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Naples, avec pertes et fracas

Par Adrien Candau
Naples, avec pertes et fracas

Seconde place forte du football italien derrière la Juventus ces dernières saisons, le Napoli de Carlo Ancelotti a réussi à se saborder tout seul, alors que le club se retrouve déchiré par un conflit entre les joueurs et son président, Aurelio de Laurentiis, depuis plusieurs semaines. De quoi transformer la formation azzurra en bombe à retardement sur pattes, alors que les Partenopei se déplacent à Liverpool ce mercredi, avec un effectif au bord de l'implosion.

Tout a donc basculé le 5 novembre dernier. Ce mardi, Naples venait de concéder le nul face à Salzbourg en C1 et Aurelio de Laurentiis doit soudainement composer avec un phénomène inédit pour lui : une mutinerie. Trois jours plus tôt, alors que les Partenopei avaient perdu une rencontre cruciale en Serie A face à la Roma, le boss napolitain avait tranché dans le vif, en imposant une mise au vert d’une semaine à tout l’effectif. Une décision prise unilatéralement, sans l’accord de son Mister, Carlo Ancelotti, et qui provoquait la colère des joueurs azzurri: excédés, ces derniers décidaient après le duel face à Salzbourg d’ignorer les injonctions de leur hiérarchie et de rentrer chez eux.

La suite ? Le bordel, le vrai, celui qui peut conduire à détricoter les bases d’une équipe à la régularité pourtant métronomique depuis quatre ans, alors que De Laurentiis aurait choisi de sanctionner lourdement ses joueurs ce lundi : selon la Gazzetta dello Sport, l’ensemble des mutins devraient voir leur salaire mensuel brut pour le mois d’octobre (des indemnités, qui, selon le quotidien italien, ont été gelées et n’ont donc pas encore été versées) amputé de 25%, Allan risquant même une coupe de 50%. Surtout, les médias italiens avancent que le club préparerait un grand coup de balai dans les mois à venir, plusieurs joueurs cadres étant potentiellement sur le départ, de Mertens à Insigne en passant par Koulibaly et Callejón. De quoi se demander si le Napoli n’est pas purement et simplement en train de se faire hara-kiri.

Ancelotti, lost in Napoli

Pour comprendre ce qui se passe dans le ville du Vésuve, il faut distinguer quelques acteurs clés du dossier. D’abord, Carlo Ancelotti lui-même, qui semble comme paralysé en plein milieu de la zone de conflit qui oppose ses joueurs et sa direction. Une chose est sûre : le Mister n’était pas du tout partant pour la mise au vert imposée par De Laurentiis à ses joueurs. « Le club a des devoirs à prendre et nous devons l’accepter, déclarait l’ex-entraîneur du Milan avant la réception de Salzbourg. Si vous me demandez si je suis d’accord, je dirais non… Les résultats ne sont pas bons en ce moment. Nous avons pourtant travaillé dur, mais avons payé le prix fort dans certaines situations. » Comprendre : la sanction imposée par son président est disproportionnée. Le contenu des matchs semblait d’ailleurs donner plutôt raison au coach partenopeo: plutôt en verve offensivement face à l’Atalanta et la Roma lors des 10e et 11e journées de Serie A, les Azzurri n’avaient pas su concrétiser leur supériorité technique, ne récoltant qu’un point en deux rencontres. Un faible total, venu sanctionner leurs évidentes largesses défensives, mais qui est aussi le résultat de faits de jeux malheureux. Face aux Bergamasques, l’arbitre de la rencontre aurait probablement dû siffler un penalty à la suite d’une faute grossière de Kjær sur Llorente en fin de match, quand les Napolitains ont naïvement concédé deux penaltys face à la Louve.

Résultat ? Les joueurs ont semble-t-il perçu la sanction imposée par De Laurentiis comme un excès de zèle injuste, alors que le club semble par ailleurs bien parti pour se qualifier pour les huitièmes de finale de la C1. Émergent alors des figures pour mener la contestation : Lorenzo Insigne et Allan, deux tauliers du onze type et du vestiaire. À la sortie du match contre Salzbourg, Edoardo de Laurentiis, le fils d’Aurelio et vice-président du club, se serait pris sévèrement le bec avec ces derniers : « On rentre chez nous, dis-le à ton père » , lui aurait lancé l’ailier napolitain, quand Allan, furieux, lui aurait carrément balancé : « Ton argent, tu peux te le mettre au cul. » La classe. Voilà qui aurait décidé De Laurentiis à amputer les salaires de ses protégés. L’ANSA, la principale agence de presse italienne, annonce même que 7 à 8 millions d’euros pourraient être déduits des revenus relatifs aux droits à l’image de certains joueurs.

Tous coupables

Mais alors, où va le Napoli, qui se déplace ce mercredi sur la pelouse de Liverpool ? On ne sait pas, on ne sait plus. Ce qui est certain, c’est qu’en même pas l’espace d’un mois, le club a réussi à se saborder tout seul, dans un exercice d’auto-destruction proprement édifiant. À qui la faute ? Sans doute en partie à De Laurentiis, qui n’a pas pu s’empêcher de remettre une fois de plus le nez dans le sportif. Peut-être aussi aux joueurs, dont la contre-attaque a précipité l’équipe dans une crise structurelle qui fait déjà de sérieux dégâts sur le terrain. Samedi dernier, le Napoli a même délivré une prestation indigente face au Milan (1-1), les joueurs ne pouvant évidemment pas faire abstraction du bazar sans nom auquel s’est condamnée leur formation.

Impossible de savoir sur quoi tout cela va déboucher, mais Carlo Ancelotti se retrouve face à l’un des défis les plus exigeants de sa carrière, à savoir remonter à la surface un club que l’Italie du football regrette déjà de voir saccager des années d’une gestion exemplaire. Systématiquement dans le top 3 de la Serie A depuis l’exercice 2015-2016, tenant d’un projet de jeu aussi cohérent que séduisant initié par Sarri et prolongé par Ancelotti, Naples a su se frayer une place méritée au sommet du football transalpin. Une place que l’entraîneur, les joueurs, comme les dirigeants du club ne pourront préserver qu’en trouvant de manière urgente un moyen de tirer dans le même sens, sous peine de payer les conséquences d’une crise qui pourrait bien se transformer en monumental gâchis.

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