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Quand Ribéry devait rejoindre le Real Madrid

Par Côme Tessier
Quand Ribéry devait rejoindre le Real Madrid

Lors des étés 2009 et 2010, le feuilleton Ribéry a autant occupé les esprits que les fantasmes. Si le transfert au Real Madrid semblait logique pour le joueur, il montre que le Bayern a aussi su façonner son Kaiser pour l'intégrer dans l'esprit du club.

« Avant minuit, Ribéry signe ? » Le 31 août 2009, L’Équipe titre de manière explicite un article de dernier jour de mercato… si on oublie le point d’interrogation. Rayonnant au Bayern Munich, Ribéry est annoncé depuis plusieurs semaines comme l’un des transferts les plus ardemment souhaités par Florentino Pérez pour son retour aux manettes du Real. Tout est en place pour que Francky fasse un choix logique et linéaire par rapport à son projet de carrière. La question de L’Équipe n’en est pas une. Elle est un souhait. Il faut que Ribéry soit libéré et rejoigne la Maison-Blanche, pour affirmer sa stature de vedette du football français et de chef de fil de l’équipe de France post-2006, orpheline de Zidane. Mais à Munich, Ribéry a trouvé plus fort que lui. Le club va le retenir et le transformer en un nouveau joueur : un joueur de club.

Francky l’instable

Pour comprendre comment le transfert à Madrid semblait alors inéluctable, il faut revoir le parcours du joueur jusqu’alors. À l’été 2004, Franck Ribéry surgit en L1 avec le FC Metz, où il vient de signer en provenance de Brest. L’étape ne dure que six mois. Impressionnant, Ribéry abandonne aussi vite le championnat qui vient de l’accueillir sans sourciller. Dans les dernières heures du mercato hivernal, direction Istanbul et le club de Galatasaray, pour une transition de… six mois. À nouveau. Sur fond de salaires impayés, Ribéry déménage encore pour rejoindre Marseille. Avant de partir au bout de deux saisons vers Munich, un court laps de temps qui permet à Ribéry de rejoindre les Bleus et d’exploser aux yeux du grand public un soir de France-Espagne. La trajectoire rapide montre l’instabilité du Boulonnais, plus à même de partir vite pour assouvir son ambition. À 24 ans, il n’a plus le temps d’attendre. Et même le Bayern Munich ne semble être qu’une étape supplémentaire avant de rejoindre un club qui puisse offrir une plus grande renommée et une meilleure couverture médiatique. À l’époque, le Bayern n’est pas si sexy, parfois pris dans des bisbilles internes – comme avec le passage Klinsmann – et fébrile sur la scène européenne.

Zizou l’entremetteur

C’est alors que le projet de Florentino Pérez surgit à point nommé. Revenu à la tête du Real, l’homme d’affaires s’appuie sur son nouveau conseiller, Zidane, pour choisir sa proie selon des propos accordés à RMC : « Ribéry ? C’est le meilleur joueur français, et Zinédine m’a dit que c’est un très bon joueur. Il sera parfait dans la culture du Real. » Au début de l’été 2009, Ribéry n’est pas insensible à l’idée et s’en explique dans Bild : « J’aimerais vraiment beaucoup pouvoir gagner la Ligue des champions, mais notre équipe n’a pas encore pour l’instant le calibre pour. Actuellement, nous ne pouvons pas rivaliser avec Barcelone, le Real Madrid, Arsenal et l’Inter. » Dans le même temps, Madrid veut se débarrasser de ses Hollandais (Sneijder, Van der Vaart et Robben). Et Louis van Gaal vient d’être nommé à Munich sans grand amour pour Ribéry. Les astres sont alignés. Tout se goupille comme prévu. Le transfert est certain. Pourtant, dans les faits, l’affaire capote à plusieurs reprises. La faute à des dirigeants munichois qui retiennent et transforment la destinée Ribéry.

Le discours de Karl-Heinz et Uli

Le joueur lui-même n’hésite pas à faire pression et à employer le ton du « Real sinon rien » . En décembre 2009, dans Marca, son agent Alain Migliaccio sous-entend même que le transfert n’est qu’une question de temps, car « Ribéry ne renouvellera pas avec le Bayern » . Uli Hoeneß admet d’ailleurs que la fin de contrat en 2011 est un risque réel, avec une nuance subtile : « C’est seulement si nous voyons qu’on n’a aucune chance [de faire prolonger Ribéry] qu’on entamera des discussions avec d’autres clubs. » Le Bayern compte en fait sur la puissance du board et son savoir-faire dans la gestion des joueurs. « J’étais tiraillé, cela m’avait rendu fou » , admet Ribéry dans Sport Bild en 2014. C’est une discussion entre six yeux, avec Hoeneß et Rummenigge, qui parvient à calmer les choses et rendre raison à Ribéry. « Ce sont des hommes de classe. Ils savent conduire une affaire. Et ils savent comment parler aux gens. Ils sont restés fermes, parce qu’ils avaient besoin de moi. » Et Franck Ribéry, sûrement, besoin d’eux pour comprendre le joueur qu’il pouvait être. Pour devenir un vrai gars du Bayern, apprécié et indispensable. Même avec le temps qui passe. Même avec les affaires et les embrouilles chez les Bleus. Pour devenir réellement le Kaiser de l’Allianz Arena et celui qui ne bougera plus.

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