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Le Maroc, l’autre royaume du Real Madrid

Par Farouk Abdou, au Maroc
Le Maroc, l’autre royaume du Real Madrid

L'entrée en lice des hommes de Carlo Ancelotti dans le dernier carré du Mondial des clubs va permettre de mettre en lumière un phénomène peu médiatisé, mais dont l'ampleur dépasse l'entendement au Royaume chérifien : une passion obsessionnelle pour le foot espagnol, Real et Barça en tête. Mardi soir, les Merengues vont avoir un aperçu spectaculaire de l'amour fou dont ils font l'objet au Maroc.

Il n’y a pas 36 endroits pour repérer les signes extérieurs d’une ferveur. En ce samedi 6 décembre, le Ballon Ovale, sympathique petit bar à Casablanca au décor rugbystique, fait salle comble pendant la facile victoire du Real Madrid face au Celta Vigo (3-0). Samir, maillot vintage floqué Hierro sur les épaules, scande : « C’est comme ça partout au Maroc. Tu serais venu il y a deux heures, t’aurais trouvé du foot marocain et anglais, et le bar complètement vide. À cet instant précis, lesMadridistasont contents, les pro-Barça sont dégoûtés. Personne n’est neutre chez nous. T’aurais dû voir ça le jour du Clásico : le pays tout entier ne respire plus. » Les jours de Real-Barça, les Marocains n’ont d’yeux que pour Messi et Ronaldo, et même le football local est contraint de se plier à cette réalité. Le 21 octobre dernier, les responsables du Wydad Casablanca demandent à la Fédération royale de décaler leur rencontre de championnat face au CR Al Hoceima. Motif : le coup d’envoi du match est prévu une heure seulement avant le Clásico. « La recette du match doit permettre d’aider un ancien joueur du club criblé de dettes, le stade doit faire le plein. Si on joue en même temps que Real-Barça, c’est perdu d’avance » déclare un responsable du Wydad. Une histoire qui pourrait sembler surréaliste vue d’Europe, mais qui, au Maroc, est d’une extrême banalité.

Hadji et Naybet en têtes de gondole

L’intérêt des Marocains pour le football ibérique remonte à plusieurs décennies, et cette passion a traversé les générations. Son point de départ a été la Coupe Mohammed V, comme l’explique Taieb Smili, porte-parole de la Pena Casa Madridista : « Entre 1962 et 1989, cette coupe a permis d’inviter les plus prestigieux clubs du monde au Maroc. Les gens ont été séduits par Kopa et Di Stéfano et se sont échinés à transmettre cet amour du beau jeu à leurs enfants. » Plusieurs facteurs ont ensuite contribué à entretenir le contact : à partir des années 70, la télévision locale retransmet la Liga gratuitement : « Le match du samedi soir en noir et blanc, c’était l’événement de la semaine ! Par ailleurs, la proximité géographique a permis aux régions du Nord d’en profiter encore plus. Les antennes télé ont rendu les villes de Tanger et de Tétouan complètement folles ! » , détaille Taieb Smili. Les nineties amplifient cette tendance, avec l’avènement d’une génération dorée de footballeurs marocains qui brille particulièrement en Espagne, avec Hadji et Naybet pour têtes d’affiche.

Deux éléments importants vont consolider de manière durable le lien entre les deux pays au milieu des années 2000. Tout d’abord, le déclin inexorable amorcé par le football marocain : le championnat et les Lions de l’Atlas se sont lentement délités. La faillite, aussi bien au niveau des résultats qu’au niveau de l’image, a éloigné le public du football marocain. Les jeunes cherchent des stars et des valeurs auxquelles ils peuvent s’identifier, et le foot espagnol leur a fourni ce qu’ils veulent. Enfin, les bouquets de TV par satellite démocratisent l’accès au football mondial sur tout le territoire. Même les endroits isolés et les zones rurales. Y compris dans des hameaux reculés qui ne disposent pas d’accès à l’eau potable, l’ART et Al Jazira Sports – ancêtres de beIN Sports – veillent au grain pour que les populations s’abreuvent de foot à outrance, comme en témoigne cette anecdote vécue par Amine Birouk, rédacteur en chef à RadioMars, alors qu’il couvrait le rallye des Gazelles en 2004. Le journaliste arrive dans un village paumé au milieu de nulle part au sud de Zagora. « Je débarque dans le seul troquet du coin, le maximum que je pouvais espérer, c’est boire un café en écoutant la radio. Et là, quarante gamins berbères assis par terre les yeux rivés sur un match du Real à la télé. Pas un mot d’arabe ni de français, les seuls mots compréhensibles sont les « Zidane », « Raúl », « Figo » qui fusent de partout. En plein Sahara. C’était de la folie furieuse. »

Le plus grand tifo consacré au Real à l’étranger

La Pena Casa Madridista est la dernière née des 6 penas existant au Maroc, parmi les 2300 sévissant sur le globe. Un groupe Facebook comme point de départ et une famille soudée de plus de 600 membres aujourd’hui. La majorité des membres vient d’une classe sociale plutôt aisée, regroupant cadres, professions libérales et étudiants, des catégories de personnes qui, dans leur grande majorité, prônent une passion forte, sans dépasser les bornes, avec une charte de fair-play très stricte. En parallèle, cette association a beaucoup oeuvré pour la reconnaissance des communautés de supporters marocains par le Real et organise des rassemblements à chaque match, pour se transformer – aussi – en kop enragé de la première à la 90e minute. « On suit le club depuis des années, il nous procure des émotions uniques et il fait partie de notre quotidien. Cette passion, on la voue à une institution. Ça n’a ni religion ni consonance politique, et ni nationalité, n’en déplaise à nos détracteurs » déclare Younes Elkhiry, président de la Pena, faisant référence à ceux qui, au Maroc, accusent ces supporters acharnés de se sentir plus espagnols que marocains. Pour la venue de leurs idoles, les membres de la Pena ont décidé de faire les choses en grand à Marrakech : un premier tifo de 2400 mètres carrés pour la demi-finale, et un second de 3000 mètres carrés en cas de finale. Jamais dans son histoire, le Real Madrid n’avait bénéficié d’une animation d’une envergure similaire lors d’un match officiel hors Espagne. Mais pour certains, c’est l’occasion d’une vie de voir en vrai ce maillot blanc mythique, et ils ne lésineront pas sur les moyens pour faire de cet événement un souvenir inoubliable.

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