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« Ma blessure au genou a conditionné mon expérience au PSG »

Propos recueillis par William Pereira
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Retraité depuis trois ans, l’ancien milieu de terrain âgé de 35 ans s’occupe aujourd’hui de la formation, à Estoril, son dernier club en tant que joueur. De l’eau a coulé sous les ponts depuis son passage au PSG, mais Hugo Leal n’en garde pas moins de souvenirs. Entretien avec un homme qui a également côtoyé Jorge Jesus et Marco Silva, les deux entraîneurs portugais à la mode.

Que faites-vous maintenant que vous avez raccroché les crampons ?Je suis responsable de la formation à Estoril, c’est-à-dire que j’organise toutes les activités liées à la formation du club, donc on parle de 570 jeunes. Je suis responsable auprès des entraîneurs, mais aussi des parents des joueurs.
On a l’impression que les clubs portugais parient de plus en plus sur la formation après une période de relâchement à ce niveau…Je pense que l’on travaille bien mieux qu’il y a plusieurs années, que les clubs investissent bien plus dans les catégories de juniors, mais à mes yeux, le manque de confiance à l’égard des joueurs formés au Portugal existe toujours. En gros, on forme de meilleurs joueurs, mais au lieu de parier sur eux, les clubs ne les font pas jouer régulièrement dans les équipes principales. Résultat, nombre d’entre eux partent à l’étranger pour représenter des clubs d’autres nationalités. Il y a un vrai problème de transition entre les catégories de jeunes, où le Portugal a souvent eu des équipes de niveau élevé, et les seniors. Chez les jeunes, les clubs portugais font un super boulot. Les seules plaintes que je reçois de mon côté concernent uniquement cette fameuse transition…

On voit tout de même qu’avec un entraîneur comme Rui Vitória, Benfica donne sa chance à pas mal de jeunes. (Il coupe) Benfica est l’exemple type d’une équipe qui travaille très bien au niveau de la formation. Cette saison, ils récoltent les fruits de ce travail en réussissant à faire monter des éléments formés au club chez les seniors et à faire en sorte qu’ils s’y installent durablement.

Pour en revenir à la transition que vous avez évoquée entre les jeunes et les seniors, comment est-il possible de la faciliter ?Tout simplement en coordonnant les objectifs du centre de formation, à savoir lancer les jeunes joueurs qui ont le niveau pour viser plus haut, et ceux des équipes principales. Le problème, c’est que dans bien des cas, les objectifs de ces dernières passent par le recrutement de joueurs étrangers, et cette politique finit forcément par faire de l’ombre aux espoirs locaux. Si les deux parties ont un projet commun, alors cette phase de transition s’en retrouvera facilitée.

Pour remplacer Thiago Motta, William Carvalho ou Danilo Pereira pourraient bien faire l’affaire. Ce sont deux jeunes, grands, avec une très bonne structure physique et qui savent jouer au football.

La Fédération portugaise de football et l’État portugais ont récemment célébré l’ouverture de la Cidade do Futebol (ville du football), qui s’inscrit une fois de plus dans cette dynamique de formation. En quoi cela consiste exactement ? Je pense que cette initiative va apporter de nouvelles infrastructures qui vont permettre d’optimiser le travail de la Seleção à tous les niveaux. Il manque tout de même pas mal de choses à ajouter dans cet espace, comme un hôtel, un pavillon, pour que les joueurs puissent vraiment rester sur place. Mais je crois que ce sont des questions qui sont déjà prises en considération et qui existeront dans le futur. Quoi qu’il en soit, c’est un gros investissement ambitieux de la part de la Fédération et du gouvernement, et c’est toujours bon à prendre.

Vous avez occupé le poste d’entraîneur d’Estoril à la fin de la Liga Nos 2014-2015. Entraîner, c’est quelque chose qui vous plaît ?J’ai été entraîneur principal d’Estoril pour les onze dernières rencontres de 2014-2015. J’ai une formation d’entraîneur, j’ai certains diplômes et c’est de toute façon une situation que je devais connaître pour avoir une meilleure idée de ce que j’attends des entraîneurs des catégories de jeunes du centre de formation. Donc c’était une étape par laquelle je devais avant tout passer. Je suis formé pour diriger comme pour coordonner ceux qui dirigent.

Que retenez-vous de cette expérience sur le banc d’Estoril ?J’en garde un très bon souvenir. J’ai beaucoup aimé ces quelques mois. J’ai aimé le « feedback » des joueurs quant à mon passage, qui s’est avéré très positif. Le fait qu’ils aient bien réagi à mes méthodes et qu’ils m’aient laissé l’impression d’avoir effectué du bon travail me motive également pour d’autres éventuelles futures expériences. Mais bon, pour le moment je suis concentré sur la formation d’Estoril, des catégories de base du foot féminin aux seniors masculins. Pour le reste, on verra plus tard. Avoir croisé le chemin d’entraîneurs comme Jorge Jesus et Marco Silva vous a aidé pendant ces onze matchs ?Je pense avant tout qu’essayer d’imiter quelqu’un débouche forcément sur de mauvais résultats. Quand j’étais sur le banc, ce n’étaient pas les identités de ces deux entraîneurs qui y étaient représentées. En revanche, tirer parti du meilleur de ces deux excellents entraîneurs, c’est un signe d’intelligence. Je ne dirais pas que je l’ai fait pendant mon passage sur le banc d’Estoril, mais si un jour je devais me servir de certaines méthodes utilisées par Jorge Jesus ou Marco Silva, je n’aurais aucun problème avec ça.

Comment décririez-vous Jorge Jesus et Marco Silva, actuellement deux des meilleurs entraîneurs portugais ?Ce sont deux profils complètement différents. Le premier a énormément d’expérience, l’autre en a moins, mais chacun a son style et a démontré être très performant et capable d’obtenir d’excellents résultats avec plusieurs équipes.

On parle beaucoup de Jorge Jesus comme d’un entraîneur capable de faire franchir un ou plusieurs paliers à des joueurs prometteurs. Qu’est-ce qui, dans son discours ou sa manière de bosser, peut expliquer qu’il réussisse à faire exploser des joueurs comme Coentrão, Matić, Di María ?Jorge Jesus est un entraîneur à la fois très intelligent et très pédagogue, dans le sens où il réussit facilement à transmettre son message aux joueurs. Il est très incisif. Quand il a quelque chose à dire, il n’y va pas par quatre chemins. Et puis sur le plan technique, il a une très grande connaissance du domaine de l’entraînement du footballeur. C’est aussi quelqu’un de très exigeant. Si vous regroupez ces qualités ensemble, vous comprenez mieux comment Jorge Jesus réussit à obtenir le meilleur d’une grande partie de ses hommes.

Vous avez été l’un des derniers joueurs portugais du Paris Saint-Germain. Aujourd’hui, il y a beaucoup de Portugais en Ligue 1, notamment à Monaco, mais toujours aucun au PSG. Ça serait sympa d’en avoir un ou deux dans la capitale, non ?Ça serait bien, oui, surtout par rapport à la communauté portugaise qui réside dans la ville. Pour le reste, il faudrait que ces joueurs apportent une plus-value au Paris Saint-Germain, qui a une équipe vraiment très forte. Il faudrait donc que ce soient impérativement des joueurs qui évoluent régulièrement avec la sélection portugaise. Il y en a par exemple déjà quelques-uns en France qui ont montré toutes leurs qualités en Ligue 1. Pour les autres, je n’en vois pas un seul qui puisse avoir le niveau pour intégrer une structure comme le PSG.

Quels joueurs vous voyez concrètement au PSG ? William Carvalho pour prendre la relève de Thiago Motta dans ce rôle de meneur reculé, ça ferait sens, non ?Oui, pour ce poste, William Carvalho ou Danilo Pereira pourraient bien faire l’affaire. Ce sont deux jeunes, grands, avec une très bonne structure physique et qui savent jouer au football. Pour en revenir aux Portugais de la sélection, il y a aussi une certaine variété de profils qui fait qu’a fortiori, des joueurs doivent bien s’emboîter avec le jeu du Paris Saint-Germain.

Pour en revenir à votre expérience parisienne, vous étiez à votre époque le seul Portugais de l’effectif. Vous ressentiez une attention particulière de la part de la diaspora portugaise ?Oui, complètement. Comme j’ai l’habitude de le dire, j’ai été très heureux à Paris, surtout la première année et jusqu’à mon opération au genou. J’ai ressenti peu de soutien de la part du public, la critique était assez dure à mon égard, mais à chaque moment de ma vie parisienne, je pouvais compter sur le soutien de la communauté portugaise. Quand ils me sollicitaient dans la rue pour me parler, prendre une photo ou demander un autographe, c’était toujours pour me dire quelque chose de positif. Et puis j’étais assez investi dans la vie de la communauté en France. Je suis allé autant que possible à divers événements organisés par les Portugais en région parisienne.

Chaque semaine, je me rendais une ou deux fois à Paris-Bercy pour voir les films en VO. La première fois que j’ai vu un film en français, c’était Spy Game.

Que retenez-vous finalement de votre passage au PSG que ce soit sportivement ou humainement ?J’ai beaucoup apprécié pas mal de mes coéquipiers de l’époque et je suis resté en contact avec certains d’entre eux. Mais je suis obligé de mettre en lumière ma plus grande amitié dans le monde du football, à savoir Gabriel Heinze, qui y est pour beaucoup dans le sentiment positif que je garde de mon passage à Paris. Je ne saurais pas vraiment dire pourquoi on s’est rapidement si bien entendus… On a sans doute une manière d’être et une personnalité similaires. Aujourd’hui, on essaye d’entretenir cette relation amicale. Par exemple, la dernière fois que nous avions l’intention d’aller à Paris, on a fait exprès de faire en sorte de pouvoir s’y croiser.
Et comment va Gabi, alors ?Très bien !

À part Heinze, avec qui vous entendiez-vous le mieux dans le vestiaire du PSG ?C’est assez logique, mais je passais beaucoup de temps avec les communautés lusophone et hispanophone du club. Après, ça ne m’a pas empêché d’avoir d’excellents moments et de me marrer avec les Français comme avec Fred Déhu et Fabrice Fiorèse par exemple. Non, franchement, c’était une excellente expérience pour moi à Paris. Ce n’étaient pas les meilleures années du club, mais l’équipe avait de très grands joueurs.

Et sinon, qui mettait l’ambiance et qui était le patron dans le vestiaire ?C’était assez varié, il y avait trois ou quatre Brésiliens, deux ou trois hispaniques… Ou l’inverse, je ne sais plus. Donc du coup il y avait une bonne ambiance. Après, il y avait évidemment Okocha qui était un bon farceur, et puis il y avait également l’irrévérence de Nicolas Anelka, que j’aimais aussi beaucoup.
Vous n’êtes pas le premier ancien coéquipier d’Anelka à dire du bien de lui. Pourtant, il a une image vraiment mitigée en France… Comment expliquer ce décalage ?Anelka est une personne réservée à sa manière et qui avait besoin, en tout cas à ce moment-là, d’une attention particulière que certains entraîneurs n’ont pas pu ou souhaité lui accorder. Mais ceux qui savaient comment s’y prendre avec lui et d’une certaine manière le gâter pour le motiver auraient sans aucun doute réussi à tirer profit d’un grand joueur.

Vous avez évoqué votre blessure au genou un peu plus tôt. À part cela, qu’est-ce qui explique que votre passage à Paris ne se soit pas déroulé comme prévu ?Ma première blessure a complètement conditionné mon expérience parisienne. Ma deuxième année, celle de la blessure, donc, a été très compliquée. Je jouais souvent avec des douleurs et je n’étais pas du genre à faire attention à moi, dans le sens où même si j’avais mal, je préférais quand même jouer plutôt que de m’arrêter. Ce choix a eu une grande influence sur la suite de mon expérience au PSG. Mais bon, il faut retenir le côté positif, j’ai fait une bonne première saison, j’ai joué comme je devais jouer et je me sentais bien.

Luiz Fernandez croyait beaucoup en vous dès le début…Oui, c’est lui qui m’avait fait venir. C’est une personne pour laquelle j’ai beaucoup d’estime. Je l’apprécie vraiment beaucoup, il a cette pointe de folie qui fait de lui une personne extraordinaire, différente. C’est quelqu’un qui a un très grand cœur.

Au-delà du plan sportif, qu’avez-vous pensé de la ville ?J’ai adoré Paris. Je l’adore toujours. C’est une ville absolument magnifique avec de très jolies façades et elle constitue un immense puits culturel… Il y a des restaurants extraordinaires aussi, je ne l’oublie pas.

Et il y a beaucoup de cinémas aussi. Parce qu’il paraît que vous êtes un mordu du septième art…C’est vrai. Chaque semaine, je me rendais une ou deux fois à Paris-Bercy pour voir les films en VO. La première fois que j’ai vu un film en français, c’était Spy Game, un film avec Robert Redford et Brad Pitt. C’est un film d’espionnage très technique que j’ai donc vu en français (soupirs)… très, très compliqué (il rit). J’ai tenté ma chance même si ça ne faisait que peu de temps que j’étais en France. Mais bon, la plupart du temps, j’optais pour l’anglais que je maîtrisais mieux, même si à la fin, je me débrouillais aussi pas mal en français, donc je pouvais les regarder en VF. Mais c’était vraiment quand j’avais mes petites habitudes à Bercy, où je prenais toujours du pop-corn… Finalement, le seul point négatif là-bas, c’était le chemin du retour sur le périphérique. À l’aller, je pouvais faire Saint-Germain à Paris en 15, 20 minutes, alors qu’au retour je mettais presque une heure à rentrer (il se marre). C’était difficile ! Mais j’en garde maintenant un bon souvenir…

Propos recueillis par William Pereira

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