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Quand Antoine et Wissam allaient danser à Paris

Par Matthieu Pécot
Quand Antoine et Wissam allaient danser à Paris

Dans la nuit du 13 au 14 octobre 2012, Antoine Griezmann, Wissam Ben Yedder et trois coéquipiers de l’équipe de France U21 décident de quitter leur hôtel situé au Havre pour monter dans un taxi et aller danser à Paris. Trois jours plus tard, les Bleuets s’écroulent en Norvège (5-3) et disent adieu à l’Euro 2013. Depuis, Grizou et WBY ont naturellement payé leur dette. Et, plus de cinq ans plus tard, s’apprêtent à rejouer au foot ensemble sous le maillot tricolore. Enfin.

Automne 2012. La jeunesse de France sait s’amuser et quand elle décide d’aller danser, elle le fait en profitant d’une offre musicale prolifique. Si Carly Rae Jepsen, Rihanna et Michel Teló se sont cassé la tête et les cordes vocales à sortir Call Me Maybe, Diamonds et Ai Se Eu Te Pego (l’accordéon, quel instrument !) , c’est qu’il y a une raison. Alors au lendemain d’une victoire glanée au stade Océane face à la Norvège (1-0, but de Varane) en barrage aller de l’Euro 2013, Antoine Griezmann, Wissam Ben Yedder, Yann M’Vila, M’Baye Niang et Chris Mavinga décident d’aller célébrer la vie. Samedi soir ou pas, la ville du Havre ne dispose pas d’établissements nocturnes qui répondent aux attentes du quintet. La suite se passe loin de l’hôtel Mercure de la sous-préfecture de Seine-Maritime et à bord d’un taxi commandé par un ami de M’Vila.

L’alternative Deauville

Parce qu’il connaît les environs et qu’il devine le bourbier que peut devenir cette escapade, le chauffeur du Mercedes Viano noir aux vitres teintées soumet une alternative à ses passagers : « Je leur ai proposé d’aller à Deauville, parce que c’est plus près et que c’est chic aussi, mais ils voulaient aller à Paris : certains avaient une soirée à laquelle ils étaient invités. » Deauville attendra. Sur la route, les jeunes hommes décident de se désaltérer. Le pilote se rappelle : « Ils ont un peu bu, mais modérément. C’est moi qui suis descendu chercher deux-trois bouteilles de bière parce qu’ils ne voulaient pas qu’on les voie. Une fois à Paris, ils m’ont proposé d’aller en boîte avec eux, mais ça ne m’intéressait pas. »

La suite ressemble certainement à cela : le diable au corps, les cinq copains s’agitent comme des mabouls sur Gangnam Style, trinquent et, une fois leur verre de Schweppes agrumes descendu, retrouvent le conducteur havrais. « Je suis resté les attendre dans la voiture. Ils ont fait la soirée, et une heure et demie plus tard, on était partis. Au retour, Mavinga et M’Vila dormaient, les autres parlaient au téléphone ou prenaient en photo ceux qui dormaient. Ils me disaient aussi: « Chauffeur, chauffeur, on est pressés ! » Du coup, on a fait le retour Paris-Le Havre en une heure trente, alors que c’est deux heures normalement. »

Drame à Drammen

Le plan était bien ficelé, mais le récit de cette épopée atterrit rapidement dans les oreilles du staff des Bleuets. À deux jours d’un match décisif à jouer en Norvège, Erick Mombaerts s’interroge : faut-il punir les aventuriers ? Et comment les punir ? Peut-on se passer de ces cinq joueurs à quelques heures d’une rencontre directement qualificative pour l’Euro ? Les réponses se lisent sur cette feuille de match scandinave. Ce 16 octobre, au Marienlyst Stadion de Drammen, Mavinga et M’Vila sont bien dans le onze de départ. Griezmann ? Sur le banc, comme à l’aller. Niang ? Banquette. Ben Yedder ? Bien que titulaire quatre jours plus tôt, le Toulousain se trouve en tribunes.

Une raclée plus tard (5-3, réduction du score de Lacazette puis de Griezmann aux 84e et 87e), il est l’heure de passer à la caisse. Les noceurs sont tous sanctionnés : M’Vila est privé de sélection jusqu’en juillet 2014, dit adieu à la Coupe du monde 2014 et un peu aussi à sa carrière. Les quatre autres n’ont pas le droit de porter le maillot tricolore jusqu’au 31 décembre 2013. Sur le coup, Didier Deschamps ne cache pas son mécontentement : « Déçu, je ne sais pas si le mot est suffisant. Pas que pour M’Vila, pour les cinq. Même si l’erreur est possible, ce n’est pas compatible avec les exigences quand on porte le maillot de l’équipe de France. »

1988 jours après la victoire de l’équipe de France espoirs face à la Norvège, Antoine Griezmann et Wissam Ben Yedder vont à nouveau défendre les mêmes couleurs, face à la Colombie. Ils voulaient danser ensemble à Paris ? Qu’ils le fassent ce soir.

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