- Coupe de France
- Quarts
- PSG-Nice
Mbappé-Enrique : comment gérer un joueur sur le départ ?
La gestion de Kylian Mbappé par Luis Enrique fait causer ces dernières semaines, le technicien espagnol ayant décidé d’adapter le temps de jeu de l’attaquant depuis l’annonce officieuse de son départ en fin de saison. Comment composer avec un joueur qui ne sera plus là dans quelques mois ? Éléments de réponse avec Rolland Courbis et Guy Lacombe.
« Nous devons apprendre à jouer sans Kylian », lâchait Luis Enrique après le nul arraché par le PSG face à Rennes (1-1), le 25 février. Depuis, il y a eu le fameux épisode de la sortie à la pause à Monaco, une nouvelle mise au banc ce week-end contre Reims, et des tas de questions autour de cette drôle de gestion dont le technicien espagnol tente désormais de s’extirper en maniant l’ironie. Le départ du champion du monde en fin de saison ne fait plus de doute, depuis qu’il l’a annoncé à son président Nasser al-Khelaïfi le mois dernier. Luis Enrique, lui, répète qu’il faut préparer la saison prochaine et, entre deux soupirs, a laissé entendre que la star parisienne pourrait ne plus jouer un match de Ligue 1 dans son intégralité jusqu’à la fin de cet exercice.
Le dilemme se pose : faut-il profiter de Mbappé jusqu’au bout ou bien faire comme s’il était déjà parti ? Paris peut-il se passer de son meilleur joueur, même si ce dernier va mettre les voiles après sept ans passés au club ? À chaque personne sa solution idéale. Guy Lacombe, passé sur le banc parisien (2005-2007), et Rolland Courbis ne sont d’accord en rien sur la manière de résoudre ce problème, mais s’accordent au moins sur un point : le talent et la notoriété de Mbappé rendent son cas unique.
Au mauvais souvenir de Dembélé
Manque d’implication, volonté de se préserver des blessures, décrochage sur le plan mental… Lorsqu’un cadre du vestiaire a prévu de prendre la tangente, nombreux sont les défis auxquels les coachs sont confrontés. En 2002, Guy Lacombe sait que Fabrice Fiorèse et Stéphane Guivarc’h (retraite) vont quitter En Avant. « Je ne dis pas que c’est Mbappé, mais franchement Fio’ c’était quelque chose, Guivarc’h je ne vous en parle même pas, rejoue-t-il. Mais c’est peut-être grâce à ça que l’éclosion de Didier Drogba est arrivée. Des difficultés, on sort des choses qui peuvent être extrêmement positives, et c’est ce que je souhaite à Paris. » Cela pourrait-il se vérifier au PSG, où les Titis ont souvent du mal à s’imposer ? Mettre de côté Kylian Mbappé laisserait plus de place à Bradley Barcola, qui réalise une première saison très encourageante. « Barcola, Kolo Muani et Dembélé, y a pas mal de clubs qui aimeraient avoir cette attaque-là », estime Lacombe.
Rolland Courbis a vécu une autre expérience avec un très bon ami et coéquipier de Mbappé au PSG : Ousmane Dembélé. C’était en 2016, à une époque où Emmanuel Macron était encore ministre de l’Économie et lors de laquelle la BBC et la MSN se battaient pour savoir quel trio était le plus fort. Le coach français, alors sur le banc du Stade rennais, avait d’autres problèmes, dont celui de gérer l’explosion de la pépite Dembélé. En feu de janvier à avril, il avait disparu des radars en fin de saison, alors que son transfert à Dortmund se négociait en coulisses. « Il était bien plus jeune que Mbappé, et à l’époque, tout ça l’avait un peu perturbé, rejoue Courbis, qui n’avait pas hésité à le titulariser jusqu’au bout (six rencontres, cinq défaites, un nul et aucune action décisive pour lui). Sur les derniers matchs de la saison 2015-2016, on n’a pas vraiment eu un Dembélé en grande forme. Et il y avait aussi le risque de blessure… »
« Occupe-toi de cette année ! »
Des raisons qui font que la réflexion de Luis Enrique peut s’entendre, même si le fait qu’il s’agisse de l’un des meilleurs joueurs au monde dans la fleur de l’âge peut susciter l’incompréhension. « La démarche est gagnante-gagnante, assure Lacombe. À la fois bonne pour le club, qui prépare l’avenir, et pour Mbappé, car il se préserve des blessures en vue de son transfert. Je suis persuadé qu’il y a un deal entre Enrique et son joueur. » Avec un PSG qui possède dix points d’avance sur son dauphin brestois, le 417e de notre top 1000 des joueurs de Ligue 1 comprendrait que le Bondynois commence les matchs de championnat sur le banc : « Ça lui permet aussi de rester frais pour la Ligue des champions, qui est l’objectif principal. »
Un joueur comme Mbappé a pourtant besoin de rythme pour performer dans des rencontres de très haut niveau, et Courbis estime, lui, que Luis Enrique fait fausse route en ce qui concerne sa gestion de son attaquant. « Il n’y a pas un entraîneur qui ne mettra pas Mbappé titulaire dans son équipe, même en cas de départ, insiste-t-il. Nous expliquer qu’il ne va pas jouer tous les matchs, car il prépare la saison prochaine… Occupe-toi de cette année ! » Courbis se permet même de faire un parallèle un brin ironique avec le coach espagnol : « Comment il fait pour savoir s’il sera toujours entraîneur du PSG la saison prochaine ? » Il le sera en tout cas ce mercredi soir, pour la réception de Nice en quarts de finale de la Coupe de France, et devra répondre à cette question qui devrait le suivre jusqu’à la fin du mois de mai : Mbappé va-t-il jouer ?
Par Vivien Dupont
Tous propos recueillis par VD