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« On a été traité de façon inhumaine »

Propos recueillis par Anthony Cerveaux
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«<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>On a été traité de façon  inhumaine<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Saïd*, 32 ans est comptable. Il est aussi supporter du PSG. Vendredi 1 février, il était dans l'un des bus bloqués par les forces de l'ordre pendant près de 8h à proximité de Toulouse avant d'être renvoyé à Paris sans avoir pu assister au match. Jointe par So Foot, la préfecture de Haute-Garonne explique que « les supporters ont été contrôlés pour alcoolémie » et qu'« ils ont refusé d'obtempérer et tenté de se substituer au contrôle, c'est pourquoi, en accord avec les instances de police et le club hôte, nous avons pris la décision de les renvoyer à Paris sans assister au match ». Saïd, lui, a une tout autre version des faits. Il raconte le calvaire vécu par les supporters parisiens, enfermés pendant plusieurs heures dans leurs bus sans boire ni manger, dénonce l'inhumanité des forces de l'ordre et met en cause les dirigeants du PSG.

Peux-tu nous raconter le trajet en bus de Paris à Toulouse ?On est partis de Paris vers 4h du matin avec un peu de retard sur l’horaire de départ initial, il y avait deux bus : j’étais dans le bus des Microbes, et dans le second, il y avait de jeunes supporters qui suivent le mouvement de contestation envers la politique du club. Sur le parcours, on n’a eu aucun problème. Vers 13h, on arrive à la barrière de péage à l’entrée de la rocade de Toulouse et là, on voit plusieurs camions de gendarmerie. Une fois passé le péage, ils nous arrêtent pour un contrôle. Au départ, on ne s’inquiète pas trop, ça nous arrive quasiment tout le temps de se faire arrêter. Le contrôle dure plus de deux heures avec prise d’identité de tout le monde et un des gendarmes qui nous filmait. Le bus est entièrement fouillé, toutes les bouteilles sont jetées et pas seulement les bouteilles d’alcool mais aussi les bouteilles d’eau et de coca…

Selon la préfecture de Haute-Garonne, vous étiez à ce moment-là « alcoolisés » et vous avez « refusé d’obtempérer et tenter de vous substituer au contrôle » ? C’est complètement faux, au contraire, on a respecté le contrôle, tout s’est déroulé dans le calme. On n’avait aucun intérêt à compliquer les choses parce qu’on voulait vraiment aller au stade. Donc on a attendu que ça se passe, on savait qu’on n’avait rien à se reprocher de toute façon puisqu’on était tous en possession de billets pour accéder au Stadium. Tout ça prend fin vers 16h, les gendarmes nous demandent de remonter dans les bus et disent qu’ils vont nous escorter jusqu’au stade. Nous, on voulait aller dans un endroit pour manger, certains n’avaient rien avalé depuis la veille. On part du péage avec une escorte de huit camions de gendarmes mobiles et deux voitures de police, pensant aller au Stadium et là, on prend la direction d’une déchetterie près de l’autoroute. Encore une fois, on pense qu’ils vont nous garder jusqu’à 19-20h avant de nous emmener jusqu’au stade.

« Il faut voir ça avec le président de votre club… C’est lui qui décide ! »

Est-ce qu’on vous donne des explications pour vous garder ?Non aucune explication ne nous est donnée, que ce soit par le représentant du préfet de Toulouse ou par les gendarmes mobiles pour nous expliquer ce qu’on fait là. En plus, les gendarmes nous obligent à rester dans les bus, sans avoir rien à boire ni à manger et menacent de nous gazer si on descend. On a seulement le droit de descendre un par un pour aller pisser à 5 mètre du bus. Vers 18h30, 3 camions de CRS viennent renforcer les 8 camions de gendarmerie. On commence à sentir que ça va être compliqué pour nous.

Vous avez alors essayé de discuter avec les gendarmes ?Oui, au bout d’un moment, on n’en pouvait plus, il faisait nuit, on a demandé aux gendarmes qui gardaient la porte d’entrée du bus d’où venaient les ordres. Et là, un gendarme nous a répondu sans entrer dans les détails : « Il faut voir ça avec le président de votre club… C’est lui qui décide ! » Là on est complètement surpris ! De quel droit, le président du PSG pourrait nous interdire de nous rendre dans un stade qui n’est pas le sien ? D’autant que comme pour Bordeaux, il y a deux semaines, il n’y avait aucun arrêté préfectoral nous interdisant de nous déplacer. Et à Bordeaux, tout s’était bien passé avec la police dans la ville comme au stade !

Que s’est-il passé ensuite ?Vers 19h30, on sent que le début du match se rapproche, on voit les gendarmes qui mangent leurs sandwichs dans les fourgons à côté de nous. À l’intérieur du bus, certains commencent à s’énerver, d’autant qu’on n’a pas plus d’explications sur la suite des évènements. À ce moment-là, plusieurs dans le bus n’en peuvent plus et décident de sortir pour prendre l’air, immédiatement ceux qui sont dehors se retrouvent encerclés par les gendarmes et les CRS. À 20h, on apprend alors qu’on ne pourra pas aller au stade et qu’à la mi-temps du match les bus repartiront en direction Paris. On est scandalisé par cette décision qui nous est donnée sans aucune justification!

« Supporter le PSG n’est pas un crime »

Comment se passe le retour ?On repart vers 21h15 sous une escorte de ministre, les chauffeurs n’ont même pas eu le temps de repos réglementaire puisque tout le temps du contrôle ils n’ont pas pu dormir. À 100km de Toulouse, on veut s’arrêter dans une aire d’autoroute. Une voiture de gendarmerie nous barre l’entrée, alors qu’il fallait que le bus aille faire le plein d’essence… Finalement ils nous laissent passer. Ensuite, on ne fera plus d’arrêt jusqu’à Paris mais, tout le trajet, on a surveillé les chauffeurs et on les a maintenus éveillés parce qu’on avait peur qu’ils s’endorment. En passant devant toutes les stations-services on a vu à chaque fois une voiture de gendarmerie avec un gyrophare. Ils avaient sûrement peur qu’on essaie de faire demi-tour… L’autre bus, lui, n’a pas eu l’autorisation de s’arrêter avant Orléans !

Qu’est-ce que vous comptez faire maintenant ?On va déposer une plainte, ils n’avaient aucun droit de nous bloquer alors qu’on était en possession de billets. En plus, c’est un déplacement qui nous aura coûté 100 euros à chacun pour rien et pour certains c’était la première fois qu’il faisait un déplacement pour aller soutenir le PSG… On va essayer de réunir le maximum de personnes présentes dans les bus, pour récolter les billets de tout le monde et que chacun participe aux frais d’avocats. Il est certain qu’on ne va pas en rester là, c’est complètement scandaleux et inhumain la façon dont on a été traités. Supporter le PSG n’est pas un crime !

*Le prénom a été changé à sa demande : « Mon prénom est rare, donc facilement identifiable, et je n’ai pas envie d’être interdit de stade, on ne sait jamais, les dirigeants du PSG sont très puissants. »

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