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Le foot amateur à l’arrêt pendant la finale

Par Timothé Crépin
Le foot amateur à l’arrêt pendant la finale

Alors que beaucoup de matchs étaient programmés sur les terrains de l'Hexagone, il n'y aura quasiment aucune rencontre disputée en même temps que la finale de la Coupe du monde entre l'Argentine et la France, ce dimanche après-midi. Voici comment le foot amateur s'est organisé pour ne pas rater cette affiche.

« Coach, je ne me sens pas bien. Je ne pourrai pas être là pour le match cet après-midi. » On parie que si le football amateur français n’avait pas un poil devancé les événements, plusieurs SMS de ce type auraient atterri sur les téléphones des différents entraîneurs aux quatre coins de la France, toutes divisions confondues. Car, à l’instar de la Ligue 1 du dimanche après-midi, l’horaire de la finale entre l’Argentine et la France (16 heures) est loin d’être une passe décisive pour le monde amateur et les divisions de jeunes, dont plusieurs matchs sont prévus sur ce créneau habituel. Ou étaient prévus.

« Les joueurs auraient été blasés »

Car depuis la qualification de Kylian Mbappé et consorts pour la finale, il a fallu discuter entre clubs, et vite. Même si certains ont préféré anticiper un maximum, finale ou pas finale. Du côté de la Ligue Centre-Val-de-Loire, on explique par exemple que les clubs ont été prévenus dès lundi d’un changement d’horaire. Autre cas tendu : ce match de District sur la Côte d’Azur entre le stade olympique Roquettan et le club de football de La Colle sur Loup (D3). Coup d’envoi programmé à 15 heures. C’est foutu pour la finale. « C’est nul, peste Filippo Rossi, président des visiteurs, vendredi matin. Pour le huitième de finale (NDLR : face à la Pologne, 3-1), ça avait été repoussé… » Deux heures plus tard, un SMS arrive : « On vient d’avoir la validation du district après discussion avec le club adverse : match remis au 29 janvier. Bonne journée. » Sauvé. « Les joueurs auraient été blasés,promet Alain Martinez, entraîneur du SO Roquettan. Jouer plus tôt, ce n’était pas possible, il y avait déjà le match de notre équipe 2. Sinon c’était 9 heures du matin… » Le coach ne veut même pas imaginer si le match avait été maintenu : « On aurait eu beaucoup d’absents. Même moi. » Au sein de la Ligue Méditerranée, on explique que ce sont 15 à 20 matchs qui ont vu l’horaire ou le jour du coup d’envoi changer.

Lors de Maroc-Portugal, on jouait, j’avais la moitié des joueurs sur leur téléphone à regarder ce qu’il se passait.

Dans le calendrier, un sacré bazar

Petit coup de pouce du destin, ce dernier week-end avant la trêve des confiseurs était, dans de nombreuses ligues, surtout réservé pour mettre à jour le planning avec le rattrapage de différents matchs en retard. Tant pis pour le calendrier. Tant mieux pour la passion. À notre connaissance, dans l’Hexagone, le match le plus « relevé » qui devait se dérouler pendant le sommet franco-argentin opposait Brétigny-sur-Orge aux Ulis, en National 3. La Ligue de Paris imposant, en vue de la finale, des coups d’envoi à 13 heures au plus tard, les différentes équipes devaient se mettre d’accord entre elles. « Il y a dix jours, on avait anticipé et demandé que la rencontre soit avancée à 14 heures, explique Didier Brillant, entraîneur de Brétigny.On n’a pas eu de réponse. Et on a appris en milieu de semaine qu’il fallait que ça se joue à 13 heures maximum. De plus en plus compliqué. C’est du niveau national, il faut une organisation, une gestion, une sécurité… » Et avec la finale de la Coupe du monde en prévision, le coach avait senti le coup venir : « Il ne faut pas oublier que, sans parler du Mondial, c’est le début des vacances de Noël. Trouver du personnel et des bénévoles pour gérer, c’est encore plus compliqué. » Le report a été décidé. Nouvelle date : le 8 janvier. Pas forcément si réjouissant, ce calendrier amène en effet un chamboulement dans la reprise de l’entraînement. « Et on devait jouer Créteil le 7, rigole presque Brillant. Il va falloir qu’on les prévienne. » Jusque-là privés des performances des Bleus, entraînements et matchs ayant lieu en même temps à chaque fois – « une malchance impressionnante ! » -, les joueurs de Brétigny-sur-Orge pourront donc cette fois être à 100% devant leur écran. L’entraîneur promet néanmoins : « On est tous des passionnés, mais à un moment, on est acteurs de notre championnat. Les joueurs auraient été sérieux si on avait joué. Il aurait bien fallu qu’on réponde présents si jamais. » Pour l’adversaire du jour, l’entraîneur, Mahamadou Niakaté, savait pertinemment que c’était perdu d’avance. « Lors de Maroc-Portugal, on jouait, j’avais la moitié des joueurs sur leur téléphone à regarder ce qu’il se passait, révèle le coach des Ulis. Ça engendre de la déconcentration. Là, c’est quand même un jour de finale. Presque un jour national. Un match comme ça, ça se prépare quand on est joueur, mais aussi quand on est spectateur, avec nos familles, nos amis, nos enfants. »

Il y a ceux dont le match a été repoussé, et ceux qui vont devoir courir pour être à l’heure. Dans le district du Grand-Vaucluse, la rencontre de D3 entre le Dentelles FC et le Comète sportive de Sarrians se jouera à 13h30. Au coup de sifflet final, on imagine déjà les protagonistes sprinter vers les vestiaires, prendre la douche – ou pas – et filer pour être au coup d’envoi à 16 heures. « On y va, on gagne, on repart, sourit Cédric Fiusa De Araujo, entraîneur des visiteurs. On a 20 minutes de route. Ça nous fait un peu courir, mais on ne peut pas annuler, on a déjà trop de matchs en retard. »

On aurait pu vivre ça dans le bus, ça aurait donné un souvenir commun.

N’allez en effet pas croire que le foot hexagonal sera totalement à l’arrêt en ce 18 décembre. 9, 10, 11, 12, 13 et donc 13h30, il y aura de très nombreux stades où vous pourrez aller vous mettre derrière la main courante afin de vous échauffer pour la finale. Ou vous réchauffer. Les températures glaciales du moment dans la majorité des coins de France ont également poussé les préfectures à fermer de nombreux terrains et reporter des matchs. Toujours un plus pour la qualité du football et la santé des joueurs. Et une nouvelle bienvenue pour ceux qui s’imaginaient rater la grande finale. Le championnat U19 est par exemple concerné. Initialement programmées ce dimanche à 14h30, les rencontres Le Havre-PSG et Drancy-Lille se dérouleront en 2023, comme le veut une décision prise vendredi en fin de journée. Quelques heures plus tôt, Sébastien Pennacchio, l’entraîneur des jeunes Dogues, ne faisait aucun sentiment à l’idée de disputer ce match pendant France-Argentine : « Ce sont des aléas du métier. Ces garçons sont dans un centre de formation, sont amenés à faire une carrière, une carrière de sacrifices. On ne peut pas imaginer jouer dans des stades pleins et gagner de l’argent sans sacrifice, on essaie de les préparer à ça. » Le coach lillois se voyait même vivre quelque chose de très fort avec son groupe : « Si on devait être champions du monde, on aurait pu vivre ça dans le bus, ça aurait donné un souvenir commun. Pour dire : « J’étais parti jouer à Drancy et on était dans le bus ce jour-là. »  » Pas de sacrifices nécessaires finalement, donc. Juste une chose à espérer : vivre un moment d’histoire en regardant cette finale de Coupe du monde de l’équipe de France, et chanter Freed from desire jusqu’au bout de la nuit.

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Par Timothé Crépin

Tous propos recueillis par TC.

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