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  • Décès de Maradona

Le Dieu napolitain

Par Florian Lefèvre
Le Dieu napolitain

De 1984 à 1991, Naples palpitait pour un homme, un héros, un dieu vivant. Avec son Diego, la cité du Sud de l’Italie a gravi les sommets. « O mamma mamma mamma / O mamma mamma mamma... »

La dernière éruption du Vésuve remonte à 1944. À moins que le volcan ne se soit réveillé quarante ans plus tard, à une douzaine de kilomètres du cratère. Lorsque la ville de Naples accueille Diego Maradona, à l’été 1984. MA-RA-DO-NA ! « Certains avaient fait une grève de la faim pour que je signe au Napoli. Comment aurais-je pu refuser de jouer pour des gens comme ça ? L’un d’entre eux, Gennaro Esposito, s’était même menotté aux grilles du stade San Paolo », raconte l’intéressé dans son autobiographie Ma Vérité. Histoire vraie ou légende inventée par Maradona, pas de doute sur le fait que Naples est devenue, reste et restera folle de son Diego.

Le 5 juillet 1984, les Partenopei se pressent au San Paolo. « L’attente était si longue qu’on avait peur de ne pas pouvoir entrer dans le stade », se rappelle Carlo Iuliano, qui a suivi le club pendant trois décennies en tant qu’attaché de presse, dans le documentaire Amando A Maradona. Entre 70 000 et 80 000 personnes en furie pour recueillir une phrase, une seule, du nouveau numéro 10 azzurro : « Merci aux Napolitains, je suis heureux d’être parmi vous. » Le boss du Napoli, Corrado Ferlaino, a conclu la transaction avec le FC Barcelone pour onze millions de dollars et six millions et demi pour Maradona. Pourtant, El Pibe de Oro n’est pas encore champion du monde. L’Argentin vient de passer deux saisons mornes au Barça, et l’Europe connaît surtout le génie par le prisme de son coup de folie lors du Mondial 82 : un chassé flanqué dans le torse du Brésilien João Batista, qui lui a valu un carton rouge.

« Je me sentais chez moi, même si c’était une ville de fous »

« J’ai tout de suite aimé cette ville, car elle me faisait penser à mes origines, mais aussi au quartier de La Boca, explique Diego. Je me sentais chez moi à Naples, même si c’était une ville de fous. » Pour autant, avant de signer, le joueur n’a pas pris la peine de se rencarder sur l’équipe napolitaine, et c’est seulement lorsqu’il débarque en Campanie qu’il se rend compte du niveau faiblard de ses nouveaux partenaires.

Neuvième de Serie A en 82-83, le Napoli vient de boucler la saison 83-84 à une inquiétante onzième place. Pire, à Noël 84, les Napolitains ne comptent que deux victoires en championnat. Mais la remontée ne va pas tarder. Sous l’impulsion de Maradona, le Napoli empoche le meilleur total de points de la phase retour. C’est Diego qui raconte : « Cette seconde partie de saison m’avait donné de l’appétit. Alors j’ai pris le président du club, Corrado Ferlaino, entre quatre yeux, et je lui ai dit :« Achetez trois ou quatre joueurs et vendez ceux qui se font siffler par le public. Pour prendre la température, c’est facile, quand je donne le ballon à un coéquipier et qu’il est sifflé : ciao… Sinon, vendez-moi. » »

Bruno Giordano, Francesco Romano, Andrea Carnevale… viennent renforcer la formation désormais entraînée par Ottavio Bianchi. Car le messie a une mission à accomplir. « Lorsque je suis arrivé dans le sud de l’Italie, pose Diego,les gens m’ont d’abord supplié de battre la Juve, de battre l’AC Milan et de battre l’Inter. Les grands clubs du Nord. Et ensuite, après les avoir tous battus, eh bien, de leur offrir un Scudetto. » Les tifosi en ont fait leur représentant, et en retour, l’homme s’est persuadé de rendre grâce à ces Napolitains méprisés par l’Italie du Nord.

« J’ai brisé le mythe Platini »

Le 10 mai 1987, le Napoli remporte le premier Scudetto de son histoire, devant la Juve de Platini et Michael Laudrup. Summum du triomphe, le Napoli a vaincu les Bianconeri 2-1 au San Paolo et surtout 3-1 au Stadio Comunale. « Je me suis battu, battu et battu et finalement, j’ai brisé le mythe Platini. Je l’ai tué », se plaira à raconter Diego. 1990 sera l’année du deuxième titre de champion, le dernier à ce jour. Entre-temps, le Napoli soulève la Coupe UEFA en 1989, en dominant le VfB Stuttgart en finale (2-1, 3-3). Diego a accompli sa mission avant qu’un contrôle positif à la cocaïne après un match contre Bari en mars 1991 ne précipite la fin de son aventure.

Vidéo

Ses meilleures années, il les aura passées à Naples. Et presque trente ans après le premier titre de champion d’Italie, des drapeaux à l’effigie de Diego flottent encore à chaque match dans les travées du San Paolo. « Si, en Argentine, on continue de me montrer un amour inconditionnel, tout est encore plus passionnel à Naples », tranche Diego. Comme ce jour de 2005 où son retour en Terre promise oscille entre amour, passion et démence. « O mamma mamma mamma / O mamma mamma mamma / sai perche’ mi batte il corazon ? / Ho visto Maradona / Ho visto Maradona / Eh, mamma’, innamorato son / O mamma mamma mamma… »

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Par Florian Lefèvre

Propos tirés des ouvrages Moi, Diego et Maradona, Ma Vérité, du documentaire Amando A Maradona et de l'article consacré à ses années napolitaines dans le So Foot #50

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