- Mondial 2023
- Quarts
- Australie-France (0-0, 7-6 T.A.B)
Les Bleues, championnes des quarts ratés
Les Tricolores d’Hervé Renard se sont fait sortir du Mondial par l’Australie, hôte de la compétition, après une séance de tirs au but riche en émotions. Le mimétisme de compétition en compétition est saisissant, et les statistiques prouvent qu'un véritable plafond de verre est né.
Après l’échec (déjà aux tirs au but) face à l’Allemagne en 2015, puis celui face aux États-Unis quatre ans plus tard à domicile, les Bleues connaissent aujourd’hui une nouvelle désillusion en Coupe du monde. Désormais membre des favorites à chaque fois qu’elle entame des compétitions, la France ne parvient pourtant pas à entrer dans la cour des grandes : une seule demi-finale de Mondial au compteur tricolore, qui date maintenant d’il y a douze ans. L’aventure française prend inéluctablement fin en quarts de finale, peu importe l’effectif ou le staff en place. L’Australie, adversaire à la portée des Tricolores, a provoqué une énième contre-performance de ces dernières : le signe qu’un travail de fond est encore à réaliser pour espérer de meilleurs résultats dès 2024.
Un plafond de verre toujours pas brisé
La malédiction semblait enfin vaincue lorsque, le 23 juillet 2022, l’équipe de France avait éjecté de l’Euro les Pays-Bas, alors tenants du titre, et arrivait par la même occasion à se qualifier pour sa première demi-finale dans un championnat d’Europe. Un an plus tard, l’euphorie est retombée et les espoirs se sont envolés lorsque Cortnee Vine a transformé son penalty, ce samedi, laissant de nouveau la France aux portes du dernier carré.
#FIFAWWC 🇦🇺⚡🇫🇷 Au terme d'une séance de tirs au but au scénario incroyable, l'Australie se qualifie dans le dernier carré de son Mondial et élimine les Bleues. pic.twitter.com/peA56Tdw78
— francetvsport (@francetvsport) August 12, 2023
Ce traumatisme des quarts de finale ne concerne pas uniquement les Coupes du monde, et les chiffres sont édifiants pour les Bleues. Il s’agit de la septième élimination à ce stade pour la France, toutes compétitions confondues (Mondiaux 2015, 2019 et 2023, Euros 2009, 2013 et 2017, Jeux Olympiques 2016), sur dix quarts joués : tout simplement inédit dans le football international féminin. Cette année, le parcours s’achève prématurément malgré le changement de staff en mars dernier, après la fronde des joueuses qui avait provoqué l’éviction de Corinne Diacre. Une constance rare, mais aussi des foirages systématiques.
Hervé Renard, à l’issue du match, a tenu à féliciter ses joueuses : « Ce soir, il faut être fier des filles, elles ont fait un match exceptionnel. Ça allait de droite à gauche, de gauche à droite. Dire qui méritait le plus, c’est difficile, donc félicitations à l’Australie. Et puis félicitations à tout le staff qui a fait un travail magnifique. » Pourtant, c’est bien sûr la déception qui prend le pas sur la fierté. Même si l’issue de la séance de tirs au but est tragique pour les joueuses au maillot frappé du coq, le match aura surtout été une faillite collective durant laquelle les Françaises ont finalement très peu porté le danger sur la cage australienne. Le sélectionneur, dont c’est aussi l’échec, a parlé d’un « match exceptionnel » et d’« un stade entier, une nation contre nous ». Mais les Bleues n’avaient pas fait mieux lors de l’édition 2019, pourtant organisée dans l’Hexagone : le résultat avait été le même, face au futur vainqueur américain.
Les tirs au but, un mal français
Si cette nouvelle défaite parait douloureuse, c’est surtout parce que la victoire, elle, fut toute proche. Et si loin à la fois. Les tirs au but n’ont jamais été une spécialité française, en particulier pour l’équipe de France féminine. Il s’agit aujourd’hui de la quatrième élimination en cinq séances disputées dans les grande compétitions, qui ont toutes eu lieu en quarts. Deux fois en Coupe du monde (2015 et 2023) et deux fois à l’Euro (2009 et 2013). La seule exception ? Lors de la Coupe du monde 2011 face à l’Angleterre (1-1, 4-3 T.A.B.), ce qui avait permis à cette sélection, pour la seule et unique fois de son histoire, de figurer parmi les quatre meilleures équipes d’un tournoi majeur.
4 – La France 🇫🇷 a été éliminée pour la 4e fois en 5 séances de tirs au but disputées dans son histoire en tournois majeurs (Coupe du Monde, EURO et Jeux Olympiques), à chaque fois au stade des quarts de finale. Malédiction. #AUSFRA #WomensWorldCup2023 pic.twitter.com/lr98i9B9O7
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Cette séance a établi un nouveau record : c’est la première fois dans l’histoire des Coupes du monde – féminines et masculines – que dix tireuses de chaque camp sont nécessaires pour départager les équipes. Au total, sept joueuses ont manqué leurs tentatives : quatre côté français et trois côté australien. « Le penalty, c’est le football dans sa forme la plus pure : le tireur, le gardien, le ballon. Rien d’autre », rappelle Ben Lyttleton dans Onze mètres, la solitude du tireur de penalty. À l’intérieur du cerveau des joueuses, c’est pourtant la surchauffe. À l’issue du match, Kenza Dali a expliqué les raisons de son échec : « Je ne voulais pas le tirer car elle (Mackenzie Arnold, gardienne de l’Australie) me connaît par coeur. J’ai travaillé avec elle (à West Ham entre 2020 et 2021) sur des coups francs, des tactiques de tirs. C’était la première à me conseiller sur les penaltys. »
20 – Il y a eu 20 tirs au but tentés entre l'Australie 🇦🇺 et la France 🇫🇷 (10 de chaque côté), soit le plus haut total lors d’une séance du genre dans l’histoire de la Coupe du Monde féminine. Folie. #AUSFRA #WomensWorldCup2023 pic.twitter.com/LnTwO5JqKu
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Pourtant, le sélectionneur a tout tenté pour briser le signe indien. Il a remplacé Pauline Peyraud-Magnin par Solène Durand, plus à l’aise que la portière de la Juve dans cet exercice, et abattu sa dernière carte en faisant entrer Ève Périsset en toute fin de prolongation. Le premier pari, osé, a fonctionné puisque la gardienne guingampaise a détourné deux frappes australiennes. Le second aura par contre accouché d’un raté, comme c’est généralement le cas lorsqu’un coach décide de faire entrer l’un de ses éléments à froid, uniquement pour la séance (les Anglais confirmeront). Périsset s’est avancée comme cinquième tireuse et a envoyé sa tentative sur le poteau. « C’est le football, c’est le destin qui a choisi », a fini Hervé Renard. Du Ninho dans le texte pour sécher les larmes des supporters bleus.
Par Léna Bernard