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Paris sauce Jardim

Par Mathieu Rollinger
Paris sauce Jardim

Ce samedi soir en finale de Coupe de la Ligue, Leonardo Jardim a l'occasion de faire d'une pierre deux coups : ramener à Monaco le seul trophée encore accessible cette saison, mais aussi montrer une nouvelle fois qu'il est le meilleur entraîneur actuel en France. Assez pour séduire le Paris Saint-Germain, en quête d'un successeur à Unai Emery ? Car avoir un Jardim sur son banc la saison prochaine serait certainement la meilleure chose qui puisse arriver au club de la capitale.

Unai Emery est toujours assis sur le banc parisien – d’une fesse d’accord, mais assis tout de même –, mais le Basque voit défiler depuis trois semaines les noms de ses successeurs supposés. Les misters italiens (Allegri, Conte et même le retour d’Ancelotti ont été évoqués) se mêlent aux techniciens portugais (Paulo Fonseca, André Villas-Boas, Sergio Conceição), sans oublier les pointures de Premier League (Pochettino et Mourinho). Le maelstrom dans lequel s’est fourrée la direction parisienne pourrait se prolonger quelques mois encore.

Mais la vraie bonne pioche pourrait se trouver juste sous son nez. Un visage qui est devenu familier en Ligue 1, jouissant d’une image aussi discrète que positive, avec une belle expérience européenne. Qui ? Leonardo Jardim. Celui-là même qui sera samedi soir à Bordeaux sur le banc adverse. Le coach monégasque a certes joué de sales tours aux Parisiens dans le passé, mais il présente un profil qui correspondrait à merveille à leurs besoins actuels et futurs.

Un caméléon bâtisseur

Tout d’abord pour le jeu proposé par le Portugais : assez offensif pour satisfaire l’appétit du Parc, assez pragmatique pour garantir cohérence et solidité. Les précédents coachs peuvent en attester : il faut être prêt à laisser son schéma tactique préférentiel à la porte du Camp des Loges. C’est ainsi que le sapin d’Ancelotti et les 4-2-3-1 fétiches de Laurent Blanc et d’Unai Emery n’ont jamais pu être durablement installés, les joueurs militant ardemment pour leur 4-3-3. Cela tombe bien, Leonardo Jardim, lui, n’a rien d’un dogmatique, mais est plutôt du genre caméléon. En quatre saisons sur le Rocher, le Portugais a navigué de 4-3-3, qu’il soit avec Toulalan en pointe basse (2014) ou avec Moutinho en pointe haute (2015), en 4-4-2 pour s’appuyer sur le duo Falcao-Germain (2016), alors qu’il évolue avec un 4-2-3-1 cette saison. « C’est mon travail de bricoler un peu pour toujours chercher l’équilibre, déclarait Jardim en début de saison, quand il tâtonnait encore avec ses recrues. Je ne suis pas une personne qui perd son temps à penser au passé. Je pense aux joueurs qui sont aptes et j’essaie de chercher un équilibre avec eux. » Exactement ce qu’il faut à Paris.

Jardim ne s’encombrerait ni de ses certitudes ni des revendications. Ce qui lui importe, c’est que le sacro-saint équilibre permette à son équipe d’être performante et d’enchaîner les résultats. Ce qui à Paris n’aurait rien d’un artifice, tant le crédit dont dispose un entraîneur en début de mandat dépend de son palmarès et de sa faculté à amener son groupe à concourir sur plusieurs tableaux. Emery était là pour ses trois Ligues Europa, Jardim a de jolies références tant dans l’Hexagone qu’en Europe, malgré le flop en C1 cette saison. Un titre de champion, un trophée UNFP du meilleur entraîneur de Ligue 1 et surtout une demi-finale de Ligue des champions en 2017, Leonardo Jardim pourrait s’installer sur le banc parisien en bombant le torse et bénéficier de cent bons jours d’état de grâce pour bosser. Du moins jusqu’au premières échéances européennes. Les Qataris sont plus que jamais pressés par l’obligation de briller sur la scène continentale, mais paradoxalement, le projet parisien pourrait aboutir bien plus rapidement avec un coach qui sait prendre le temps de bâtir.

Objectif 2020

Les désillusions de ce cru appellent à ce que le projet parisien soit repensé en profondeur. Que Nasser arrête de clamer chaque été vouloir être champion d’Europe pour se retrouver en pénurie de ressources au printemps. Son club a besoin d’enclencher une vraie transition, si tant est qu’elle ne soit pas menée comme celle entre les ères Ibrahimović et Neymar. Sans pour autant qu’elle soit blanche (le titre de champion de France ne pouvant être bazardé), une année de jachère permettrait aux récoltes de la suivante d’être beaucoup plus savoureuses. Et qui mieux que Jardim pour enfiler le chapeau de jardinier en chef et exploiter à bon escient le terreau parisien ?

Le Portugais a déjà prouvé qu’il savait mettre les joueurs dans les meilleures conditions, avec une gestion de groupe exemplaire. Ce qui a souvent fait défaut à Paris. Avec le Portugais, les plus jeunes ne seraient pas surexposées, tout en étant réellement intégrés dans la rotation. C’est ainsi que Martial et Mbappé ont pu émerger. C’est aussi ainsi que pourront s’affirmer les espoirs parisiens, qu’ils se nomment Giovani Lo Celso, Timothy Weah, Christopher Nkunku, voire Gonçalo Guedes s’il revient après son prêt. C’est ainsi que Presnel Kimpembe deviendra une machine de guerre. C’est ainsi que Marquinhos et Rabiot devront assumer leur statut de leader. Avec Jardim, cela promet aussi que les cadres soient mis devant leurs responsabilités. Il n’y a pas moins d’ego dans le vestiaire monégasque. Ils sont simplement mieux gérés. Falcao, Subašić, Glik et Moutinho ont été investis de la tâche de chaperonner les plus jeunes, montrer l’exemple sans être pour autant écrasants. Et cette alchimie, c’est Leo Jardim qui a pu la créer.

Fabinho en soute

Des arguments de poids qui permettraient de travailler en toute sérénité et de s’épargner des pressions inutiles, qu’ont subies les derniers aventuriers du banc, coincés entre les grandes gueules du vestiaire et les dirigeants. À Monaco, malgré les engagements et les désengagements du clan Rybolovlev et une direction sportive qui piétine chaque année son château de sable, Jardim a toujours réussi à passer les obstacles et reconstruire, inlassablement. Un Sisyphe qui saurait rouler sa pierre malgré le sort qui s’acharne.

À Paris, les impératifs ne sont pas les mêmes qu’en Principauté, n’ayant pas l’impératif de plus-values sur les joueurs recrutés. Cependant, en plus de sa puissance sur le marché des transferts dans le sens des arrivées, le club pourrait avoir un entraîneur qui sait soigner l’emballage des joueurs non désirés pour pouvoir les refourguer ensuite à bon prix. Difficile d’imaginer les cas Ben Arfa, Krychowiak ou Jesé être gérés de la même manière sous Jardim. Sans oublier qu’à Paname, Jardim retrouverait les têtes connues que sont Layvin Kurzawa et Kylian Mbappé, tout en emmenant avec lui des joueurs ciblés par le goinfre parisien, comme Fabinho. Bon, il signe où ?

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