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Les joueurs de football ont-il besoin de cracher pendant les matchs, pour leur santé ?

Par Florian Cadu
Les joueurs de football ont-il besoin de cracher pendant les matchs, pour leur santé ?

Selon le chef du comité médical de la FIFA Michel D'Hooghe, l'instance songerait à interdire les crachats des footballeurs pendant les matchs pour réduire les risques de propagation du coronavirus. Pour chaque mollard envoyé sur la pelouse (ou ailleurs), les joueurs écoperaient alors d'un carton jaune. Mais est-ce que ce geste, totalement démocratisé dans le monde du ballon rond, est nécessaire physiologiquement parlant ? Ceux qui éjectent leur salive par la bouche se font-ils du bien en se comportant ainsi, et en ont-ils vraiment besoin ?

Mine de rien, les footballeurs sont loin d’être épargnés durant cette pandémie de coronavirus. Outre les cas de contamination, les joueurs sont dans l’obligation de gérer une période particulière : privation d’entraînement et de compétition, confinement à domicile imposé, enfants à garder, absence d’applaudissements à leur encontre, dons financiers ou matériels à réaliser, salaire à diminuer… Et voilà que maintenant, un de leur geste préféré sur le terrain est menacé lors de la prochaine reprise : il paraît que le crachat pourrait être interdit, quand la balle aura de nouveau le droit de rouler. Cessons le sarcasme, et venons-en au but : le crachat, hyper démocratisé dans le monde du ballon rond et adopté par une grande majorité de footeux pendant les matchs, est dans le viseur des autorités.

Dans les colonnes du Telegraph, le chef du comité médical de la FIFA a ainsi soumis l’idée de sanctionner d’un avertissement tout auteur de mollard envoyé sur la pelouse (ou ailleurs). Avec pour objectif de diminuer les potentiels risques de transmission du Covid-19, la salive pouvant vraisemblablement rester des heures sur le gazon et se transformer en dangereux vecteur de propagation : « C’est une pratique courante dans le football, et ce n’est pas très hygiénique. Quand nous recommencerons, je pense donc que nous devrions éviter cela au maximum. La question est de savoir si cela sera possible. Les arbitres pourront peut-être donner un carton jaune. C’est insalubre, et c’est un bon moyen de propager le virus. »

Grippe porcine et surplus salivaire

Pourquoi pas, après tout ? En 2009 déjà, durant l’épidémie de grippe porcine, les autorités sanitaires d’outre-Manche déconseillaient la chose. Mais avant d’opter pour la répression, encore faut-il comprendre pourquoi les joueurs sont à ce point addicts à la projection – consciente ou réflexe – de liquide biologique par voie buccale. Car si certains s’en servent pour provoquer ou humilier l’adversaire, la plupart des fautifs balancent leur glaire sur la pelouse sans agressivité aucune. Sorte d’antistress ou sale manie psychologiquement importants, le crachat aide-t-il surtout à se sentir mieux physiquement ? Autrement dit, son omniprésence peut-elle être expliquée par une cause physiologique ?

«  Le sport et la tension développent les sécrétions organiques de toutes sortes, notamment salivaires. Ce qui justifie un tant soit peu les nombreux crachats que les téléspectateurs peuvent observer chaque semaine », démarre le docteur Corinne Eloit, oto-rhino-laryngologiste à Paris. Même son de cloche chez son confrère du centre hospitalier universitaire de Tours, le professeur Sylvain Morinière : « L’activité physique intense augmente le flux d’air par la bouche, et non par le nez qui est trop étroit pour permettre d’avoir un gros débit d’air dans les poumons lors d’un exercice éprouvant. Conséquence : l’air est plus sec et plus frais lorsqu’il entre dans les poumons, ce qui assèche la bouche et provoque en réaction une salive plus importante. » N’en déplaise à ceux qui trouvent ça immonde, l’augmentation de la production de salive constitue donc un réel élément en faveur du mollard. En apparence, en tout cas.

Petit sacrifice, grand progrès ?

Sauf que pour contrer ce surplus de salive qui n’est pas forcément destiné à terminer sous les crampons, une autre solution existe : le conserver dans son organisme en l’avalant, tout simplement. « Le sportif en effort intense déglutit beaucoup moins qu’habituellement, d’où une accumulation de salive dans la bouche. Mais il peut très bien décider de l’avaler s’il le souhaite plutôt que de la cracher, pendant les phases de repos par exemple, ajuste Sylvain Morinière. Cela réclame bien entendu un effort un peu plus important, mais c’est une question d’habitude. » Et la pelouse, alors ? N’aurait-elle pas un rôle dans toute cette histoire, ce qui éclaircirait en partie pourquoi le mollard s’est davantage installé dans le foot que dans d’autres disciplines ?

« L’herbe n’entraîne aucune majoration de salive, sauf en cas d’allergie », stoppe net l’ORL. Lequel conclut : « Ce n’est pas un acte gratuit, mais ce serait tout à fait possible d’interdire le crachat dans le foot. Au tennis, au judo, au basket, dans l’athlétisme en salle… Personne ne crache, à ma connaissance ! Il n’y aurait aucun danger pour les joueurs, personne ne s’étoufferait. » Décidément, les spécialistes de santé ne laissent en ce moment rien passer à Cristiano Ronaldo et compagnie. Une biscotte pour digérer tout ça ?

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Par Florian Cadu

Propos de CE et SM recueillis par FC

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