- France
- Marseille
Igor Tudor siffle la fin de son aventure à l’OM
Arrivé en juillet 2022 à Marseille avec un contrat de deux ans, Igor Tudor n’ira pas au bout de son bail avec le club olympien qui a accepté sa démission en fin de saison, ce jeudi. L’entraîneur croate aura malgré tout marqué de son empreinte son court passage sur la Canebière, qui le regrettera peut-être.
Il y a encore quelques jours, c’était une rumeur grandissante, qui flottait dans l’air qui parfume la Commanderie et ses alentours. Cette rumeur est devenue une information, brutalement annoncée ce jeudi 1er juin : Igor Tudor ne sera plus le coach de l’OM l’an prochain. Au terme d’une conférence de presse d’une vingtaine de minutes, l’entraîneur croate, le président Pablo Longoria et le directeur sportif Javier Ribalta ont écrit ensemble les dernières lignes du règne de Tudor à Marseille. Avant l’ultime match à diriger pour Tudor du côté d’Ajaccio, ce samedi, qui fera office de bal de fin. Coincé entre les deux gabarits poids plumes de sa direction, le géant Igor a remercié en italien les diverses composantes du club avant de délivrer un dernier message : « Cette année, beaucoup de choses se sont passées, positives comme négatives, mais finalement comme n’importe où. Bosser un an ici, c’est comme bosser trois ans dans un autre club. Je suis assez tranquille avec moi-même. J’ai pris cette décision en accord avec moi-même depuis un bout de temps. » Suivi d’une dernière pirouette, de la même nature que celles qui ont rythmé les semaines du côté de la Canebière : « Je voulais vous remercier vous, les journalistes. Vous m’avez fait grandir, vous m’avez posé parfois des questions difficiles du fait de votre travail, et j’ai pu parfois exagérer, c’est l’orgueil qui m’y a poussé. Désolé d’avoir été un peu dur, mais je vous remercie… On peut finir là-dessus ? »
Un bilan positif malgré tout
Une démission mûrement réfléchie alors que l’intérêt de la Juve à son égard, l’autre club de sa vie de joueur où il a évolué de 1998 à 2005 puis de 2006 à 2007, croît de jour en jour selon la presse italienne. Tudor l’assure pourtant : « J’ai pris cette décision de ne pas continuer du fait de raisons professionnelles et privées. Ce n’est pas parce que j’ai un accord avec un autre club. » Pas vraiment avare en détails, esquivant les questions lui demandant les raisons de ce départ attendu, mais pas non plus évident d’un point de vue sportif, Tudor n’en dira pas davantage. Du côté de Marseille, chacun retiendra ce qu’il souhaite du géant croate.
Ce qui est sûr, c’est que son aventure au Vélodrome s’est terminée comme elle a commencé : sous des sifflets injustes. Même si l’OM s’est inclinée face à Brest et tire la langue depuis la mi-mai, le club phocéen a sans conteste été l’une des plus belles équipes de Ligue 1 cette année. Au-delà du pur plan comptable où l’OM n’avait plus inscrit un nombre de points aussi élevé depuis la saison 2017-2018 sous Rudi Garcia, l’équipe de Tudor est restée invaincue jusqu’à la dixième journée (et une défaite au Vél’ face à… Ajaccio), a battu le PSG en Coupe de France au Vélodrome après douze ans d’humiliations, décroché un troisième podium en quatre ans et brillé par une approche tactique exigeante qui a obligé plus d’un coach à s’adapter à lui. S’il ne termine « que » troisième, c’est avant tout du fait des autres, d’un PSG porté par ses individualités et d’un RC Lens qui marchait sur l’eau.
Longoria, c’est quoi le projet ?
Évidemment, le bilan n’est pas tout rose non plus, et Tudor aurait pu faire mieux : l’élimination de la phase de groupes en C1 et ce scénario dingue face à Tottenham ont pesé, celle face à Annecy en Coupe de France encore plus, alors que l’OM court après un trophée depuis onze ans et que l’effectif semblait suffisamment fourni pour faire mieux. Mais la réelle réussite de Tudor en France, c’est d’avoir assumé ses choix jusqu’au bout. Que ses choix d’hommes (Payet, Guendouzi) ou tactiques aient plu ou non, aient fonctionné tout le temps ou non, Tudor a de par son charisme et son travail prouvé que l’on pouvait allier discipline et passion, même dans un club aussi vivant que l’OM. « En venant ici, j’ai découvert un super championnat, de très bons joueurs, des stades pleins, des entraîneurs préparés, confiait-il. Je me souviendrai aussi du beau football que nous avons proposé, qui a plu, je crois, et je me souviendrai du grand travail au club, de cette culture du travail et de l’effort qu’il y a maintenant ici. Il y a une belle base pour continuer sur cette route. J’espère qu’on verra d’ici peu l’OM à sa place et ayant gagné de nombreux trophées. »
Reste à savoir maintenant quel chemin va vouloir emprunter l’Olympique de Marseille. Pour la troisième fois en trois ans (Villas-Boas, Sampaoli et Tudor donc), l’OM va perdre un coach qui ne sera pas resté deux saisons et devoir ainsi tout reprendre à zéro. Trouver un coach avec la même philosophie que Tudor n’est pas impossible, en trouver un qui aura les mêmes résultats n’est pas garanti non plus. C’est peu dire qu’il aurait été intéressant de voir le futur ex-coach de l’OM poursuivre un an de plus. Un point qui interroge sur la gestion de Longoria, tant la comparaison avec Lens et la stabilité accordée à Franck Haise a démontré cette année à quel point laisser du temps à un coach pouvait porter ses fruits. Le président marseillais n’est pas forcément l’unique responsable de la fin de l’aventure précoce de Tudor, mais savoir garder un coach qui donne satisfaction fait partie des prérequis d’un grand président. Nul ne sait évidemment encore où en sera l’OM l’an prochain, où sera Tudor également. Mais peut-être qu’à froid, certains supporters marseillais regretteront de l’avoir sifflé.
Par Andrea Chazy