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FC Apicoles Tilffois, le club promu grâce à un concours de culs secs

Par Félix Barbé
FC Apicoles Tilffois, le club promu grâce à un concours de culs secs

À quelques kilomètres au sud de Liège, la commune de Tilff abrite depuis une petite dizaine d’années un club de football bien à part : le FC Apicoles Tilffois. Créé par une bande de potes plus fans de bière que de foot, il a remporté cette année le Prix Eddy du Vrai Foot Day, récompensant le meilleur club belge. Et ce, avec un projet bien particulier qui promet à ceux qui viendront lui rendre visite, le samedi 10 octobre, une journée spécialement arrosée.

À la base, ils étaient scouts. Et puis, ça a dérapé. Le moment précis de la bascule ? 2011. Cette année-là, pendant que Kate Middleton disait oui au prince William, et que Dominique Strauss-Kahn commençait tout juste à être dans de sales draps, de solides gaillards belges, tous copains, s’afféraient à monter de toutes pièces une équipe parée pour tâter le cuir. « Quand on a terminé le scoutisme, on s’est dit qu’on allait créer un club de foot pour continuer à se voir tous les week-ends », se souvient Paca Peret, le fondateur du club.

Pour le nom, il fallait relier l’abeille à notre petite passion, qui est la picole.

Quatorze copains, trois joueurs de foot

Très vite, il a alors fallu trouver une identité : « À Tilff, on a un seul musée sur toute la commune, qui est celui de l’abeille. On a donc pris cet insecte pour faire office de logo, poursuit Paca. Pour le nom, il fallait relier cette abeille à notre petite passion, qui est la picole. Après quelques bières descendues, on s’est dit qu’on allait s’appeler l’Apicoles Tilffois. Tout est relié entre le nom et le logo : en plus de l’abeille, il y a un brin d’orge qui représente la bière. Pour couronner le tout, on fait un petit clin d’œil à l’Olympique de Marseille avec la devise : « Droit au fût ». » La cause est louable. L’envie est là. L’important, pour les ex-scouts, c’est de continuer à vivre des choses ensemble, peu importe le niveau réel de l’équipe : « Sur quatorze joueurs, il devait y en avoir trois qui avaient déjà joué au football. » C’est maigre.

« Notre première saison a été folklorique : on a dû prendre entre 100 et 150 buts, pour une quinzaine de buts marqués, se marre aujourd’hui Paca. On a pris des casquettes tous les week-ends. » Outre les performances sportives des copains de l’Apicoles Tilffois, leurs origines scoutes amusent vite leurs adversaires : « On s’appelle tous par des noms d’animaux. Moi, c’est Paca, mais on a aussi Labrador ou Antilope, par exemple. Un jour, un arbitre est entré dans notre jeu et a demandé qu’on l’appelle Castor. »

Promotion alcoolisée et montée en puissance

Logiquement dernier du championnat – avec huit points glanés tout de même –, le club réussi malgré tout le premier exploit de son histoire, au moment de l’assemblée générale de fin de saison, en présence de la Fédération : « En fin de soirée, on a réussi à être promu en gagnant notre concours de cul sec. On est donc monté de D3 en D2. Bon, on a évidemment encore fini derniers et on est redescendus. » Il faut dire que les cul sec sont les grands amis des gars du FC Apicoles. Les veilles de match, ce sont eux qui rythment leurs soirées : « Les deux ou trois premières années, on savait bien où on jouait le lendemain. Donc la plupart des joueurs qui se couchaient tard le samedi soir allaient dormir dans leurs voitures à côté du terrain, enchaîne Paca. Le dimanche matin, on toquait à toutes les fenêtres pour dire aux gars d’aller se changer. Il y avait des vomis avant, pendant et après le match. Là-aussi, c’était le folklore. »

Le foot est un prétexte. C’est bien d’avoir progressé, mais le plus important, c’est ce qui se passe après le match.

Aujourd’hui, après neuf ans d’existence, le club a clairement pris du galon. Il évolue désormais en DH, le plus haut niveau de la Fédération amateure de la province de Liège, et a empoché en 2018 une Coupe de la province, une Supercoupe et même une Coupe du fairplay : « On est très appréciés. Il y a une année où on a été en demi-finale de la Coupe sans gagner un seul match. Pourquoi ? Et bien parce qu’on était toujours repêchés lors d’un mystérieux tirage au sort. » Mais ne vous y trompez pas, même si l’Apicoles Tilffois s’est bien développé, les bases du club restent intactes. Et à la question de savoir qui de la bière ou du foot est le plus important, Paca Peret est très clair : « La bière, sans hésiter ! Le foot est un prétexte. C’est bien d’avoir progressé, mais le plus important, c’est ce qui se passe après le match. »

Pour aider à la construction de ce groupe et de cette équipe, Paca – qui est à la fois le fondateur, le co-président et le coach du FC Apicoles – a pu compter sur l’un de ses hommes forts : Thomas Müller. « C’est l’homonyme du joueur du Bayern, mais en mieux, introduit notre interlocuteur. Lui aussi aimerait bien jouer en attaque, mais malheureusement pour lui, il est latéral droit. Il est aussi performant que le vrai, mais plutôt en troisième mi-temps où il est beaucoup plus titulaire que lors des deux premières. » Preuve de la prépondérance du garçon, Paca lui a confié une mission de la plus haute importance cette saison : « Il devra nous poser des panneaux solaires sur le toit de la buvette. » Et le coach attend forcément que la confiance qu’il accorde à son défenseur lui soit rendue.

Cul sec en série programmés samedi prochain

C’est finalement en revenant aux origines de la création de leur club que la bande de potes de l’Apicoles Tilffois a décidé de s’inscrire au Vrai Foot Day 2020. Leur volonté ? Inclure les supporters dans le déroulé du match : « On parle toujours du douzième homme en disant qu’il a pu influencer le match. Finalement, c’est toujours onze joueurs contre onze autres sur le terrain, souffle Paca. Les supporters n’ont pas de réelle influence sur le résultat. Voilà pourquoi on a réfléchi à plusieurs moyens pour qu’ils puissent marquer des buts. » Après un long moment passé à cogiter, la solution parfaite émane de Patrick Lampertz, l’autre co-président. « Un soir, à 23 h sur WhatsApp, il a lancé l’idée de faire picoler des supporters pour marquer des buts. Tout le monde a vu ça comme une idée de génie ! On va donc jouer contre le village juste au-dessus de nous, et on mettra onze supporters de chaque côté du terrain. À chaque fût de 20 litres descendu, ils marqueront un but pour leur équipe. »

Mais pas question de voir cela comme une vulgaire animation de fête foraine. Les règles sont strictes et précises : « La bière commence à couler à la première minute du match, déroule Paca. Il y a un arbitre par camp, qui est celui qui sert les bières. On ne veut pas voir de bières qui se jettent ou autre. Les autres supporters autour ne peuvent pas participer, en revanche les joueurs peuvent. S’il y a un corner devant le parcage, le tireur peut par exemple faire un détour pour prendre une bière et aider ses supporters. Un remplaçant qui s’échauffe a le droit aussi. » Ce n’est évidemment pas tout : « On n’a pas le droit d’uriner ni de vomir, durant toute la première mi-temps. Si c’est le cas, on sort et on ne revient qu’en deuxième période. À la mi-temps, en revanche, tout est permis. À mon avis, ça va se soulager de tous les côtés », confie le couteau suisse d’Apicoles, qui a aussi imposé une mixité des équipes, avec « la présence de demoiselles ». « Il n’y a pas de changements possibles. Si tu urines ou vomis en deuxième mi-temps, tu sors jusqu’à la fin. »

L’objectif final est de boire 80 litres pour notre équipe. Ce qui revient, plus ou moins, à une trentaine de bières par personne.

Comme toute formation digne de ce nom, le club qui a d’ores et déjà remporté le prix Eddy du VFD, récompensant le meilleur club belge, s’est fixé des objectifs élevés : « Uniquement pour notre équipe d’Apicoles, donc sans compter l’adversaire, on veut au moins descendre 60 litres, ce qui fait 24 bières par personne, confesse Paca Peret. Ça, c’est le minimum ! Mais l’objectif final est d’arriver à 80 litres. Ce qui revient, plus ou moins, à une trentaine de bières par personne. » L’ambition est là. Il ne reste plus qu’à la concrétiser.

Par Félix Barbé

Propos recueillis par FB.

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