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On ne peut pas Pléa tout le monde

Par Valentin Lutz
On ne peut pas Pléa tout le monde

Depuis l'annonce de sa convocation en remplacement de Kylian Mbappé, Alassane Pléa est régulièrement chahuté et critiqué. Moins clinquant que certains de ses compères et dans l'ombre d'un club méconnu en France, le buteur de Mönchengladbach, qui réalise un début de saison remarquable, a pourtant plus d'un argument à faire valoir pour montrer à tous qu'il peut représenter bien plus qu'un simple joker.

Alassane Pléa est un homme chanceux. Du moins, c’est ce que l’on pourrait penser lorsque l’on considère la carrière internationale du buteur français : après avoir honoré sa première cape en 2018 face à l’Uruguay à la faveur du forfait d’Alexandre Lacazette, le joueur de 26 ans vient d’être à nouveau appelé chez les Bleus, cette fois pour remplacer un Kylian Mbappé à court de forme. Mais en réalité, la présence de Pléa en équipe de France ne tient pas (que) de la bonne fortune, bien au contraire, et le déferlement de propos péremptoires et incisifs proférés à son égard semble rationnellement inexplicable. Car oui, l’ancien goleador de Nice mérite sa place et est un réel candidat aux postes offensifs au sein de la formation de Didier Deschamps : c’est en effet parfois loin du feu des projecteurs nationaux que l’on est le mieux mis en lumière.

Délit de gueule méconnue

Si le délit de sale gueule est bien connu dans le monde du football, il faudrait probablement inventer une nouvelle dénomination pour désigner la tare dont est victime Alassane Pléa : le délit de gueule méconnue. De fait, il est vrai que le garçon, formé à Lyon, n’a jamais fait dans le clinquant. À Nice déjà, où il débarque en 2014 après deux années quasi vierges du côté de l’OL, Pléa reste discret, ne s’illustre pas plus dans les annales de bonnes œuvres que dans les rubriques de faits divers. À croire que pour être reconnu, il faut se faire truand. Pourtant, sur le terrain, l’attaquant assure ; mieux, il monte en puissance. Tout au long de ses quatre saisons sur la Côte d’Azur, ses résultats statistiques, à l’image de son influence dans le jeu, progressent : dans l’ombre de ses partenaires d’attaque, surtout celle de Super Mario Balotelli, Pléa plante 3, 6, 14 puis 21 buts toutes compétitions confondues.

Mais alors que l’on commence à parler de lui, à l’été 2018, il décide à nouveau de prendre tout le monde à contre-pied en s’engageant avec le Borussia Mönchengladbach en échange d’une belle enveloppe de 25 millions d’euros. Bien loin des « grands clubs » , et surtout, des sirènes de l’Angleterre, où Tottenham, notamment, lui fait la cour, le bonhomme préfère franchir les étapes progressivement. Même s’il est impopulaire, le choix de carrière, d’abord, est judicieux : Gladbach est certes un club considéré comme « intermédiaire » , mais il s’agit aussi d’une institution historique, structurée et populaire, au sein de laquelle il peut bénéficier d’un temps de jeu conséquent. Même s’il reste sous-estimé, le pari, ensuite, est gagnant : toujours discret, Pléa s’épanouit au pays du football offensif et claque 15 buts lors de sa première saison en Allemagne.

Juste un joker, vraiment ?

La récompense ne tarde pas à pointer le bout de son nez, puisque Didier Deschamps décide de le convoquer en novembre 2018 et de lui offrir sa première sélection quelques jours plus tard, face à l’Uruguay (2-0). Mais l’apparition, si elle est fulgurante, n’a finalement rien du coup de folie : de fait, Pléa s’était déjà imposé dans l’esprit de DD et recevait des pré-convocations depuis septembre 2017. L’idée selon laquelle Pléa serait donc un intrus révélé par le fruit du hasard, une simple solution de rechange appelée parmi les champions du monde pour dépanner puis s’évanouir doucement, est partiellement fausse. Dans la hiérarchie, le buteur de Gladbach figure sans doute derrière Coman, Martial ou Lacazette (encore que, pour le dernier, ce ne soit pas totalement sûr). Mais contrairement aux propos péremptoires affirmant sans vergogne qu’il n’a pas sa place en sélection aux côtés des « grands » , le garçon a véritablement quelque chose à apporter à cette équipe de France. Car son profil est original, spécial. Rare, tout simplement.

Alassane Pléa a en effet pour lui une certaine forme de polyvalence, précieuse dans la constitution d’un effectif de sélection. Surtout, à l’image d’un Kingsley Coman (au profil certes différent) qui flambe en club et s’illustre en Bleu, le joueur de 26 ans a une folie, une envie, une fraîcheur, qui manquent parfois à cette formation si forte dans la gestion, mais parfois si froide et cynique dans son approche des rencontres. Enfin, Pléa a progressé dans un domaine capital pour un attaquant et qui lui manquait parfois par le passé : une maladresse devant le but transfiguré en un réalisme souvent létal. En ce début de saison, l’ancien Niçois n’a pas tardé à dépoussiérer la cartouchière : déjà quatre buts (assortis d’une passe décisive) en sept matchs et un statut affirmé de leader d’attaque partagé avec un autre Français, Marcus Thuram. Qu’importent les critiques, DD s’en moque de toute façon : c’est bien Alassane Pléa, toujours capable de s’élever quand le niveau s’élève, qui sera susceptible de porter le maillot de la France à l’occasion de deux rencontres importantes, face à l’Islande ce vendredi, et contre la Turquie lundi.

Par Valentin Lutz

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