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L’Allemagne, le bon élève qui se fait taper sur les doigts à la maison

Par Douglas de Graaf
L’Allemagne, le bon élève qui se fait taper sur les doigts à la maison

Le brouillard. Voilà dans quoi naviguent la majorité des championnats européens. Dans cette tempête de sable, l’Allemagne fait figure d’oasis : les entraînements ont repris dès la première semaine d’avril, seuls dix cas de coronavirus ont été recensés parmi les clubs professionnels du pays et la reprise de la Bundesliga pourrait intervenir dès le 15 mai. Un modèle d’efficacité que ses voisins européens jalousent... mais qui fait majoritairement grincer des dents à l’intérieur du pays.

Ce mercredi, les fans de foot européens vont savoir. Savoir si leur seule échappatoire pour regarder du foot en direct restera ou non la Biélorussie, unique championnat continental où le ballon tourne toujours. Ce mercredi, tous les regards seront braqués sur Angela Merkel et les 16 chefs de gouvernement des États fédéraux allemands, qui décideront à l’issue de leur visioconférence de redémarrer ou non la Bundesliga. Et l’agence de presse Reuters l’assure : la réponse sera positive. Date de reprise avancée : le vendredi 15 mai.

Reprendre : une nécessité économique

Comment est-ce possible, alors que la plupart des championnats européens continuent de naviguer à vue ? Évidemment, la Bundesliga bénéficie de la bonne gestion de la crise du coronavirus en Allemagne (6860 morts « seulement » et une absence de confinement qui fait rêver). Mais le comportement de la Ligue allemande (DFL) n’est pas non plus étranger à cette reprise express. En Allemagne, pas de Javier Tebas (patron de la Liga) pour refuser toute autre alternative qu’une reprise de la saison et pour menacer de sanctions les clubs récalcitrants. Pas de Jean-Michel Aulas et autres pontes de Ligue 1 pour polluer le débat avec des scénarios ne favorisant que leurs intérêts personnels. La DFL s’est contentée d’un lobbying tout aussi intense, mais beaucoup plus discret, et centré sur un argument qui a fait mouche : en cas d’arrêt du championnat, 13 des 36 clubs professionnels du pays risquent la faillite.

Schalke 04, l’un des clubs les plus en danger, a ainsi plaidé dans un communiqué que « toute personne impliquée dans la Bundesliga a intérêt à ce que le championnat reprenne, même si cela implique de jouer à huis clos ». La DFL a donc travaillé en silence pour élaborer un dispositif sanitaire qui permettrait à toutes ces petites troupes de reprendre leurs joutes en toute sécurité – ou presque. Résultat ? La feuille de route a fait son chemin jusqu’au ministre de l’Intérieur et des Sports, qui a donné son feu vert, en attendant l’ultime confirmation d’Angela Merkel et consorts.

La Bundesliga prioritaire par rapport aux enfants ?

Un scénario qui fait saliver les huiles de la Liga et de la Serie A… mais pas grand monde en Allemagne. Au contraire, l’opposition à la reprise de la BuLi rassemble sous la même bannière des pans divers de la société, des petits commerçants et des supporters en passant par une partie de la classe politique. Et les points de discorde ne manquent pas, ce sur tous les terrains (éthique, sanitaire et économique). « Les terrains de jeu sont fermés, les crèches sont fermées, mais la Bundesliga reprend ? Cela ne va pas ensemble », a notamment fustigé le chef de gouvernement du Brandebourg sur la radio RBB. Difficile, pareillement, d’annoncer à certains commerçants que leur entreprise doit rester fermée alors que la BuLi a droit à son feu vert. Du côté des supporters, un porte-parole du groupe Unsere Kurve a regretté dans une interview à DW que le foot-système, « persistant dans des montants qui dépassent l’entendement aux yeux de l’opinion publique, se soit rendu dépendant des droits télé et n’ait rien fait pour assurer sa stabilité ». Quant à l’expert santé du parti SPD, il a résumé le sentiment général : « Réserver des dizaines de milliers de tests pour des matchs à huis clos alors que les personnels soignants et les professeurs en manquent, ça n’est pas possible.(…)On doit faire passer des messages aux jeunes : gardez vos distances, portez des masques. Or, c’est tout l’inverse qui sera montré sur un terrain de Bundesliga », s’est indigné Karl Lauterbach sur RB, redoutant aussi les rassemblements de supporters lors des matchs.

Si le monde du football avait besoin de résultats pour rassurer son monde, c’est raté. La semaine dernière, trois cas positifs ont été recensés au FC Cologne (deux joueurs et un kiné), faisant surfer une nouvelle vague d’inquiétude sur le pays. Une inquiétude qui a envahi certains joueurs, dont Birger Verstraete (lui-même de Cologne), s’indignant que tout l’effectif n’ait pas été placé en quarantaine. Réponse de la DFL : « Les mesures de sécurité au sein des clubs sont telles qu’il n’y a pas de situation où des contacts à haut risque ont pu se produire », a affirmé l’instance dans un communiqué, préférant voir dans les résultats (dix cas positifs parmi les 1723 testés ) une validation de sa stratégie. En clair : tant que tout le monde respecte les règles, le risque de contamination est infime et les entraînements peuvent continuer. Mais respecter les règles, c’est justement ce que n’a pas fait Salomon Kalou (Hertha Berlin), qui a eu la merveilleuse idée de publier une vidéo où on le voit butiner de ses coéquipiers jusqu’au médecin du club, poignées de main à la clé et au mépris des distances de sécurité.

Comme l’a précisé le médecin en chef du protocole de sécurité de la DFL dans une interview à Sport 1, la responsabilité des joueurs est immense, que ce soit « sur et en dehors du terrain d’entraînement ». « Tous les joueurs, entraîneurs et salariés doivent faire preuve d’une discipline extrême et respecter les mesures de distanciation sociale. Autrement, le système pourrait s’effondrer. » En attendant, les entraînements continuent de n’en avoir que le nom. « On arrive à l’entraînement directement habillé, et on repart directement à la maison pour la douche, confie le joueur de Fribourg, Jonathan Schmid, à l’AFP. « On travaille par groupes de quatre. On évite le contact, les duels sont interdits », poursuit l’ailier, qui précise se faire tester une fois par semaine et qui assure « ne pas avoir peur du tout ». Pour l’instant ? À partir du moment où les autorités devraient prononcer la reprise de la BuLi ce mercredi, l’émulation de la compétition devrait entraîner davantage de situations à risques (contacts, déplacements, hébergement). Les meilleurs médecins de la DFL ont-ils vraiment tout prévu pour ne pas faire du football l’ennemi de l’intérieur d’une Allemagne jusqu’ici épargnée ?

Par Douglas de Graaf

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