une pièce sur lui quand même. Il a une maturité extraordinaire pour son âge. » En revanche, il ne fallait pas compter sur Rudi Garcia pour participer à l’enflammade générale, le technicien lyonnais s’étant contenté de féliciter la performance du nouveau prodige, tout en sortant l’extincteur. « On sait que c’est un garçon qui a les capacités pour être décisif. Bien sûr que ça m’a plu, a-t-il répondu en conférence de presse. Mais mon rôle, c’est aussi d’abaisser les niveaux parce que tout le monde va le porter aux nues, et ça va être un grand danger s’il ne m’écoute plus, ne travaille plus et pense qu’il est arrivé. » Le coach lyonnais est dans son rôle, mais il ne devra pas se tromper dans les prochaines semaines : un talent de ce calibre n’aura bientôt plus sa place sur le banc, surtout s’il veut poursuivre sa progression.

Rayan Cherki attend une chose, encore plus depuis les blessures de Memphis Depay et Jeff Reine-Adélaïde : jouer et prouver qu’il est capable de se mettre au niveau dans la cour des grands. La semaine dernière, L’Équipe raconte que le Lyonnais avait été agacé d’être resté sur le banc à Bordeaux, au point de demander l’autorisation à Garcia d’aller se dégourdir les jambes avec les jeunes de son âge en 32es de finale de Gambardella contre Bourg-en-Bresse. Résultat ? Il a joué une heure pour « l’une de ses plus mauvaises sorties sous le maillot lyonnais » , d’après le quotidien, qui ajoute qu’il est ensuite resté très attentif au mercato de l’OL, et à ces arrivées annoncées dans son secteur de jeu. Ces derniers jours, France Football a évoqué un accord entre Lyon et Villarreal autour d’une indemnité de 20 millions d’euros pour Karl Toko-Ekambi, quand d’autres médias font en plus état du fort intérêt des Gones pour l’attaquant havrais Tino Kadewere. Et Cherki, dans tout ça ?

L’ère Rayan

Personne ne sait encore comment va se terminer le mercato lyonnais, mais tout le monde peut légitimement se poser une question : un embouteillage dans le secteur offensif ne serait-il pas un frein à la progression de Cherki ? Après avoir disputé près de 150 minutes toutes compétitions confondues lors de la première partie de saison, le gamin de 16 ans a gagné le droit de passer à la vitesse supérieure. Pourquoi attendre ? Pourquoi le surprotéger ? Surtout à une époque où les véritables talents (Kylian Mbappé, Eduardo Camavinga, Erling Braut Håland, Mason Greenwood, pour ne citer qu’eux) connaissent déjà les codes du haut niveau, et sont programmés pour battre des records de précocité. Samedi soir, Cherki a fait comprendre à son entraîneur qu’il avait peut-être autant sa place dans le onze lyonnais que Bertrand Traoré, Martin Terrier ou Maxwel Cornet. Adoubé par Kylian Mbappé, de cinq ans son aîné, sur les réseaux sociaux, mais surtout par Christian Gourcuff, qui a découvert « un très bon joueur de foot » , et tous ses coéquipiers, Cherki est prêt. Et son ambition, en adéquation avec son caractère de champion, est déjà immense. « Je veux avoir les records et entrer dans l’histoire du club pour que personne ne puisse me détrôner derrière, confiait-il avec assurance à OLTV la semaine dernière. Je bosse tous les jours plus que les autres pour atteindre mes objectifs. Je suis un peu couvé par tout le monde, et ma famille me fait garder la tête sur les épaules. C’est le plus important pour moi. » Tous les signaux sont au vert, l’OL est prévenu : la belle histoire peut enfin commencer.

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