Lucas Chevalier, héros ailé du derby Lille-Lens

Il fallait le voir haranguer la tribune ouest, au bout des sept interminables minutes du temps additionnel, puis le voir pousser ce qui s’est avéré être le cri de délivrance. Dans sa tunique bleue ornée du numéro 30, Lucas Chevalier ne voit pas que son homologue Brice Samba, monté sur ce dernier coup de pied arrêté, n’est qu’à quelques mètres de lui. Pas sûr qu’il ait en tête une quelconque image, d’ailleurs. Tout simplement car il est sur un nuage : « Je suis très fatigué, j’ai eu tellement de pression pendant le match que tout est redescendu d’un coup », confiait le héros nordiste en zone mixte après la rencontre, lui qui désirait alors seulement rejoindre sa famille quelques étages plus haut. Avec le sourire d’un gamin de 20 ans que personne ne pouvait ôter.

La fierté de Maignan

« S’il vous plaît Lucas Chevalier, bravo, vraiment. Ce qu’il a fait aujourd’hui c’est extraordinaire et c’est un rêve pour lui, surtout contre Lens. » Thierry Henry, consultant pour Prime Vidéo, ne pouvait pas mieux résumer le récital offert par le portier du LOSC et chouchou de Pierre-Mauroy. Les tentatives lensoises cadrées n’ont pas été légion, mais à chaque fois, Chevalier a démontré que son armure était solide. Notamment sur cette mine d’Alexis Claude-Maurice qui filait en pleine lucarne, au cœur de la seconde période, que le dernier rempart nordiste a enlevé d’une belle main opposée. « C’était à l’instinct, confiait l’intéressé,et je dois avouer que je me demandais même où était la balle. » Pas dans ses filets, en tout cas.

Bien avant, en première période, Lucas Chevalier s’était distingué en sortant le penalty mal tiré de Florian Sotoca. À ce moment-là, le seul nordiste présent sur la pelouse ne pense qu’à une chose, ou plutôt qu’à une personne : Mike Maignan. « Au moment du penalty, j’ai pensé à lui, affirmait-il en marge du derby. Dans l’après-midi, Mike Maignan m’a appelé. J’étais en pleine sieste, dans le noir et j’ai répondu. Il m’a mis la pression en me disant :« Vous n’avez pas intérêt à foirer. » » Une victoire, un premier clean sheet cette saison. La mission est accomplie.

Le LOSC dans la peau

Si une victoire dans un derby, le 107^e du nom, a toujours une saveur particulière, il en avait encore davantage pour Chevalier. Plébiscité par les supporters depuis le début de la saison, parfois à outrance, le gardien lillois est conscient qu’il est plus qu’un simple portier. « Ils ont beaucoup confiance en moi, c’est une pression en plus, affirmait Chevalier. Une pression de performance. C’est pas tout d’être sur le terrain, il faut apporter quelque chose en plus. Ils sont très gentils, ça ne me réussira pas toujours, mais ce soir, ce fut le cas dans ce derby. »

Et ce n’est pas la première fois. Pour celui qui aime le LOSC depuis sa tendre enfance, qui est passé par le Pôle Espoir de Liévin, puis par le centre de formation des Dogues, réaliser des exploits face à Lens fait partie de son ADN. « Je me rappelle un derby en U16 où il est décisif en arrêtant un penalty, racontait son père à La Voix du Nord ces derniers jours. Pour lui, c’est un match important, car il sait que ça l’est pour les supporters… Mais on a éduqué Lucas d’une façon qu’il n’ait pas la haine de Lens. C’est une rivalité sportive et ça ne doit pas aller plus loin que ça. Le football, ce n’est pas la guerre. » Que ce soit la guerre ou pas, Chevalier ne ploiera jamais le genou.