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On a passé le Boxing Day avec les bookmakers

Par Ronan Boscher à Manchester
On a passé le Boxing Day avec les bookmakers

C’est un monde exclusivement masculin qui s’est retrouvé sans trop se connaître dans un bureau de paris du centre de Manchester. Si le Boxing Day est jour de sport, il est aussi jour de jeu, autour du foot, de canassons et même de lévriers.

L’Angleterre digère sa dinde. Une manchette du Mirror rappelle même qu’un père Noël ivre a été attrapé en train de manger des dindes vivantes. Le Sun fait de son côté une page sur Hugo Lloris – « Je suis juste un geek » – en blouse blanche et lunettes de savant fou. Après une journée morte comme le 25 décembre, la vie reprend bien ses droits, même en ce jour férié. À Manchester, la foule inonde les boutiques et dépense les livres grattées sous le sapin ou dans une grande chaussette. Les bookmakers aussi ont levé le rideau. Aujourd’hui, plus qu’un autre jour encore, c’est jour de courses, et jour de match. Chez BetFred, en face du principal centre commercial du centre-ville, une petite trentaine de personnes arpentent les moquettes et sièges club rouges du tripot légal. Au centre, une armée d’écrans plats dignes d’une salle de marché. Les haut-parleurs sont réglés à fond sur Turf TV, alors qu’aux extrémités les LCD diffusent la chaîne info continue de Sky Sports qui ne montre aucune image de match, que celle de ses commentateurs, entourés de bandeaux déroulants à la Bloomberg, des chiffres partout.

« Evans putain, Evans quoi ! »

Gordon, au sonotone pourtant bien branché, tend l’oreille pour écouter les haut-parleurs de la pièce. Au moins 70 ans, il déchante sur un fauteuil en cuir : « Je viens de perdre l’argent de ma première petite fille. Voilà. » Vingt livres balancées sur la 5e à Kempton Park. « T’as vu Long Run, là, tu l’as vu ? Au dernier moment, bam il passe devant ! » rumine-t-il. Mais Gordon n’est pas en reste. Il a une autre petite fille et quelques économies spéciales pour le Boxing Day. « Pas pour le foot hein, il n’y a pas assez de matchs. Les courses, c’est mieux » , prévient-il. Gordon enregistre un deuxième gadin, sans préciser le montant, sur la 6e à Wetherby. « Y en a que pour les favoris aujourd’hui, je rentre. » Rideau pour Gordon qui ne croise pas l’éclair Lester, la cinquantaine. Boum ! 200 livres misées sur la victoire de… Barnsley contre Birmingham. « Je parie à chaque Boxing Day, pour Barnsley » , explique-t-il avant de repartir. Les discussions vont bon train dans la salle. D’un côté, on lance les duplex sur Turf TV, en direct des courses de lévriers de Newcastle. De l’autre, Newcastle toujours. Les Magpies sont en train de battre Man United à Old Trafford. « Franchement, qui aurait tenté Evans en double buteur, avec un csc ? C’est n’importe quoi. Moi, j’avais mis 15 livres sur Van Persie en premier buteur du match, pas de risques, un truc normal quoi… Evans putain, Evans quoi ! » se désole Greg, une casquette Mars a moitié vissée sur le crâne. Quelques Chinois regardent méticuleusement tous les écrans, les tableaux, prêts à dégainer le stylo bic sur les bulletins de paris. Ils ne prêtent pas une once d’attention à l’annonce de la nouvelle défaite de QPR. Non loin des comptoirs, Steve, « conseiller commercial par téléphone, les mecs relous qui t’appellent tout le temps » , a le rire gras, pas pour vanner QPR : « Je me suis planté de bulletin, j’ai parié sur les chiens à Newcastle alors que je voulais miser victoire de Reading contre Swansea. Et mon chien a gagné. T’y crois, ça ? »

« Green contre son camp, ça aussi ça se tentait ! »

L’employé passe faire une petite toilette à la salle et n’oublie surtout pas l’énorme manchette proposant le pari du jour, le « big match » : victoire de Manchester United 3-2 contre Newcastle. Pour 10 livres misées, 260 de gagnées. Les Red Devils sont revenus dans le coup en égalisant à 2-2. On commence à être fier de son coup derrière les comptoirs, mais les Magpies remettent un troisième but avant de craquer en fin de match. Victoire 4-3 des Red Devils. Tant pis, on range le panneau. Sunderland arrive à se farcir City au Stadium of Light. Un petit vieux, calé ou tassé dans le fauteuil le mieux placé face au mur d’écrans, fait la leçon : « Pourtant, ils avaient déjà perdu lors des deux dernières saisons à Sunderland. Franchement, ça se tentait ! Bon, moi, je parie jamais sur le foot, mais vous… » Quand on entend au micro « QPR mené 2-0 après un but contre son camp de Robert Green » dicté avec désolation par le speaker, les regards de tous les parieurs se croisent, des regards qui disaient tous « Green contre son camp, ça aussi ça se tentait ! » Le rythme des courses ralentit, Barnsley finit par perdre contre Birmingham. Malgré les derniers duplex avec les lévriers, la salle se vide petit à petit. Le petit vieux déploie son mètre soixante du fauteuil en cuir et part sans rien dire, l’air tout de même perplexe en jetant le Sun sur une table, ouvert à la page 15. « Muamba : je suis prêt à danser la rumba. »

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