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L’OM et la Coupe de France, 34 ans d’abstinence

Quentin Ballue et Léna Bernard
L’OM et la Coupe de France, 34 ans d’abstinence

Longtemps intouchable au palmarès de la Coupe de France du haut de ses dix titres, l'OM est désormais dans le rétroviseur du PSG. Les Marseillais n'ont plus soulevé le trophée depuis 34 ans malgré quatre finales (1991, 2006, 2007, 2016). Une anomalie qui pose la question des priorités entre finir placé en championnat et garnir l'armoire à trophées.

Un Parc des Princes chauffé à blanc, un triplé de Jean-Pierre Papin pour écœurer Jean-Luc Ettori, et une bise du président François Mitterrand. C’était le 10 juin 1989. La bande de Gaëtan Huard, Bruno Germain et Franck Sauzée soulève le fameux trophée, de retour «  à la maison » après treize ans d’infidélité. La dixième Coupe de France de l’histoire de l’OM, à bonne distance de l’ASSE, qui affiche six sacres. Depuis, les Phocéens ont disputé sept demi-finales, pour quatre qualifications en finale et autant de désillusions. Marseille peine à retrouver la recette. Notamment à cause d’un dilemme constamment en tête.

 

Appétit continental

L’objectif numéro 1 des Olympiens, confirmé année après année, reste de se qualifier pour la Ligue des champions. La priorité est donc logiquement donnée au championnat. Le président Vincent Labrune a tenu ce discours auprès d’Élie Baup lors de sa nomination comme entraîneur en 2012. « L’objectif qui était clair et annoncé, c’était d’être en C1, confirme le coach. On était vachement focalisé sur la qualification directe pour la Ligue des champions. Après, en fonction de ce qui se passe, les objectifs se font d’eux-mêmes. C’est le chemin le plus court pour être européen, donc quand vous n’êtes pas très bien en championnat, vous vous rabattez sur la coupe. » À quelques exceptions près, l’OM a toujours été à la lutte pour le podium ces vingt dernières années. D’où des choix à opérer. Parfois drastiques. En 2018, en quarts de finale, Rudi Garcia décide de sortir Florian Thauvin et Luiz Gustavo avant même l’heure de jeu, pour Yusuf Sari (19 ans) et Bouba Kamara (18 ans), alors que le PSG mène 2-0 au Parc des Princes. Un coaching à l’époque critiqué, traduisant autant une forme d’impuissance que le souhait de prioriser d’autres échéances.

Vainqueur en 1989, Eric Di Meco pose un diagnostic similaire sur cette disette : « Le PSG la gagne quatre fois sur cinq, et cette compétition n’est plus prioritaire. L’OM se fait souvent éliminer parce que le coach fait tourner, parce qu’il y a des matchs de Coupe d’Europe qui arrivent derrière ou parce qu’il y a un match de championnat important, c’est souvent le problème. L’OM est souvent passé à la trappe par choix de priorité ou par hiérarchie des matchs dans la gestion d’une saison. » Depuis leur dernier sacre, les Phocéens ont pris la porte quatorze fois avant même d’atteindre le stade des huitièmes de finale. « Aujourd’hui, il faut comprendre les intérêts du foot, enchaîne Baup. La Ligue des champions, c’est une manne financière qui arrive, et vous pouvez attirer de gros joueurs qui veulent participer à cette compétition. C’est l’épreuve phare. » Le vainqueur de la Coupe, lui, n’empoche qu’un peu plus de deux millions d’euros. Pas de quoi faire vivre le club économiquement.

« La plus belle des maîtresses »

Le pragmatisme prévaut ainsi bien souvent sur le romantisme, même si la Grande Dame ne manque pas de charme. Particulièrement sur la Canebière. « Quand on fait le doublé en 1989, ça a un retentissement particulier. Je me souviens encore de la fête, de tout ce qui s’était passé derrière, rembobine Di Meco. La compétition était tellement importante que si on se faisait éliminer tôt, c’était une catastrophe. Ça a toujours eu une résonance particulière ici à Marseille. La Coupe de France, c’était super important. C’était même une ambiance particulière au stade. » C’est aussi avec des cœurs dans les yeux qu’Élie Baup regarde la compétition : « Tous ceux qui l’ont gagnée gardent ça gravé dans leur mémoire, ça les suit. Quand vous êtes en finale, vous avez conscience de l’impact, de la richesse d’une telle coupe, de ce qu’elle représente pour tout un pays. Elle démarre avec tous les amateurs, elle récompense tout le football, de la base jusqu’aux professionnels. Symboliquement, c’est la Coupe du football français, c’est magnifique. C’est la plus belle des maîtresses. Mais elle est difficile à conquérir. »

Elle reste pourtant le titre le plus à la portée de Marseille depuis l’enterrement de la Coupe de la Ligue. Comme l’appuyait Pablo Longoria cet automne, « gagner des titres, ça aide à avoir une mentalité de vainqueur chez les joueurs ». Or, l’OM n’a plus rien gagné depuis 2012. Malgré les épopées européennes, le frisson Bielsa et deux qualifications pour la Ligue des champions sur les trois dernières saisons, la poussière s’est confortablement installée dans la vitrine à trophées. Et le temps commence à se faire long. « Je suis sûr que les dirigeants préféreraient une place en Ligue des champions, mais moi, quitte à choisir, je préférerais que l’OM gagne un titre, tranche Di Meco. On s’en souvient, ça reste dans l’armoire à trophées. La deuxième place, on ne se souvient déjà plus de celle de l’année dernière puisqu’on a été éliminés dès la phase de poules. Une victoire en Coupe de France, on s’en souviendra. Ce que ça génère dans la ville, c’est tellement important. Plein de gamins plus ou moins âgés n’ont jamais vu l’OM soulever un trophée et je trouve ça terrible. » À Alexis Sánchez et sa bande de jouer pour devenir, aux yeux de toute une génération, à jamais les premiers.

Quentin Ballue et Léna Bernard

Tous propos recueillis par QB et LB.

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