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Hassane Kamara : « Je suis devenu un défenseur qui aime défendre  »

Propos recueillis par Andrea Chazy

Arrivé cet été à l'Udinese, Hassane Kamara découvre la Serie A, le Frioul et le poste de piston. Avant de voir l'ancien Niçois et international ivoirien défier l'Inter ce samedi, on a fait le point sur sa nouvelle vie de l'autre côté des Alpes dans une équipe qui galère.

udine 20 agosto 2023 calcio serie a udinese vs juve ©Foto Petrussi
udine 20 agosto 2023 calcio serie a udinese vs juve ©Foto Petrussi

Tu es arrivé cet été à l’Udinese. Comment se passent tes premiers mois en Serie A ? Plutôt bien à titre personnel. J’ai joué une dizaine de matchs avec des prestations plus ou moins bonnes. Collectivement, c’est un peu plus compliqué (Udine est 16e du championnat, NDLR), mais je découvre un beau championnat.

Comment expliques-tu les difficultés de l’Udinese en ce début de saison ? C’est le foot de haut niveau : il faut de l’efficacité, ça se joue sur des détails. On travaille, mais on a besoin de confiance. Évidemment, on est là pour gagner, on essaye de faire ce qu’il faut pour que ça change. Il faut qu’on puisse être impérial derrière et tueurs devant, il faut arrêter les erreurs bêtes ou de prendre des buts à la 90e.

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Qu’est-ce qui t’a poussé à quitter Watford pour venir ici ? On m’a proposé de venir à l’Udinese, de découvrir un nouveau pays, un nouveau championnat. J’ai voulu voir autre chose que le Championship. La Serie A, c’est un championnat attractif, avec de grandes équipes, des beaux stades. Quand on est footballeur, la Serie A ça parle à tout le monde. Avec l’Espagne et l’Angleterre, c’est le championnat le plus relevé, un championnat qui repart de l’avant depuis quelques années, qui a placé un club dans chaque finale de compétition européenne l’an dernier…

Watford et l’Udinese ont les mêmes propriétaires, la famille Pozzo (un transfert qui a fait polémique puisque père et fils ont échangé 20 millions d’euros, NDLR). Est-ce qu’on t’a proposé ce challenge également pour cette raison ? Je n’en sais rien, et pour être franc, ce n’est pas mon problème, ces histoires de propriétaires. C’est un projet qui m’intéressait, donc j’ai accepté. L’Udinese, c’est un club stable en Serie A depuis plus de 20 ans, ça m’a suffi pour me convaincre.

Je suis allé dans les montagnes à Sappada. Un coin qu’ils connaissent tous ici, c’est paisible, ça change. J’ai aussi visité Venise.

Hassane Kamara

Udine, c’est une petite ville pas loin de la mer, des montagnes, de la Slovénie. Tu as pu bouger dans le coin ? 

Ouais, je suis allé dans les montagnes à Sappada. Un coin qu’ils connaissent tous ici, c’est paisible, ça change. J’ai aussi visité Venise… Après, on n’a pas beaucoup de jours off en Italie, on travaille énormément.

Tu es né à Saint-Denis dans le 93, tu as grandi à Aubervilliers. À quoi ressemblait ton enfance ?

J’habitais à côté du square des Roses à Aubervilliers et je jouais énormément au foot. En bas de chez moi, mais aussi à la Jeunesse d’Aubervilliers. J’habitais en face du stade. Je ne regardais pas forcément les matchs par contre, mais j’étais tout le temps dehors pour jouer. Footballistiquement, c’étaient peut-être les meilleures années de ma vie.

Comment ça ? Tu as un peu perdu le plaisir en devenant pro ?

Tu ne perds pas ton plaisir mais… Quand tu es petit, il n’y a aucune pression. On s’amusait, c’étaient de belles années de foot. Ce n’est pas un travail comme là, où tu as l’obligation de résultats, tu t’entraînes tous les jours intensément, c’est différent. Comme ça, là, je repense aux tournois au Trocadéro, aux années U13 où on jouait les premiers rôles face à Argenteuil, Épinay, Sannois… Personne d’autre que moi n’a percé de ma génération dans mon quartier dans ces années-là, mais Haris Belkebla par exemple jouait pour le club rival : le FC Aubervilliers. De mon temps, y a deux, trois gars de mon quartier qui auraient pu aller en pro, ou au moins en centre de formation, car je n’étais pas forcément le meilleur à l’époque. Aujourd’hui, il y en a un qui est chauffeur de bus, un autre qui encadre des jeunes justement pour qu’ils aient la chance que lui n’a pas eue…

Qu’est-ce que tu as fait pour y arriver, contrairement à eux ? Franchement, rien de spécial. Après, j’étais bon, quand je faisais des tests, je les réussissais. Je marquais souvent beaucoup de buts, car je jouais milieu gauche. J’ai eu de la chance, mais bon, sur les détections, on est quand même 2000 : si t’es pas bon, tu ne passes pas le tour suivant, hein. (Rires.) Quand je dis que j’ai de la chance, c’est que les clubs cherchaient mon profil à ce moment-là. Si tu joues attaquant, mais que les recruteurs cherchent des latéraux, bon…

Ce qui diffère du poste de latéral, c’est que tu attaques beaucoup plus, tu es beaucoup plus haut sur le terrain : tu es systématiquement au second poteau pour finir les actions, par rapport à un latéral plus standard.

Hassane Kamara, sur le poste de piston

Concernant les latéraux, on a souvent vu des profils d’ailiers ou de milieux descendre d’un ou deux crans sur le terrain au fil des années. Ce qui est d’ailleurs ton cas.

Ouais. J’ai commencé à être latéral à 25 ans en ayant commencé pro à 20… Au début, je ne voulais pas. Je voulais jouer devant, j’ai mis du temps à me faire à ce poste. Je me suis rendu compte que c’est un poste plus adapté à mes qualités. On pourrait se dire qu’avec l’évolution du foot, la place de plus en plus importante prise par les latéraux dans la construction du jeu, et vu mon profil, c’était finalement une suite logique. Mais je me rends compte avec les années que je suis rapidement devenu aussi un défenseur qui aime défendre. À l’Udinese, et c’est une nouveauté pour moi, je joue piston, donc j’apprends tous les jours. Ce qui diffère du poste de latéral, c’est que tu attaques beaucoup plus, tu es beaucoup plus haut sur le terrain : tu es systématiquement au second poteau pour finir les actions, par rapport à un latéral plus standard. Logique en même temps, car tu es seul sur l’aile. C’est en jouant, en t’entraînant tous les jours, en faisant de la vidéo, que tu apprends. Même à 29 ans, mais je m’éclate, car je ressens que c’est à ce poste-là que je peux le plus montrer mes qualités.

Tu es passé par beaucoup de clubs en France : Châteauroux, Reims, Nice où tu as certainement fait la saison la plus complète de ta carrière en 2020-2021. Que retiens-tu de ces expériences ?

Je garde un très bon souvenir. En voyageant, j’ai constaté que la formation française était de qualité. Je suis aussi passé six mois par Créteil en National, et je dirais même que c’est l’un des passages les plus importants. Pendant un an et demi à Reims, je ne jouais pas, ou alors seulement avec la CFA. Repartir en National alors que j’avais goûté à la Ligue 1, je le vivais mal, mais ça a été un déclencheur. Je pense que ça a aussi servi à Reims, car il y avait aussi Jordan Siebatcheu qui était parti en prêt à Châteauroux, et qui avait bien marché ensuite. Depuis, ils n’hésitent plus à prêter beaucoup de jeunes.

Quel est ton plus beau moment dans le foot français ?

Mon premier but en pro. Saison 2013-2014, je jouais à Châteauroux en réserve, et je suis monté en équipe 1 pour un match face à Laval. J’avais fait une entrée au match précédent face à Clermont un peu compliquée, car il y avait beaucoup de jeu long et je n’avais pas touché beaucoup de ballons. Et là, pendant la semaine, on me disait que j’allais démarrer titulaire. Je venais de très loin, du fait de mon parcours un peu chaotique en jeunes où je n’ai pas été gardé en centre (à Toulouse, NDLR) avant d’arriver à Châteauroux. Donc de savoir que j’allais faire un match en pro, c’était déjà quelque chose d’énorme. J’ai marqué et c’était une sensation incroyable. Je ne voyais plus rien quand j’ai marqué ! Il y avait beaucoup trop d’émotions. Tu ne peux pas prendre de décision raisonnée dans ces moments-là, tu es dans un état second.

Qu’est-ce que tu fais quand tu n’es pas sur un terrain ? En général, je me repose. Je profite de mes deux chats Tips et Simba, je fais un peu de lecture, je regarde des séries… Récemment, je lisais un livre qu’un politicien ivoirien nous a donné dans le cadre de la sélection (Foot-Ivoire, entre passion et patriotisme, de Jean-Jacques Konadjé, NDLR) qui parle de l’arrivée et de l’impact du foot sur la société en sélection.

Tu as fait ton retour en sélection après un an d’absence. Comment abordez-vous la CAN qui se jouera chez vous, en Côte d’Ivoire ? Sans surprise, on veut aller au bout. De pouvoir représenter son pays, à domicile, c’est vraiment quelque chose d’énorme. La Côte d’Ivoire est un immense pays de football, il y a un énorme engouement autour de l’équipe, on a encore pu le constater lors du dernier rassemblement donc bien évidemment, j’espère en être. Cela se passe bien avec Jean-Louis Gasset et vu que c’est un coach français et qui a coaché en France, j’évolue dans un système et avec des consignes que je connais.

L’unique victoire de la saison de l’Udinese jusqu’à présent, c’était à San Siro face au Milan. Coup de bol ou non, vous y retournez déjà ce samedi pour défier l’Inter. Vous allez remettre ça ? C’est gâté, hein ! (Rires.) Non je rigole, là on a 12 points, on est dans le bas du classement. Jouer l’Inter, ça va être dur… Si on arrive à faire quelque chose là-bas, ce sera un exploit. Ça va être un match difficile, mais on n’est jamais parti quelque part en se disant : « On va faire nul, ça passe. » On ira pour gagner.

 

Retrouvez également Hassane Kamara dans l’épisode 10 du podcast 100% calcio de So Foot, Serie Aperitivo.

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