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Heynckes, treize à la douzaine
Entre le 13 mars 2013 et aujourd’hui, Jupp Heynckes a remporté douze matchs avec le Bayern Munich en Ligue des champions. Sans en perdre un seul. Un record inédit pour une série qui pourrait ne jamais prendre fin...
Ceux qui cherchent la petite bête seront sans doute parvenus à trouver le minuscule insecte : avoir encaissé au moins un but sur cinq des six derniers matchs d’une même compétition n’est pas forcément digne d’un futur champion continental. Malheureusement pour eux, cette statistique ne suffira certainement pas à diminuer l’ampleur du record. Certes, le Bayern Munich sous Jupp Heynckes a pris cinq pions en six rencontres contre un seul sur les six précédentes (!) en Ligue des champions. Mais cela relève de l’anecdote. Ce qui est plus parlant en revanche, c’est que l’Allemand reste sur douze victoires consécutives en C1.
Douze. Un record que personne n’avait jamais atteint dans la compétition. Celui qui s’en rapproche le plus s’appelle Louis van Gaal, dix succès au compteur entre mai 2000 et mai 2009 (sur le banc de Barcelone et du Bayern). Lorsqu’il a dépassé son confrère le mercredi 13 mars dernier après le 5-0 envoyé dans la trachée du Beşiktaş en huitièmes de finale retour, Heynckes l’a joué modeste en conférence de presse : « Je suis toujours surpris de telles statistiques. Mais pour moi, ça ne signifie pas grand-chose. Il est beaucoup plus significatif que l’équipe gagne, joue bien et progresse. » Peut-être. Reste que cette série ne peut pas seulement représenter un concours de circonstances, puisque personne d’autre n’a réussi à réaliser la même chose jusque-là.
Arsenal, la claque salvatrice
Coup d’œil dans le rétroviseur. Le 13 mars (tiens, tiens…) 2013, les Bavarois la jouent facile en huitièmes à domicile contre un Arsenal qu’ils ont dominé sans problème à l’aller (1-3). Résultat : les Allemands se qualifient grâce à une défaite peu glorieuse (2-0). Ce qui n’est sûrement pas du goût d’Heynckes. Mais cet avertissement n’est-il finalement pas un mal pour un bien ? Après ce revers, le Bayern fait en effet preuve d’une impressionnante sérénité dans son 4-2-3-1 immuable (avec, notamment, le trio Franck Ribéry-Thomas Müller-Arjen Robben derrière l’avant-centre et une doublette Javi Martínez-Bastian Schweinsteiger devant la défense titularisés lors des quatre dernières parties de la compétition 2013).
Jupp Heynckes nelle ultime 12 gare di UEFA Ligue des champions. pic.twitter.com/lrNCrFCbEg
— Juanito ⚪⚫ (@FinoAllaFine_35) 5 avril 2018
D’abord en giflant la Juventus par deux 2-0 aussi propres qu’autoritaires. Puis en humiliant le Barcelone de Tito Vilanova d’un 7-0 (scores cumulés) prouvant son évidente supériorité. Et enfin en achevant le tableau par une difficile victoire face à l’ennemi du Borussia Dortmund, Robben inscrivant le caramel décisif juste avant le temps additionnel (2-1). Au sommet d’un formidable triplé Bundesliga-Coupe d’Allemagne-LDC, l’entraîneur allemand peut prendre sa retraite avec le sentiment du devoir accompli.
Rien n’a changé… ou presque
Quatre ans et demi plus tard, voilà Heynckes de retour sur le même banc, guidé par les mêmes idées (priorité à l’équilibre tactique et utilisation de deux purs ailiers, même si le schéma ressemble davantage à un 4-3-3 qu’à un 4-2-3-1), protégé par la même philosophie ( « Le foot n’a pas trop changé en quatre ans » , disait-il lors de sa présentation), appelé pour le même objectif (tout rafler), armé d’éléments similaires en matière de qualité (si ce n’est meilleurs), et félicité (pour le moment) pour les mêmes résultats. Attention : il serait mensonger de dire que le successeur de Carlo Ancelotti a tout révolutionné en signant son retour. Mais au moins, il a su redonner confiance à un groupe qui avait surtout besoin d’adhérer à nouveau au discours d’un coach.
Sur la scène européenne, cela s’est traduit par des matchs de poules contrôlés (3-0 et 2-1 contre le Celtic, 2-1 à Anderlecht), une revanche prise sur le Paris Saint-Germain (victoire 3-1 après une défaite 3-0 sous Ancelotti), un huitième de finale expédié devant Beşiktaş (5-0, 1-3) et une victoire acquise à l’expérience sur le terrain de Séville en quarts (1-2). Une nouvelle bonne performance qui ouvre le chemin des demies, à condition de terminer le boulot ce mercredi soir à l’Allianz Arena. De là à envisager un treizième triomphe d’affilée dans l’épreuve ? Oui. Et même bien davantage. Car nul doute que derrière son discours de façade, le pragmatique Heynckes s’est donné un défi : celui de partir à la retraite (définitivement, cette fois) en ayant gagné la Ligue des champions sans avoir brisé son incroyable série. Même si réussir la moitié du défi lui suffirait déjà amplement.
Par Florian Cadu