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« Les Thaïlandais sont un peu les MacGyver de la vraie vie »

Propos recueillis par Pablo Garcia-Fons
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Flavien Michelini est un mec normal. Milieu offensif plutôt doué avec ses pieds, écœuré par ses piges en CFA et la déroute financière de Gueugnon, le mec a préféré l'exil au chômage, direction l'Asie, Singapour, puis la Thaïlande. À des années lumières des millions d'Anelka et de Drogba. Entretien 100% exotisme.

T’as été formé à Gueugnon, avant d’aller taper la balle à Compiègne et à Romorantin. Puis en 2010, direction Singapour. Qu’est-ce qui t’a poussé à faire le grand saut ? Ça faisait plusieurs années que je jouais en CFA et je n’avais pas de pistes en National. C’était un peu la lose. J’ai un pote qui m’a parlé du projet Singapour, ça m’a tenté. Du coup, le pote en question a parlé de moi à son coach là-bas et mon profil l’a intéressé. Deux semaines plus tard, j’étais dans l’avion.

À Singapour, tu as joué au FC Étoile, un club made in France à 10 000 bornes de nos frontières, c’est quoi ce délire ?
Vu qu’à Singapour, le football n’est pas trop développé, la Fédération locale a décidé d’autoriser des équipes étrangères à intégrer le championnat du pays. Du coup, c’était un peu comme jouer en France, mais sous 30 degrés à l’ombre. Quand j’ai quitté la France (fin janvier 2010, ndlr), il neigeait et, en arrivant ici, il faisait une chaleur écrasante. Ça a fait un choc. Sinon l’ambiance, c’était un peu la colonie de vacances.

Singapour, c’est une ville et douze équipes, ça fait quoi de jouer un derby à chaque match ?Le football n’est pas populaire là-bas. Chaque équipe tourne avec environ 100 ou 200 supporters. Du coup, on ne peut pas vraiment parler de rivalité ou de derby. Il y a trois ou quatre « grosses équipes » qui se tirent la bourre en haut du classement. Pour les autres, le niveau est vraiment très faible.

On dit que Singapour est un des pays les plus stricts du monde. Tu faisais quoi quand tu ne jouais pas au foot ? T’as quand même la liberté de faire à peu près ce que tu veux. Il faut juste faire attention à deux, trois trucs. Par exemple, si tu jettes un papier par terre dans la rue ou si tu manges ou bois dans le métro, tu risques gros. Sinon, il y a aussi des endroits pour sortir et faire la fête, hein. Ce n’est pas une dictature.

Ça fait quoi de passer un an sans mâcher de chewing-gums ?Heureusement, je ne suis pas trop fan des chewing-gums. La vraie histoire, c’est qu’une fois un chewing-gum a bloqué la fermeture des portes du métro, du coup les autorités les ont interdits. C’est sûr que ça nous paraît un peu fou, à nous, mais c’est comme ça. En tant qu’étranger, tu dois respecter les particularités locales, même si ça te paraît un peu étrange.

Le retour en France, à Gueugnon, c’était le mal du pays ?Non, j’étais vraiment bien là-bas. C’était une bonne expérience, on a gagné le championnat. Vu que mon contrat n’était que d’un an à la base, j’attendais une autre proposition, de mon club ou d’un autre à Singapour. Finalement, rien n’est venu et je suis rentré en France, j’ai un peu perdu tout contact avec Singapour. Gueugnon m’a proposé une pige en National à ce moment-là et, comme ma mère et ma copine habitent dans la région, j’ai dit oui.

Puis hop, la Thaïlande ! Tu bosses pour le Guide du routard ou bien ?
J’ai vraiment apprécié la mentalité en Asie, donc je n’étais pas contre l’idée d’y retourner. Quand j’étais à l’Étoile de Singapour, on avait joué contre les Bangkok Glass en match de coupe. Apparemment, ils se sont rappelé de moi au moment du recrutement, puisqu’ils m’ont contacté directement par Facebook.

Par Facebook ?Quand Tony Vairelles dépose le bilan à Gueugnon, on n’était plus payés depuis plusieurs mois, donc j’étais un peu ric-rac financièrement. J’avais quelques touches avec un club chypriote, mais rien de plus. Un matin, je me lève, je vais sur mon Facebook et j’avais un message d’un recruteur des Bangkok Glass. Il voulait que j’aille faire un essai chez eux. J’ai dit que je n’étais pas très chaud pour un essai. Alors ils m’ont proposé un contrat direct, avec une belle prime à la signature de 15 000 euros. J’ai sauté sur l’occasion.

Tu signes donc au Bangkok Glass. Vous avez un surnom que je trouve super classe : « les lapins » . Tu sais d’où ça vient ? Ici en Thaïlande, la grande majorité des clubs se donnent des noms d’animaux. Il y a des tigres, des requins et nous, on est les lapins. C’est sûr que c’est un peu naze comme surnom, mais on est des lapins méchants, donc ça va. Et puis, contrairement à Singapour, on a des vrais supporters ici. Des mecs qui chantent au stade et font des heures de car pour les déplacements dans le nord du pays.

Et sinon, le foot là-bas, ça se joue aussi avec les pieds ? J’ai été agréablement surpris par le niveau. Quand je dis qu’en Thaïlande ça joue bien, les gens pensent en général que je me paie leur tête, mais sincèrement ça joue vraiment pas mal du tout. J’ai joué en National et je peux te dire que les gars ici font des trucs qu’on ne verrait pas en National. C’est très technique, mais tactiquement c’est vite n’importe quoi. Les matchs se déroulent en général tous de la même manière : ça commence avec de la rigueur, mais au fur et à mesure que le match s’emballe, ça devient du football spectacle à la Olive et Tom. Pour donner une idée, un 4 – 4 score final, c’est très courant. C’est sûr que ce n’est pas la Ligue 1, mais c’est un football qui me plaît parce que c’est tout pour l’attaque. Moi, en tant que milieu, je me fais plaisir, y a plein d’espace pour jouer.

La nuit thaïlandaise, ça a la réputation d’être un sacré bordel, tu confirmes ?Autant Singapour c’était strict, avec des règles à respecter, autant ici tu vois tout et n’importe quoi. Moi, je ne suis pas trop du genre à faire le fou tous les soirs, mais j’ai des potes dans l’équipe qui m’ont raconté des trucs de malades. Du genre grosses orgies.

Ping-Pong show et Lady Boys, ça te dit quelque chose ?Ping-Pong show, je n’ai pas testé. Il paraît que c’est spécial et un peu dégueulasse, mais que c’est un truc à voir, donc je ne sais pas trop. Par contre, les Lady Boys, ça m’a vraiment impressionné parce qu’il y en a énormément. Au début, tu regardes, tu trouves ça bizarre, mais maintenant je ne fais même plus attention. Les types ont une vie normale, ils sortent avec leurs potes, ils travaillent. Pour ça, la Thaïlande, c’est bien plus ouvert que la France.

T’as des anecdotes marrantes à nous raconter ? Je ne devrais pas en rire, mais pendant les inondations, j’ai vu des trucs trop drôles. Par exemple, un jour je sors de chez moi et je croise un mec qui avait transformé sa baignoire en barque pour circuler dans les rues. Les inondations, c’était vraiment la galère, moi je flippais à mort, mais eux non, ils étaient tranquilles. Ils se débrouillent toujours, même quand c’est la merde. C’est un peu les MacGyver de la vraie vie.

Avec l’arrivée d’Anelka et de Drogba en Asie, tu n’as pas l’impression d’avoir lancé une mode ?Je ne sais pas si j’ai lancé une mode. Ce qui est sûr, c’est qu’ils ne viennent pas pour le même salaire. Après, financièrement, je ne vais pas me plaindre, la vie est vraiment moins chère ici, je peux mettre de l’argent de côté. Et puis, avec l’Euro qui baisse en ce moment, c’est très bon pour moi !

Ton projet, ça reste toujours de revenir en France ou t’as tiré un trait sur le pays ?Mon contrat se termine au mois de décembre. Je vais voir, je suis ouvert à toutes les possibilités. Entre poursuivre ici et revenir en France, je n’ai pas vraiment de préférence. Et puis, pourquoi pas aller voir encore ailleurs, histoire de rajouter un autre chapitre à mon Guide du routard.

Propos recueillis par Pablo Garcia-Fons

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