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  • Mondial 2022
  • Finale
  • Argentine-France (3-3, 4-2 TAB)

Messi au firmament

Par Alexandre Lazar
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Messi au firmament

Face à des Bleus hagards, survoltés, puis à nouveau hagards, la garra argentine a fini par prendre le dessus. Lionel Messi tient son sacre ultime et sa place au panthéon de la performance. Il se murmure que Diego Maradona a déjà dressé la table, pour une soirée qui s'annonce dantesque.

C’était un serpent de mer qui traînait depuis 2014, et cette finale bazardée par l’Argentine face à l’Allemagne : pour voir Lionel Messi toucher du doigt le firmament, s’asseoir à la table de Don Diego Maradona ou dépasser Pelé aux yeux de la planète, il ne suffisait pas d’empiler les Ligues des champions, placer records et médailles dans une brouette ou même réduire, à distance, Cristiano Ronaldo à un rôle de figurant. Non, seule une vraie battue à travers les mottes de terre et les grains de sable, entre sueur, larmes, sécateur paredesien et célébration riquelmienne était en mesure d’ouvrir à « La Puce » les portes du sacre. Il fallait aimer l’aventure, les dédales de la galère, pour décrocher la timbale des timbales.

Éternel et immortel

C’est d’abord l’histoire d’une baguette de direction, qui aurait tout aussi bien pu trôner entre les paluches aiguisées d’Igor Stravinsky, chef d’orchestre tout-terrain du XXe siècle. La dernière danse prend des airs de tango excitant pour l’Albiceleste lorsque Ousmane Dembélé pique du nez dans le piège tendu par la surprise du chef Scaloni : l’homme des finales, Ángel Di María. Le témoin est tombé au sol. La Pulga s’en saisit, et accepte l’offrande, d’un indécent sang-froid. C’est un secret de polichinelle, Hugo Lloris n’est pas Wojciech Szczęsny dans l’exercice périlleux des penaltys. Prise dans l’engagement, littéralement dépecée au milieu de terrain et miniaturisée par des yeux argentins injectés d’éternité, l’équipe de France est en train de passer à côté de son propre rendez-vous avec l’histoire.

Entre les lignes, Lionel Messi n’en finit plus de distribuer les passes clés et d’accentuer les décalages. Même ses toupies finissent dans le sens du jeu. Sa cuisse endolorie est oubliée, sa fatigue rachitique. El Fideo brise les chevilles de Jules Koundé et double la mise, Julián Álvarez est d’une justesse incroyable en une touche, avec ses airs de diable de la Terre de feu, prêtés quand il le faut par Rodrigo de Paul. Tous sublimés par l’aura christique de leur messie à la barbe rousse. Même quand les rebelles Randal Kolo Muani et Kylian Mbappé rallument la mèche, il semble flotter dans l’air de Lusail un parfum d’inextricable destinée.

À court de carburant, parfois le nez dans le guidon, oubliant un coéquipier sur sa droite et s’enfonçant dans l’entonnoir bleu, Lionel Messi surgit après un nouvel échec de Lautaro Martínez. Toujours trop juste, avec cette Albiceleste jumelée à la douleur. Un dernier regard électrique après son tir au but, avant de laisser Emiliano joli user de sa gouaille pour achever la quête. Le meilleur passeur du Mondial qatari s’en va comme un empereur, avec le Graal sous le bras. Loin de sa retraite avortée, au-delà de l’immortalité de son héritage sportif, tel cet obélisque sans fin au centre de la Plaza de la República de Buenos Aires, Messi ne bougera plus des cœurs argentins.

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