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Les 8 vies de José Anigo

Par Swann Borsellino et Raphael Gaftarnik
Les 8 vies de José Anigo

Jeudi, José Anigo tiendra une conférence de presse pour (très probablement) annoncer son départ de l'OM après des années de service. Des années, au cours desquelles il aura endossé autant de rôles que pris de coups. Retour sur le parcours d'un Olympien pas comme les autres.

1983 – 1984 : l’épopée des Minots

Cette année-là, les minots jouent pour la première fois. José Anigo ? Le public ne le connaît pas. Platini va ramasser l’Euro avec l’équipe de France. Quelle année, cette année-là ! Dans le groupe A de la deuxième division, l’Olympique de Marseille profite d’un mélange malin entre vieux briscards et jeunes loups (Anigo, Lopez, Pascal…) pour dégainer une saison folle : 22 victoires, 12 nuls, 2 défaites, 92 buts marqués pour 32 encaissés. Un exercice réussi qui a pourtant commencé par un nul face à Nice et une défaite à La Roche-sur-Yon. Entraînés par le jeune Roland Gransart et portés par l’immense Saar Boubacar, les coéquipiers d’un José Anigo chevelu et titulaire emmènent l’OM vers l’élite après quatre longues années passées dans l’antichambre du foot français. Sa vraie réussite sportive.

2001 : premier intérim comme entraîneur et il envoie chier Tapie

Au printemps 2001, l’OM est embourbé en championnat. Naviguant dangereusement avec la zone de relégation, Robert Louis Dreyfus en appelle à l’inénarrable Bernard Tapie, en qualité d’actionnaire associé en charge du sportif. Avec Tomislav Ivić dans ses bagages, Nanard évite de justesse la descente, mais est confronté aux problèmes de santé de l’entraîneur croate. Contraint de lui trouver un remplaçant pour préparer l’exercice 2001/2002, il convoque le responsable du centre de formation, un certain José Anigo, qui s’installe pour la première fois de sa carrière sur le banc de l’OM. L’intérim sera court (4 matchs), mais surtout marqué par les conflits. Face à un Tapie qui souhaite maîtriser jusqu’à la composition d’équipe, Anigo ne plie pas, refusant de diriger l’entraînement ou arguant du fait qu’il n’est pas « magicien » . Courroucé, Bernard agit : l’éphémère coach est licencié pour « n’avoir pas respecté ses consignes » .

2004 : il va en finale de la Coupe UEFA (et en costard)

15 janvier 2004. Alain Perrin est remercié et José Anigo entame le deuxième intérim de sa carrière phocéenne. Pas le plus dégueu. Décevant en championnat, cet OM va faire de la Coupe de l’UEFA sa chose. Avec une équipe de besogneux à son image, José fait sa révolution en costume sur les bancs du Vieux Continent. Marlet, Mido, Ecker, Dos Santos, Beye, Van Buyten, Flamini, N’Diaye et évidemment Drogba, auteur de 30 buts cette saison. Le casting vaut ce qu’il vaut et décroche une finale de C3 après avoir tapé Newcastle lors d’un soir dont le Vélodrome, qui enregistre alors son record d’affluence, se souviendra. Troisièmes d’une poule de C1 compliquée (Porto, Real Madrid, Partizan Belgrade), les hommes de José s’inclinent face au Valence de Benítez, à Göteborg. La faute à Pierluigi Collina, qui expulse Barthez et offre un penalty à Mista et compagnie. Une histoire de chauves dont ne se remettra pas José. Désormais, ce sera le jogging.

2004 : la démission après deux défaites contre Paris

Malgré ses bonnes performances, notamment européennes, pour sa deuxième expérience sur le banc, José Anigo va appréhender de la manière la plus sèche l’importance d’un Classico. Ou plutôt de deux. À l’hiver 2004, le hasard du calendrier fait qu’Olympiens et Parisiens se retrouvent en Ligue 1, puis en Coupe de la Ligue. Battu sur un but d’Édouard Cissé le 7 novembre 2004 en championnat (2-1), l’OM s’incline de nouveau au Vélodrome après avoir mené 2-0. Une 8e défaite consécutive face à l’ennemi qui sera fatale à José, démissionnaire dans la foulée et victime du talent aussi soudain qu’éphémère de Branko Bošković et Bernard Mendy.

2006 : il revient à l’OM en tant que directeur sportif

Un intérim, un peu de boulot, puis une démission. On ne parle pas de la vie professionnelle d’un homme qui aime jouir des allocations chômage, mais de la trajectoire de José Anigo à l’Olympique de Marseille. Du genre à ne pas badiner lorsqu’il est impliqué, José fait un retour en fanfare au sein de son club de cœur. En dépit d’une cohabitation musclée avec Jean Fernandez, le néo-directeur sportif de l’OM participe au regain de forme du club. Les arrivées de Mandanda, Ribéry ou encore du crack Mamadou Samassa ne sont pas étrangères aux résultats en amélioration du club de la cité phocéenne. Cela étant, Jean Fernandez quittera le club en fin de saison. Certainement un hasard.

2012 : le clash avec Deschamps

« Il y a deux sortes de directeurs sportifs : ceux qui font l’intérêt du club et de l’entraîneur en poste ou ceux qui font leur propre intérêt. S’il a été à l’origine de mon départ ? Oui, c’est une différence profonde, voilà. Après, il y a aussi des intérêts qui sont différents. Ça peut arriver. Mais il y a des choses qui ont été dites, qui sont assez graves pour moi et qui ne m’étaient jamais arrivées depuis 25 ans que je suis dans le milieu pro. » Fin 2012, au micro de beIN Sports, Didier Deschamps règle ses comptes. Quelques mois après avoir délaissé le banc de l’OM, avec lequel il a rempli l’armoire à trophées, DD vise clairement son ennemi intime. José Anigo, directeur sportif aux attributions manifestement trop élargies au goût du coach, le pousse à déposer le feutre olympien pour s’en aller manier celui des Bleus. Et Élie Baup débarqua.

2013 : l’année galère

Une année en enfer. Cela aurait pu être le titre d’un film avec Bruce Willis qui se terminait bien, mais il s’agit là de la vraie vie. Le personnage principal s’appelle José Anigo et, cette fois, il n’y a pas de happy ending. Mis sur écoute, le directeur sportif est accusé en février d’avoir des liens avec le grand banditisme. Les médias parlent notamment de commissions sur certains transferts. En avril, il est accusé de propos terribles à l’encontre de Robert-Louis Dreyfus suite à la parution du livre Histoire secrète de l’OM. Enfin, le 5 septembre, Adrien, son fils, est abattu par balle en pleine rue à Marseille, alors qu’il sortait de sa voiture de location.

2014 : le dernier intérim

Anigo entraîneur : acte 3. Marqué par le zéro pointé en Ligue des champions et la frilosité affichée par Élie Baup, le public marseillais réclame du changement. Il n’aura que José Anigo. En décembre, l’éternel intérimaire s’installe sur le banc du Vélodrome, faute de meilleur remplaçant. Comme son prédécesseur, il peine à mettre en place une équipe type, bousculant les schémas sans pour autant chambouler les résultats. Ouvertement critiqué, il est rejoint par Albert Emon sans que l’OM ne trouve les ressources suffisantes pour aller tutoyer les places européennes. Une dernière pige pleine de souffrance pour un homme dont personne n’a jamais voulu, mais qui s’est si souvent immiscé sur le terrain. Avec l’arrivée prochaine de Marcelo Bielsa, José Anigo a annoncé « vouloir sortir du contexte marseillais pour se reconstruire » . Un énième aller-retour entre les projecteurs et les coulisses. Last but not least ?

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