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Johan Gastien : « Voir jouer le Barça, ça me fait bander ! »

Propos recueillis par Antoine Donnarieix
Johan Gastien : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Voir jouer le Barça, ça me fait bander !<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Débarqué à Clermont en provenance de Brest cet été, Johan Gastien (30 ans) retrouve ce qu’il était venu chercher : du temps de jeu sous les ordres de Pascal, son père. Mieux encore : le polyvalent milieu de terrain devient la pièce maîtresse de l’entrejeu d'une équipe auvergnate prête à se déplacer chez le leader messin. Entretien avec l'homme qui touche le plus de ballons par match en Ligue 2.

Salut Johan ! Alors, pas trop inquiet à l’idée d’aller rendre visite au FC Metz ? Inquiet, je ne vais pas dire ça. Nous sortons d’une victoire contre Niort (3-2) et on sait à quoi s’attendre. Ils mangent tout le monde en ce moment en Ligue 2, mais on sait qu’il y a une carte à jouer. À l’aller, nous n’étions pas passés loin de les accrocher (2-3), et puis leurs deux défaites de la saison ont eu lieu à domicile, donc pourquoi pas ! Depuis 2019, ils connaissent un léger coup de moins bien dans leur jeu… Après, il ne faut pas se le cacher, ça va être compliqué. Metz, c’est un peu le Reims de la saison dernière : solide, efficace et complet avec un gros banc. Quand tu vois un mec comme Rivière remplaçant, ça annonce la couleur.

Parlons un peu de ton cas. Cela doit te faire du bien de retrouver du temps de jeu après une saison dernière compliquée à Brest, où tu avais récemment exprimé une certaine rancœur vis-à-vis de Jean-Marc Furlan… Comment est-ce que tu expliques cette phase délicate ?Dans une carrière, tout n’est pas rose ! Du jour au lendemain, je n’ai pas trop compris pourquoi j’ai été mis à l’écart. Le coach Furlan est très bon, les résultats qu’il obtient en ce moment avec Brest le prouvent. Le souci avec moi, c’était plus sur le plan humain. Je ne suis pas le seul à l’avoir ressenti, j’en avais discuté avec mon coéquipier Manu Pérez au moment de mon arrivée à Clermont. C’est dommage, parce que je voulais réaliser quelque chose de bien là-bas. Mentalement, c’était dur. Qu’il y ait meilleur que moi, il n’y a aucun souci, car je peux le comprendre. Mais dans ce cas-là, il faut me le dire. À Brest, il y avait de l’ambition, un super groupe. J’aurais juste aimé davantage de communication.

Tu as pu rebondir l’été dernier à Clermont, où tu retrouves comme coach ton père, qui t’avait déjà entraîné à Niort, entre 2008 et 2013. Qu’est-ce qui t’a convaincu de signer à Clermont ? En toute franchise, le fait que mon père soit là n’était pas la raison principale de ma signature à Clermont. Je les avais vus faire une bonne saison l’an passé, et au niveau de leur style de jeu, c’était ce qui me correspondait.

En réalité, j’avais peur de la manière dont ils allaient m’accueillir en sachant que j’étais le fils du coach.

Avant mon père, Corinne Diacre et le chargé de recrutement Philippe Vaugeois me voulaient déjà. À cette époque, j’avais privilégié Brest. Là, il faut aussi souligner que la philosophie de mon père correspond à la mienne. J’ai pu aussi discuter avec Manu et Alassane N’Diaye que je connaissais de Niort pour évoquer le vestiaire… En réalité, j’avais peur de la manière dont ils allaient m’accueillir en sachant que j’étais le fils du coach. Et en fait, ça s’est bien passé. J’avais le respect de ce groupe jeune et désireux d’apprendre grâce à mon expérience en Ligue 2. C’était un tout.

Sur le plan sportif, la saison prend plutôt une bonne tournure. En ce qui te concerne, tu es le joueur de Ligue 2 qui touche le plus de ballons par match (108 en moyenne). Quelle explication donnes-tu à cela ? Toucher le ballon, c’est mon identité. Parfois, on peut me le reprocher, car je m’évade là-dedans. Quand j’étais jeune, j’étais souvent grillé à l’heure de jeu. Mais j’ai appris à me canaliser, gérer mes efforts et temporiser. Voir jouer le Barça, ça me fait bander ! Ce sont aussi les principes de mon père, qui a décidé de m’appeler Johan en hommage à Cruyff. Au milieu à Clermont, nous sommes avant tout des joueurs techniques. J’aime jouer simple sans porter la balle pour dribbler. Mon travail de récupérateur, c’est de donner le ballon et de me déplacer derrière pour le recevoir à nouveau. Je cours encore beaucoup, mais avec l’âge je me suis mis à réfléchir de plus en plus.

Tes idoles sont Xavi et Pirlo. Tu te considères comme un footballeur avec une majorité de jeu horizontal ou vertical ? Ce sont deux joueurs qui ne paient pas de mine à première vue. D’ailleurs à Brest, je sais que Furlan aimait bien les joueurs plus physiques au milieu de terrain et ça ne me laissait pas trop de possibilités de m’exprimer… Maintenant, ces références ne sont plus là, mais il y a encore des joueurs de ce type comme Rakitić ou Modrić. Quand j’ai commencé à regarder les premiers matchs du Barça, je trouvais ça très impressionnant d’abord, puis j’ai commencé à m’en inspirer. Au départ, je jouais beaucoup vers l’arrière et de façon latérale. Et plus les années passent, plus j’exige de jouer vers l’avant, car j’aime casser les lignes. Aujourd’hui, j’ai Franck Honorat ou Florian Ayé, deux mecs rapides qui me permettent d’utiliser le jeu long. Après notre dernier match contre Niort, j’ai pu avoir accès à un compte rendu très équilibré sur mon rendement de passes : je jouais un quart à gauche, un quart à droite, un quart vers l’arrière et un quart vers l’avant. L’objectif, c’est d’augmenter mon ratio vers l’avant.

Qu’est-ce que tu as envie de répondre à ceux qui disent qu’il est plus facile de jouer quand le père entraîne son fils ? C’est triste à dire, mais je ne l’entendais pas souvent sur le terrain il y a quelques années. Et en ce moment, je l’entends de plus en plus. Tous les deux ou trois matchs, tu vas avoir un joueur qui va me faire cette réflexion. C’est frustrant, ça m’emmerde un peu sur le coup, mais derrière, je n’y fais pas attention. Vu que je suis un peu chiant avec mon tempérament sur le terrain, je me dis aussi que c’est une technique de déstabilisation pour me faire tomber dans un piège. Je sais d’où je viens, et quand j’étais à Dijon en Ligue 1, mon père n’était pas mon entraîneur. Il faut accepter ces paroles, ça fait partie du jeu.
Autre statistique intéressante sur le plan collectif cette fois-ci : avec le Paris FC, vous êtes les deux équipes au ratio de clean-sheets le plus élevé d’Europe, avec une cage inviolée 13 fois en 20 journées. Comment est-ce que tu analyses une telle statistique ? Cela est dû au fait que nous gardons souvent le ballon. En face, l’équipe se fatigue et manque de jus pour se créer des occasions ou convertir les occasions. Quand nous avons le ballon, mon père souhaite toujours qu’il y ait quelqu’un en couverture pour anticiper une éventuelle perte de balle. Au moment où la balle est perdue, mais reste en jeu, notre effort collectif est très intense sur les cinq secondes suivantes. La plupart du temps, les buts que nous encaissons sont dus à des erreurs individuelles et non à un problème lié à notre organisation collective.

Je suis un bon joueur de Ligue 2 et je l’assume complètement. J’ai pris du plaisir à jouer dans l’élite avec Dijon, mais je ne suis pas au niveau de la Ligue 1, j’en suis conscient.

En comparaison au Paris FC, nous ne possédons pas une défense aussi solide et compacte, ils sont bien plus costauds que nous. Notre force, c’est d’avoir la possession du ballon.

Tu es furtivement passé par la Ligue 1 avec Dijon lors de la saison 2016-2017, mais c’est en Ligue 2 que tu t’épanouis pleinement. À bientôt 31 ans, tu es davantage conscient de ton niveau et de tes capacités ? Mon agent a toujours été clair avec moi : je suis un bon joueur de Ligue 2 et je l’assume complètement. J’ai pris du plaisir à jouer dans l’élite avec Dijon, mais je ne suis pas au niveau de la Ligue 1, j’en suis conscient. Après, certains joueurs ont la chance de jouer en Ligue 1 avec un niveau inférieur au mien aussi, tout est possible. Mieux vaut prendre son pied en Ligue 2 que de galérer en Ligue 1. Jouer au foot n’est pas éternel, donc autant prendre du plaisir tant que c’est possible.

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