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Macron, Emery, même combat ?

Par Nicolas Kssis-Martov
Macron, Emery, même combat ?

Emmanuel Macron en sera. Une nouvelle pièce de l'échiquier des présidentielles 2017 vient de prendre place, sans qu'on sache s'il sera un pion sacrifié à la va-vite ou une « reine » qui fera le « roi ». En attendant, à l'instar de son frère jumeau Unai Emery, lui aussi débarqué en outcast dans le pré-carré du foot national - avec son ego, ses dents blanches et quelques idées iconoclastes -, on ramassera les copies en mai.

Il s’est enfin libéré. Terminé le faux suspense. Emmanuel Macron déposera bel et bien sa candidature à la présidence de la République française. « En marche » vers son destin, mi-Mao mi-libéral, le petit timonier du centre, et de tous bords, va pouvoir (dé)montrer de quoi il est capable en s’installant, ni à droite ni à gauche, mais au cœur du débat. Sauf que bien loin du confort de Bercy, et des déclas faussement anticonformistes dans L’Express ou Le Point, il faudra désormais savoir briller là ou cela compte, dans les meetings et les urnes. La vérité du terrain s’en cogne des bonnes notes à l’ENA, quand il causait autour d’un panaché de la vétusté des logiciels politiques du siècle précédent. Eh oui, balle au pied, tous les schémas tactiques ne valent que par le score qui fait sourire le propriétaire et le public. Le beau tacticien du FC Séville, débarqué avec son beau costume et ses convictions sur le jeu, se frotta lui aussi à la dure loi de la rigidité du réel, quand toutes les belles constructions intellectuelles finissent dans les pieds de Cavani, et plus rarement au fond des cages adverses. Il faudra donc un peu plus que des belles lectures, et des statistiques de l’OCDE, pour conduire les électeurs à glisser leur bulletin dans l’urne. Les voilà tous les deux au pied du mur, avec un plafond de verre, premier tour et quarts de finale, qui ne cédera pas simplement devant la beauté de leur karma. « Pour moi, l’ambition n’est pas une notion qui s’accorde au futur, mais au présent » , disait Unai Emery avant d’arriver au PSG. Depuis, il révise un peu plus son Bled, semble-t-il.

De la Ligue des champions au droit du travail

Ils ont pourtant tout compris. Aujourd’hui, le style vaut programme, car plus personne ne les lit vraiment. C’est en Seine-Saint-Denis, à Bobigny, ville récemment subtilisée par la droite aux communistes – tout un symbole – que l’homme qui veut renouveler la politique française, faire barrage au possible Trump hexagonal, redresser l’économie, rendre le patron heureux et les salariés à leur fiche de paie, a professé aujourd’hui son coming out. Un ministère, c’était bel et bien trop peu, trop étroit pour lui. Il ne voulait pas vivre à l’ombre d’un fantomatique François Hollande qui lui avait pourtant offert la lumière et le droit d’exister entre Manuel Valls et Najat Bellaud-Kacem. Il a eu droit à toutes les attentions médiatiques, les séductions de caméras et les baisers des micros. Il a appris à donner des interviews et a distribué les bons mots. Son attitude a séduit, parce qu’elle dérangeait sans effrayer. Il était la nouveauté dans une classe politique qui sentait le « déjà vu » et l’angoisse décliniste devant le cataclysme populiste. Il était le rookie au milieu d’un petit landerneau. Il portait bien la cravate sur chemise blanche et sortait des évidence sur notre temps d’une candeur de bon élève. « La France est bloquée par les corporatismes. Dans le fond, elle n’est plus à la hauteur de sa promesse. » À chacun son Zlatan qui empêche de voir plus loin. Celui de Macron s’appelle « droit du travail » . À chacun sa Ligue des champions. Celle d’Emmanuel porte le doux nom de « mondialisation » .

À Emery le cuirassé parisien, à Macron l’armada médiatique

Unai Emery avait, lui aussi, quitté la tranquillité de l’éternelle cinquième ou quatrième place de la Liga, lassé de gagner des Ligues Europa, et de regarder dialoguer Luis Enrique et Diego Simone. Il est parti tenter sa chance, fuyant la rivalité Atlético-Real-Barça comme Macron veut s’extirper de l’étau FN-PS-LR. Le pari est risqué. Et les médias aiment adorer ou détester – l’important reste de squatter les retweets – ceux qui s’aventurent la fleur au fusil sur la pente du seul contre tous. Tant pis pour Ben Arfa ou les milieux populaires, on ne peut pas plaire à tout le monde. Voila donc la feuille de route. À Emery le cuirassé parisien, à Macron l’armada médiatique. En face, la fracassante résilience d’un monde qui ne veut désespérément pas se plier aux calculs, aux palettes et aux sondages. La L1 a son OGC Nice, la politique son Mélenchon. Cours camarade, le vieux monde attend que tu te vautres.

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