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Lyon, l’amour en Groupama

Par Mathieu Rollinger
Lyon, l’amour en Groupama

Les supporters lyonnais repartent rarement de Décines comme des âmes en peine. C’est en tout cas ce que laisse penser le classement dévoilé par l’application de rencontre happn, où le Parc OL est le stade européen où les chances de crush sont les plus élevées durant la Ligue des champions. Alors pourquoi, mais surtout comment le formidable outil de Jean-Michel Aulas est-il devenu un haut lieu de la drague ? Enquête.

Ils n’attendaient qu’à être séduits, ce soir-là. À chavirer à la première caresse de Houssem Aouar, à se pâmer devant une frappe sèche de Memphis Depay ou à craquer pour une intervention autoritaire de Jason Denayer. Au coup d’envoi de ce Lyon-Barça, rendez-vous galant européen par excellence, beaucoup de Lyonnais sont alors des cœurs à prendre. Pourtant, à ce même moment, c’est la panique dans la tribune de presse : le réseau Wifi mis à disposition est saturé. Les techniciens dépêchés par le fournisseur d’accès sont alors introuvables, et la 4G est elle aussi trop sollicitée pour offrir une solution de repli. Un faux pas pour un stade qui offrait jusqu’ici un accueil irréprochable.

Mais si la bande passante était aussi encombrée, ce n’était probablement pas à cause de l’activité du président Aulas sur Twitter. Finalement, c’est peut-être l’application de rencontre géolocalisée happn qui peut aujourd’hui apporter un début d’explication. D’après une étude qu’elle a menée, le Groupama Stadium était, lors des phases de poules de Ligue des champions, l’enceinte européenne où ses utilisateurs avaient le plus de chances de « crusher » . Comprendre : que deux personnes présentes dans le même rayon de 250 mètres apprécient réciproquement leur profil virtuel, pouvant ainsi engager une conversation et éventuellement commencer physiquement une amourette.

Match day

Dans ce classement, le complexe de l’Olympique lyonnais devance — dans l’ordre — la Johan-Cruijff Arena de l’Ajax, l’Allianz Stadium de la Juve, le Louis-II de Monaco, le Philips Stadion du PSV, le Wanda Metropolitano de l’Atlético, le Giuseppe-Meazza de l’Inter, le Parc des Princes du PSG, le San Paolo du Napoli et enfin le Bernabéu du Real. Tous ces stades ne bénéficient ni de la même capacité, ni du même bassin de population. C’est pour cela que l’étude porte sur « un ratio crush/utilisateur » , précise-t-on du côté de happn. « C’est un indicateur plus juste, fair-play et transparent que si les calculs s’arrêtaient simplement au nombre total de crushs. » D’où la place respectable de Louis-II. Précision utile : le fait que happn soit une application d’origine française ne biaise pas les résultats, puisque seuls 4 millions des 62 millions d’inscrits dans le monde entier proviennent de l’Hexagone. En revanche, Lyon est une des villes françaises où l’application est la plus utilisée, derrière Paris, mais au coude-à-coude avec Marseille. Alors pourquoi les Lyonnais et les Lyonnaises sont donc plus enclin(e)s à profiter de leur visite au stade pour choper que les Parisien(ne)s, par exemple ?

La première raison de cette spécialité de la préfecture du 69 est peut-être à chercher du côté de la capacité du Parc OL à attirer un public féminin. En dehors d’une sortie du conseiller Bernard Lacombe, qui affirmait à l’époque sur RMC « ne pas discuter avec les femmes de football » , les renvoyant plutôt à « leurs casseroles » , l’Olympique lyonnais mène depuis de longues années une politique d’ouverture envers la gent féminine, que ce soit directement sur le terrain avec le succès que l’on connaît, mais aussi en tribunes. Ainsi, dans un stade flambant neuf, familial, confortable et donc sécurisant, les femmes n’auraient pas peur de venir se mêler aux hordes d’hommes un jour de match. L’an dernier, un espace réservé aux femmes avait même été créé, avec des tarifs attractifs, quand ce n’est pas le club qui invite les sections féminines de la région aux matchs, afin d’encourager la mixité aux alentours du Parc OL. Suffisant pour créer une atmosphère propice à l’amour ?

Foot sentimental

Faut-il mettre dans la balance le spectacle proposé sur le terrain pour soulever un nouveau facteur d’explication à cette humeur badine ? Après tout, nos sens sont plus éveillés quand ce qui nous est servi est de bonne qualité (d’où les techniques des rancards au resto ou au ciné). Alors pourquoi ne pas compter sur une belle partie de ballon pour s’ouvrir à l’autre ? Le problème, c’est que l’Olympique lyonnais, lors des matchs étudiés (Donetsk, Hoffenheim, Manchester City), a disputé une rencontre à huis clos, a concédé trois nuls et marqué seulement 6 buts — ce qui en fait la onzième attaque à domicile de cette C1. Une piste à minorer, donc.

Il est difficile de prouver une corrélation entre le résultat du match et le nombre de crushs. Après tout, on peut très bien se réfugier dans les sentiments amoureux pour se consoler après une contre-performance de son équipe. Ces personnes ont vécu les mêmes émotions durant 90 minutes et peuvent envisager de partager leur passion du foot et de l’OL autour d’un verre ou sous une couette. D’ailleurs, les chiffres ne précisent pas si les utilisateurs ouvrent leur application avant, pendant ou après le match. On sait toutefois que la quête virtuelle peut s’étaler sur une amplitude de 4h30 in situ (1h30 avant le match, les deux heures de match et environ une heure après), alors la géolocalisation est visible par les autres jusqu’au lendemain. Ainsi, les fans les plus concentrés sur le match – oui, parce que l’on peut trouver étrange le concept de passer son temps sur une appli de rencontre pendant un match de C1 – peuvent commencer la recherche de leur âme sœur la tête reposée.

L’olympique du love

Reste à savoir ce que font les personnes qui se rencontrent via l’application et qui décident de se retrouver directement au coup de sifflet final. Pour en mettre plein les yeux à sa nouvelle conquête, la boutique officielle offre un panel assez large de cadeaux. Entre la boule à neige Groupama Stadium à 9,99€, le miroir de sac à main personnalisable au même prix ou encore le pendentif cœur à 24,95€ (presque en rupture de stock ce jeudi sur la boutique en ligne), il n’y a que l’embarras du choix pour en mettre plein les mirettes. Mais pour savoir si une rencontre peut se prolonger au-delà de l’expérience du stade, ce sont les commerçants de quartier qui peuvent témoigner, même si la circulation aux abords du stade est en général restreinte les soirs de match.

Le Rapid’ Flore, situé en bord de rocade, déplore ne recevoir en moyenne qu’un seul client dans ces créneaux horaires. « C’est une bonne idée d’aller au stade avec un bouquet, d’autant plus qu’on peut fournir une petite réserve d’eau pour que les fleurs tiennent le temps du match, assure la responsable. Mais la plupart du temps, nous sommes fermés quand les gens rentrent chez eux. » Sur le retour, l’étape conseillée serait alors de s’équiper de préservatifs pour prolonger l’aventure en toute sécurité. Problème : ni le Parc OL (d’après le site trouverunpreservatif.fr) ni la pharmacie du Prainet, située à 200 mètres de là, ne sont dotés de distributeurs en libre-service. Une manière de supposer que si un parfum d’amour flotte sur le Parc OL, les supporters lyonnais ne seraient ni de grands romantiques, ni des personnes qui sortent couvertes. À moins qu’ils préfèrent seulement attendre le match retour pour passer aux choses sérieuses.

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Par Mathieu Rollinger

Tous propos recueillis par MR, sauf mentions.

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