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Quel avenir pour les ultras parisiens ?

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Quel avenir pour les ultras parisiens ?

Ce dimanche, certains anciens abonnés d'Auteuil et de Boulogne vont profiter du match du PSG contre Brest et des caméras de Canal + pour manifester en faveur du retour des abonnements fixes en virage.

Cet été, on a parlé partout des Qataris, des Qatariens, de Leonardo, de l’avenir de Kombouaré, de Pastore et des 87 millions d’euros dépensés par le PSG durant le mercato. On en a un peu oublié les tribunes et le plan Leproux qui avait imposé l’an dernier un placement aléatoire dans les virages du Parc et une participation au déplacement organisé depuis Paris par le club pour accéder, à l’extérieur, au parcage visiteur. Si le principe du placement aléatoire au Parc est maintenu, le PSG a assoupli cette année les conditions d’accès aux parcages. Comment réagissent les ultras parisiens qui, la saison passée, boycottaient massivement le Parc ? Début de réponse ce dimanche contre Brest au Parc, où certains anciens abonnés feront entendre leurs revendications et porteront la voix des supporters “historiques” du PSG.

“Nouveau public” vs “supporters historiques”

Paris SG-Valenciennes, 3e journée de championnat, 0-0 au bout de 20 minutes de jeu, d’improbables « Mouillez le maillot ! » s’élèvent des tribunes du Parc des Princes. Les banderoles « “Fiers de nos couleurs” et “Paris Saint Germain Football Club”, installées par le club dans le virage Auteuil et la tribune Boulogne, masquent mal l’absence d’une grande partie des supporters historiques du PSG. « Aujourd’hui, au Parc des Princes, il y a un public de consommateurs qui veut en avoir pour son argent. Entendre des sifflets quand Menez sort contre Valenciennes alors qu’il a fait une passe décisive, c’est quelque chose qu’on trouve inadmissible » , observe Jérémy, responsable du collectif Liberté Pour les Abonnés (LPA), qui regroupe d’anciens abonnés d’Auteuil comme de Boulogne. Une opinion partagée par un ancien de Boulogne, qui déplore : « 80% des chants aujourd’hui au Parc – quand ça chante – sont des insultes ou des sifflets. C’est grotesque, voire risible, tant les chants ne dépendent que de la tournure du match, ce qui n’était pas le cas avant. »

Pour se démarquer de ce nouveau public, que certains supporters historiques qualifient d’ « opportuniste » , d’anciens abonnés d’Auteuil et de Boulogne, à l’appel de LPA, mais aussi de deux anciennes entités des Supras Auteuil, la K-Soce Team et les Microbes, ont prévu de se regrouper en latérale, tribune H. D’autres anciens du Kop of Boulogne (KOB) se retrouveront en face, tribune E. Une présence que les supporters paient cher. Pour cette rencontre, le PSG a d’abord annoncé des prix, en tribune H, de 32€ en haut et de 40€ en bas et au milieu. Le lendemain du communiqué de LPA, appelant à une action contestataire en tribune latérale, les places sont subitement retirées des points de vente. 24 heures chrono plus tard, elles reviennent avec une légère augmentation, faisant de ce choc PSG-Brest un véritable match de gala : 40€ en haut et 55€ au milieu et en bas de la tribune H. A des tarifs différents, les prix de la tribune E augmentent dans les mêmes proportions. Une étrange coïncidence que le PSG, malgré nos demandes répétées, n’a curieusement pas souhaité commenter. En dépit d’une telle inflation en période de crise, LPA, K-Soce Team, Microbes, Karsud, ex-Lutece Falco, Brigade Paris, membres du KOB, garniront les tribunes latérales du Parc ce dimanche. « En termes de soutien et de ferveur, les gens verront la différence avec le public actuel » , assure Viola, leader des ex-Lutèce Falco. En revanche, les associations dissoutes d’Auteuil (Supras, Authentiks et Grinta) craignant qu’un retour, même à quelques personnes, puisse être interprété comme une reconstitution de leur ancienne entité – ce qui est sévèrement puni par la loi –, ne seront pas au Parc.

Pour le retour des abonnements fixes

La présence des ultras ne passera pas inaperçue, puisqu’ils seront dans le champ des caméras de Canal+, qui retransmet le match en direct. Au programme, une alternance de chants de soutien au PSG et de rengaines contestataires. Car une revendication majeure demeure pour ces anciens acteurs des virages, la fin des abonnements aléatoires : « Ce qu’on va montrer avec notre présence, c’est que poursuivre l’aléatoire en virage, ça ne sert à rien, puisque si on veut se réunir, il suffit de prendre des places en latérale. Le plan Leproux est, pour une partie, une mesure de discrimination par le pouvoir d’achat. Si tu vas en tribune populaire au Parc, c’est-à-dire dans les virages, t’as pas le droit de te réunir avec quinze de tes potes et t’es placé de façon aléatoire. Par contre, si t’as du fric, tu vas en tribune Paris ou en présidentielle et là tu peux te réunir à autant que tu veux » , analyse Jérémy de LPA. « On veut montrer qu’on a aussi notre place dans ce stade, en réclamant le retour d’abonnements fixes, mais aussi en faisant valoir notre contestation contre les personnes nuisibles au club » , ajoute Ben, de la Brigade Paris, qui occupait le quart de virage K à côté de Boulogne.

Les mêmes noms reviennent dans la bouche des supporters : Jean-Philippe D’Hallivillée, responsable du département supporters, Bruno Skropeta, directeur de la communication, Philippe Boindrieux, directeur général, tous trois accusés d’être les hommes de l’ombre du plan Leproux. D’être les vrais responsables de l’éviction des supporters historiques. Après une saison passée hors du Parc des Princes, certains veulent revenir, mais à quelles conditions ? D’autres entendent poursuivre le boycott, mais avec quel impact ? Que comptent faire les différents groupes de supporters de Paris et quelle marge de manœuvre leur laissera le PSG ?

Parcage ou contre-parcage ?

Toulouse-PSG, 4e journée de championnat. La belle victoire des Parisiens sur le terrain a occulté la situation surprenante des supporters visiteurs. D’un côté, le parcage officiel, géré par le PSG mais auquel il est désormais possible d’accéder en présentant simplement une carte d’identité, comprenant plus d’une centaine de personnes massées derrière une bâche “1991, Virage Auteuil, 20 ans” à l’initiative de la K-Soce Team (KST). Et plus haut sur la droite un “contre-parcage” rassemblant des supporters refusant le secteur géré par le PSG, avec des chants plus contestataires à l’égard de la direction du club et une banderole explicite : “Rendez-nous nos abonnements”. Un choix d’emplacement qui traduit la position des différents groupes de supporters à l’égard du club. « Nous, on est clairement dans une optique de retour au stade. On a déjà fait 50% du boulot en récupérant les déplacements. Aujourd’hui, on est un groupe de plus d’une centaine de personnes à l’extérieur. Au fur à mesure, ça va revenir, on essaie de fédérer autour d’une seule cause : le PSG ! » , explique Youssef, porte-parole de la KST, groupe moteur des déplacements en parcage.

Créée en 2006, la K-Soce Team était à l’origine un délire de potes à l’intérieur des Supras Auteuil. Depuis, la section s’est détachée des ex-Supras. Aujourd’hui en parcage, la K-Soce Team cohabite avec les Karsud d’Auteuil et des anciens de Boulogne. Situation impensable il y a deux ans au moment du conflit Auteuil-Boulogne dans lequel la KST était directement impliquée. Aujourd’hui, la KST met en avant le PSG, s’efforce de fédérer autour d’elle et se déclare prête à aplanir ses différends avec Boulogne quitte à se couper d’une partie de ses anciens amis d’Auteuil. L’occupation du parcage visiteur est aussi le chemin emprunté par la Brigade Paris depuis l’assouplissement des conditions d’accès. « Le chemin du Parc passe de toute façon par les déplacements » , assure Ben, de la Brigade Paris. Car ceux qui ont accepté les déplacements, revendiquent toujours le retour d’abonnements fixes en virage du Parc des Princes.

Le collectif LPA, en contre-parcage à Toulouse « pour montrer qu’il y avait encore une mobilisation parisienne » , envisage de rejoindre le parcage dès le prochain déplacement à Annecy, où le PSG affrontera le club haut-savoyard minéralisé : « Nous avons débattu au sein de l’association sur la question de savoir où nous devions aller. On reconnaît les efforts de la direction vis-à-vis des parcages mais on reste quand même méfiants. A partir du prochain déplacement, nous irons en parcage en espérant que la direction ouvre des discussions » , confie Jérémy. Proche de la ligne de LPA la saison dernière, les ex-Lutèce Falco poursuivent quant à eux le boycott et quelques actions ponctuelles au Parc des Princes. « A l’extérieur, en revanche, on est en phase de réflexion. On va plutôt essayer de faire des contre-parcages. Ce n’est pas une opposition avec ceux qui vont dans le parcage, c’est plutôt une volonté de notre part de ne pas passer par le club, indique Viola, leur leader. C’est vrai qu’on peut être amenés à évoluer suivant les circonstances, mais on ne va pas revenir comme s’il ne s’était rien passé. On n’oublie pas qu’on a été virés comme des malpropres » .

Anciens Supras et Authentiks sur la touche

Côté Boulogne, la ligne générale n’est pas si différente des voisins d’en face. « On continue le boycott au Parc mais le mot d’ordre n’est pas tout à fait le même que l’année dernière puisqu’on a retrouvé les déplacements. Et sur les déplacements, on n’impose pas le parcage ou le contre-parcage, chacun assume son choix » , déclare un autre ancien de Boulogne. « Après, certains de la tribune ont arrêté et sont passés à autre chose. On sait bien qu’on ne retrouvera jamais le KOB tel qu’on l’a connu » . Là encore, le constat de Boulogne se retrouve à Auteuil. « Une partie de nos membres, ceux qui étaient les plus impliqués, qui ont le plus donné, sont aussi ceux qui, aujourd’hui, sont écœurés et ne remettront plus jamais les pieds au stade, peu importe ce qui se passe » explique Hooman, ex-responsable des Authentiks, anciens pensionnaires de la tribune G. Les associations dissoutes en avril 2010 sont dans une position délicate. A l’égard des pouvoirs publics d’abord, qui peuvent les accuser de tentative de reconstitution de groupe dissous s’ils se rassemblent au stade. Envers les dirigeants du club ensuite, Supras et Authentiks n’oubliant ni l’intransigeance à leur égard d’un PSG qu’ils ont tant aimé, ni l’effacement en catimini des fresques dans les coursives de leur ancien virage, ni l’envoi à la benne du matériel de leurs anciens locaux. « On a une position commune qui est pour l’instant de ne pas retourner au stade. Tout simplement parce qu’il n’y a plus de plaisir. Ce qu’on aimait, c’était organiser des animations, partager des moments dans le bus. Ça n’est plus possible actuellement. Retourner au stade, ce serait pour être spectateur plutôt qu’ultra, et ça nous intéresse pas » , explique Christophe des ex-Supras Auteuil. « Et puis revenir pour faire quoi ? Si on n’a pas de local, pas de matos… Si c’est juste pour crédibiliser la démarche du club et ramener un semblant d’ambiance, parce que les mecs croient que c’est en claquant des doigts ou en ramenant ta fraise que l’ambiance revient au stade. Ça s’organise, ça se travaille, ça ne se fait pas comme ça… » .

Le PSG entre fermeté et incertitudes

La ligne des autorités à propos de la sécurité au Parc reste inflexible : « On est satisfaits que le plan Leproux soit poursuivi au Parc des Princes dans la mesure où ça a ramené le calme autour du stade. On n’assiste plus à des batailles rangées, c’est enfin le sport qui parle » , déclare Jean-Louis Fiamenghi, ancien patron du RAID et aujourd’hui directeur de cabinet du préfet de police de Paris. Au PSG, les dirigeants joints par So Foot restent plus discrets. Ils se félicitent de la hausse des abonnés, qui devraient être cette saison entre 16 000 et 20 000. Mais personne ne se permet de parler officiellement au nom du club puisqu’un conseil d’administration de réorganisation doit se tenir bientôt. L’assouplissement de l’accès en parcage ne serait pas tant un acquis des supporters ayant multiplié l’an dernier les contre-parcages qu’une volonté de simplifier l’accès au stade des fans parisiens éparpillés dans l’Hexagone et de faciliter l’organisation du match au club hôte.

Du côté des supporters, certains espèrent qu’une fois l’organigramme du club stabilisé, les discussions avec les différentes entités du Parc pourront reprendre. D’autres, comme Christophe des ex-Supras, sont plus dubitatifs : « Je ne suis pas sûr que le PSG ait envie de se faire chier à nouveau avec des ultras qui vont sortir des messages parce que le prix des billets ou des abonnements augmente. Et puis, c’est bizarre mais je dirais qu’aujourd’hui, ceux qui se tiennent loin du stade sont peut-être ceux qui avaient le plus de respect pour le Parc et le club. Ces gens-là, qui ont peut-être été les plus raisonnables, mais qui étaient forcément les plus visibles à l’époque, qui étaient aussi les moins vicelards, en tenant leur ligne de conduite, se retrouvent aujourd’hui écartés du stade. Je dirais que c’est un peu la même chose au PSG, les dirigeants qui ont le plus louvoyé sont toujours là » .

En creux, ce témoignage livre toutes les incertitudes qui existent à ce jour tant dans les relations que le PSG renouera, ou pas, avec les ultras des virages que dans les rapports entre les différentes factions de supporters. Si beaucoup de fans s’efforcent de prôner le consensus et de cohabiter, certaines lignes de fracture datant du conflit Boulogne-Auteuil ou des premiers mois du plan Leproux sont toujours bien présentes. Sur le terrain, comme en tribunes, le PSG n’a pas fini de nous surprendre…

Anthony Cerveaux, avec Quentin Blandin

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