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L’horloge de Gasset

Par Maxime Brigand
L’horloge de Gasset

Alors que l'ASSE a poinçonné samedi soir son ticket pour la prochaine Ligue Europa, Jean-Louis Gasset pourrait quitter le club dans les prochains jours. Mais comment en est-on arrivé là ?

Une conférence de presse de Jean-Louis Gasset, et voilà l’observateur en train de jouer au Cluedo. Va-t-il livrer des indices ? Que fera-t-il demain ? Et ses joueurs ? Mais que se passe-t-il dans sa tête, bon sang ? Autant de questions qui empêchent actuellement de respirer les supporters des Verts, mais pas Gasset lui-même. En passant s’exprimer samedi soir, quelques minutes après un brillant succès face à Nice (3-0) permettant à l’AS Saint-Étienne de valider sa présence en Europe la saison prochaine, celui que Loulou Nicollin décrivait comme « un joueur de cartes » a préféré une nouvelle fois étouffer les interrogations sous un coussin : « J’ai le droit d’être ému sans faire de grandes déclarations. Quand vous voyez tout ça, ça fait réfléchir… mais j’ai besoin de dormir. » Moins d’une heure plus tôt, attrapé sur la pelouse de Geoffroy-Guichard par Laurent Paganelli, Jean-Louis Gasset avait également étouffé une question sur son avenir, mais on a senti le bonhomme attrapé aux tripes : « On a un public incroyable. Je l’avais connu un petit peu l’année dernière… Mais c’est pour ça que j’étais resté, pour amener l’équipe en Europe, je voulais connaître ça, voilà. Mon cœur est fatigué… » Et c’est parti pour un nouveau thriller.

La quête des garanties

Un bon thriller, c’est d’abord une intrigue : pourquoi en est-on arrivé là ? Au fond, l’ASSE est quatrième de Ligue 1 et va y rester, va disputer la Ligue Europa la saison prochaine, possède des joueurs qui aiment profondément leur coach… Problème, samedi soir, une scène a attrapé les regards : on y voit Gasset saluer les Magic Fans, puis quitter en vitesse la pelouse alors que le président du directoire des Verts, Roland Romeyer, l’arrête en chemin pour lui faire une bise que l’entraîneur cherche à esquiver. Un indice pour l’intrigue qui nous ramène à l’été 2018, lors duquel celui qui est arrivé en décembre 2017 avait déjà demandé des garanties avant de rester. Car c’est la quête du moment, les garanties, à savoir en langage Gasset un effectif à la hauteur des ambitions du club pour lequel il bosse. « J’ai vu les présidents lundi et on faisait du virtuel, a-t-il expliqué samedi soir. J’avais des choses à leur dire. Ils avaient des choses à nous dire. On a mis les choses à plat. On a décidé de se revoir en début de semaine prochaine. Jouer la Coupe d’Europe, c’est difficile de le faire avec un effectif réduit. On voit des équipes qui manquent leur saison. »

Première chose : cette réunion de lundi dernier, c’est Gasset qui l’a provoqué, l’entraîneur des Verts ayant besoin de savoir rapidement sur quel pied danser alors que Montpellier, via son président Laurent Nicollin, chercherait à le faire revenir sur son banc. Deuxième chose : si l’ancien adjoint de Laurent Blanc l’a fait, c’est parce qu’il voit que les choses ne s’alignent pas comme il le souhaite, la paire Romeyer-Caïazzo lui confirmant ces derniers jours que le jeune William Saliba devrait être vendu cet été et que l’option d’achat pour Timothée Kolodziejczak ne serait pas levée. Ainsi, Jean-Louis Gasset pourrait claquer la porte, ce que son contrat lui permet, lui qui avait négocié la possibilité de lever l’option d’un an supplémentaire si l’ASSE terminait dans les huit premiers de Ligue 1. Drôle de situation.

« Je n’ai pas besoin d’un Oscar »

Alors qu’une nouvelle réunion entre les parties doit avoir lieu lundi, il faut comprendre où en est le film : aujourd’hui, Gasset n’est pas en position de force dans les négociations et se retrouve coincé dans une lutte interne qui pourrait le pousser à repartir dans l’Hérault. Simple, depuis janvier, plus rien ne lui est accordé, que ce soit un stage en Espagne – qui s’est transformé en une virée à Chambon-sur-Lignon, derrière laquelle les Verts ont perdu le derby et se sont fait éliminer de la Coupe de France par Dijon – ou ses souhaits pour renforcer l’équipe, notamment une doublure pour faire souffler Debuchy. Pendant ce temps, l’ASSE a vendu Selnæs en Chine et prolongé Robert Berić alors que les dirigeants verts avaient tout fait pour s’en débarrasser. En d’autres termes, Gasset n’a plus la main et doit se contenter d’agir, sans maîtriser, tout en étant au centre des bagarres claniques entre Caïazzo, Romeyer et Paquet. Il ne faut pourtant pas oublier qu’on parle d’un type qui a fait remonter l’ASSE de la seizième place de Ligue 1 à la quatrième en dix-sept mois, qui avance avec humilité et ne demande aucune récompense ( « Si on me donne à la fin de la saison la lampe de mineur, ça sera le plus beau des cadeaux. Je n’ai pas besoin d’un Oscar. Ça voudra dire qu’on est arrivés collectivement là où on devait arriver. » ), mais à qui surtout certains joueurs (Cabella, Debuchy…) ont lié leur avenir. C’est ce qu’expliquait Yann M’Vila cette semaine à France Bleu Loire. Voilà aujourd’hui où en est l’enquête : le dénouement est proche, et il risque de faire des dégâts.

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