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Franck Henouda, l’Agent gentilhomme

Par Ugo Bocchi
Franck Henouda, l’Agent gentilhomme

Si le Shakhtar Donetsk est devenu Little Brazilia, c’est grâce à lui. L’agent Franck Henouda, dessinateur industriel et ancien GO au Club Med, a construit son empire et sa réputation à la force de la parole. Portrait.

Il parle vite. Très vite. Tellement qu’il n’utilise parfois pas de verbe. Simplement un sujet et un complément. Et il sourit. Beaucoup. Tellement qu’il a creusé avec les années cette fameuse ride reliant le milieu du nez aux coins des lèvres. Car Franck Henouda n’hésite pas à le dire : Il a plutôt « bien réussi sa vie dans un domaine qui le passionne. » Et ça le rend heureux. Travailler dans le football, sans y avoir été invité, ça le rend fier : « Aujourd’hui, au Brésil, tous les clubs et les joueurs me connaissent. » Si en Europe, la donne est légèrement différente, celui que l’on connaît aujourd’hui comme l’homme derrière la plus grande colonie brésilienne d’Ukraine a gravi les échelons les uns après les autres. Et il faut reconnaître qu’il est parti de très bas. Ou de très loin, plus exactement.

« Claude Puel m’appelle encore mon GO »

Le seul diplôme dont Franck Henouda peut aujourd’hui se prévaloir, c’est celui de dessinateur industriel, « donc strictement rien à voir avec le football » . Algérien de naissance, essonnien d’enfance, rien ne le relie au ballon rond jusqu’à ses vingt ans. Simplement un goût prononcé pour l’effort physique : « Je faisais plein de sport et je n’étais pas mauvais de partout. Ceinture noire de karaté, du football, du handball… » Et sans que rien ne le prédispose non plus à devenir GO, il est embauché par le Club Med peu de temps après la fin de ses études : « La meilleure école que j’ai pu fréquenter. Je faisais plein de sport. J’ai par exemple appris le ski ou la plongée en bouteille. Et puis ça m’a permis de voyager, alors que je n’en avais pas les moyens. Et puis c’est surtout là que j’ai appris le relationnel, que j’ai appris à vaincre ma timidité, que j’ai commencé à connaître des footballeurs. »

Safet Sušić, Bruno Germain, Philippe Jeannol, ou encore Claude Puel continuent aujourd’hui à l’appeler « mon GO » . Sans le savoir, en prenant du bon temps et en parcourant le Mexique, les Bahamas ou encore la Tunisie, au travers de soirées ou d’activités sportives, Franck se prépare un avenir radieux. Il développe par exemple des liens étroits avec l’équipe de Monaco de l’époque : « La bande à Alain Moizan et Albert Emon était venue en Martinique. C’était une semaine plutôt athlétique. Je les ai connus là-bas, et on est devenus amis par la suite. » Et puis sa dernière expérience au Club Med, c’est le Brésil. Une année passée à tomber amoureux de la culture locale : « Avec mon caractère méditerranéen, le soleil, le football, la musique, ça a été le coup de foudre direct. » Surtout qu’il y rencontre sa future femme. It’s a match !

Ronaldo et Zidane à l’AS Cannes

Du coup, quand Franck rentre en France, il quitte son poste de gentil organisateur. Il a envie de se poser. Tranquillement. Il trouve un nouveau job au Club des Pyramides à Port-Marly. Pas loin du Camp des Loges. Il passe de temps en temps voir des entraînements et tente de rameuter des stars dans ce nouveau complexe à la mode : « On a envoyé des cartes VIP à David Hallyday, Yannick Noah, mais aussi aux joueurs du PSG et du Racing Club de France. » Un club dans lequel évolue notamment Luis Fernandez : « Tout passait par moi à l’époque, j’étais le responsable. Et du coup, je suis devenu ami avec encore plus de footballeurs. Dont le futur entraîneur du PSG. »

Alors quand Franck Henouda se décide enfin à aller vivre au Brésil, ouvrir un restaurant-boîte de nuit avec un ami et qu’il se fait pote avec Jairzinho, et que ce dernier lui demande comment il pourrait refiler trois joueurs en France, l’ancien GO pense tout de suite à cette amitié, nouée sur le tard : « Du coup, une relation de Jairzinho me donne trois cassettes. Deux de pros de 18 ans. Et une autre d’un joueur en devenir de 15 ans. Je lui dis que je vais en parler à Luis Fernandez qui était devenu entre-temps entraîneur-joueur de l’AS Cannes : 150 000 barres chacun, pour les deux majeurs. Et pour le joueur de 15 ans, 50 000 pour 50% de ses parts, parce que c’était un joueur d’avenir et que son club voulait garder des parts. Luis en parle donc à son président, mais il refuse, car pas d’argent. Et jusqu’à aujourd’hui, Luis Fernandez s’en mord les doigts parce que les trois joueurs en question, c’était Djalminha, Marcelinho Carioca, et le troisième, celui de 15 ou 16 ans… Ronaldo. O Fenomeno ! » L’AS Cannes aurait donc pu réunir, avant les Galactiques, Ronaldo et Zidane. Rien que ça.

De Mário Jardel au Shakhtar Donetsk

Malgré cet échec, Franck pénètre petit à petit dans le monde du football. Son premier gros coup ? Cláudio Taffarel avant sa médiatisation au Mondial 98 : « Il devait signer au PSG à l’époque. Mais finalement, Bernard Lama est revenu d’Angleterre et a pris la place de titulaire. Du coup, Taffarel est parti à Galatasaray. Et à partir de là, mon nom a été cité dans les journaux, et ma carrière d’agent a débuté. » Avec ce coup de maître, sa cote monte en flèche. Surtout auprès de Fatih Terim, l’entraîneur du club stambouliote. Et du coup, d’autres joueurs suivent les traces du gardien de la Seleção et posent leur valise en Turquie. Bruno Quadros, Márcio Mixirica ou encore Mário Jardel. Un partenariat renouvelé même après l’arrivée d’un nouvel entraîneur, Mircea Lucescu, sur le banc de Galatasaray.

« J’habitais encore Paris à cette époque et j’allais souvent à Istanbul, voir mes joueurs. Et puis, avec Mircea, on a fini par devenir très proches l’année où ils ont gagné l’UEFA et la Supercoupe face au Real Madrid. » Et forcément, quand il rejoint l’Ukraine, Lucescu pense à Henouda pour bâtir son projet Donetsk. Il l’appelle et lui dit : « Faut que tu viennes là, parce que le président veut créer un grand club. On a peu de moyens financiers, mais on va essayer de faire quelque chose de très intelligent sur du long terme. » La fameuse filière brésilienne. Qui se construit doucement, année après année. Les premiers joueurs sont réticents. Mais Franck arrive à les convaincre. Et par la suite, les autres suivent plus volontiers.

La fierté Douglas Costa

Aujourd’hui, même si cette filière a temporairement été abandonnée à cause de la situation géopolitique de la région, Franck Henouda est clairement fier d’avoir réussi à mener le Shakhtar sur le devant de la scène européenne : « Vainqueur de la Ligue Europa en 2009 tout de même… » Sa plus grande réussite à ce jour, il l’avoue à demi-mot, c’est le transfert de Douglas Costa au Bayern : « Fernandinho à Manchester City, Willian à Chelsea, c’est énorme aussi. Mais le Bayern, c’est quand même le club numéro deux en Europe. » Une fierté également de voir son équipe d’adoption disputer régulièrement des huitièmes de finale de compétition européenne. Ça, c’est bon pour l’ego, le moral et l’humeur. Moins pour les rides.

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