Le Real Madrid promulgue la règle du bus à l’extérieur

Les plus attentifs et les maîtres de la mémoire visuelle se souviendront peut-être des quelques tentatives madrilènes au Parc des Princes. Pour les autres, difficile de se remémorer une seule des trois frappes merengues inscrites au tableau des statistiques (aucune cadrée). Et pour cause, le Real Madrid a débarqué à Paris avec la ferme intention de se recroqueviller dans sa moitié de terrain, volonté forcée par la qualité offensive parisienne, mais aussi par l’évolution du règlement UEFA, permettant aux formations visiteuses de ne prendre aucun risque.

Carlo minimaliste

Dans une partie abandonnée après une quinzaine de minutes, le Real Madrid de Carlo Ancelotti s’en est remis à de stricts fondamentaux jusqu’au temps additionnel. Dans une dynamique peu favorable (une seule victoire sur les quatre derniers matchs) et diminué par les baisses de régime prévisibles de Luka Modrić, Vinícius Júnior ainsi que la longue absence de Karim Benzema, le technicien italien a préféré joué la carte de l’ultrasécurité face au Paris Saint-Germain. Un schéma illustré dès l’entame de partie par les replis incessants de Marco Asensio, en soutien de Dani Carvajal, et le coaching tardif d’un coach en quête de stabilité (entrée de Rodrygo à la 72^e minute, suivi d’Eden Hazard à la 82^e).

Une donnée fonctionnelle, portée par l’excellente prestation du duo Éder Militão-David Alaba et le léger déchet technique parisien, en manque d’efficacité aux abords de la surface jusqu’à l’entrée de Neymar. À l’instar du Stade rennais ce week-end, le Real Madrid s’est donc protégé au maximum, avec le vœu pieux de faire du temps un allié. De quoi rendre difficile, voire impossible, une analyse des performances de Vinícius ou Benzema. Le raisonnement pragmatique d’un Ancelotti se rappelant aux vieux systèmes de sa Serie A des années 1990, qui aura (naturellement) fini par craquer à la 90^e+4, conséquence d’une perte de balle au milieu de terrain et d’un déséquilibre défensif logique. L’exact scénario vécu par les Rennais ce vendredi.

Real politik

Avant de vouloir faire corps avec le chronomètre, les Madrilènes ont surtout cherché à retarder l’échéance. Cette même échéance, biaisée par un argument de prime abord surprenant, mais tout aussi prégnant : la suppression du but à l’extérieur. En effet, se sachant « à l’abri » d’une course à la remontée en cas de grosse défaite, les hommes de « Carletto » ont fait de cette réforme un appui quelque peu malsain, se prémunissant d’une course effrénée vers les buts de Gianluigi Donnarumma afin de prendre l’avantage, chose qui aurait certainement été le cas une saison en arrière.

En ne s’inclinant « que » d’un but, et malgré la frustration de ne pas avoir accroché le nul, les Madrilènes savent effectivement désormais qu’une victoire au retour leur offrirait, dans le pire des cas, une prolongation. De quoi rebattre les cartes, mais également admettre des interrogations et un scepticisme légitime sur la stratégie concoctée par la Maison-Blanche, loin de ses standards et décevante en tous points. « Il n’y a pas à se cacher. C’est rageant d’encaisser un but à la dernière minutes, mais loin de tout cela, c’est le contenu qui n’a pas été suffisant, a glissé l’héroïque Thibaut Courtois en zone mixte. Ce match a été mauvais ! » Dans la position de la proie durant plus de 90 minutes, le Real Madrid aura donc pour obligation de se muer en chasseur dans vingt jours à Santiago-Bernabéu. Et c’est tout ce que le football demande.