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Et si il fallait croire en Leicester ?

Par Maxime Brigand
Et si il fallait croire en Leicester ?

Seule équipe capable de tenir le rythme infernal imposé par Liverpool, le Leicester de Brendan Rodgers est toujours deuxième de Premier League. Mieux : dimanche, les Foxes ont établi la meilleure série de victoires de l’histoire du club en première division. Mais où s’arrêteront-ils ?

Birmingham, encore Birmingham. Le 28 janvier 2014, Leicester, alors dirigé par Nigel Pearson et en passe de soulever le Championship, est en ville. À St Andrew’s, et non à Villa Park, pour affronter Birmingham City et non pour se frotter à Aston Villa, mais pour un record, déjà : grâce à une victoire arrachée avec des buts de Lloyd Dyer et Jamie Vardy (1-2), les Foxes accomplissent alors la plus grosse série de succès de l’histoire du club. Une série qui s’étendra à neuf victoires après trois nouveaux points attrapés à Bournemouth. Cinq ans plus tard, nouveau voyage à Birmingham et nouvelle prouesse : en démonstration à Villa Park (1-4) dimanche, Leicester vient d’enregistrer le plus bel enchaînement de succès de son histoire en première division. Huit. Huit, comme le nombre de points qui séparent aujourd’hui les Foxes de Liverpool, intouchable leader de Premier League.

Huit, comme le nombre de matchs de Premier League consécutifs dans lesquels Jamie Vardy vient de planter. Pour info, la dernière fois que l’international anglais avait aussi bien enchaîné, Leicester avait été sacré champion d’Angleterre.

Avec Puel, j’avais l’impression que le rythme de ses entraînements était trop lent. C’était comme si on préparait un marathon et que, le jour du match, on nous demandait de courir un 100m. On avait beau donner le meilleur de nous-mêmes, ça ne marchait pas.

Alors, dimanche, quelques minutes après la douzième victoire de la saison de Leicester en championnat, il fallait tendre l’oreille et écouter Brendan Rodgers pour saisir pour de bon que quelque chose est de nouveau en train de se passer avec ce drôle de club. Sans que personne n’y prête trop attention, d’ailleurs : « Vous avez bien vu qu’après la victoire de Manchester United à Manchester City, tout le monde ne parlait que des points qui séparent actuellement City et Liverpool. Nous n’avons aucun problème avec ça, nous continuons à avancer et nous essayons d’améliorer nos performances. Je ne pense pas que les gens s’attendent à ce que nous soyons si près du sommet en fin de saison. Leicester a terminé neuvième lors des deux dernières saisons, mais je pense que ce que j’ai vu, encore aujourd’hui, ressemble à une équipe de haut de tableau. » Comment contredire Rodgers ?

L’art du pressing

Oui, Leicester est bien redevenu électrique, puissant, émouvant. Mieux, ces Foxes n’ont pas l’air décidé à s’arrêter en si bon chemin, eux qui s’affichent après seize journées avec la troisième meilleure attaque du championnat et la meilleure défense. Rien que ça. Comprendre le pourquoi du comment, c’est d’abord s’arrêter sur Rodgers, justement, qui a prolongé en fin de semaine dernière son contrat jusqu’en 2025 alors qu’Arsenal commençait à lui tourner autour, et qui a surtout fait franchir un palier considérable à une équipe qui ne manquait pas de qualités à son arrivée, en février dernier. À écouter les explications de Jamie Vardy dans L’Équipe début septembre, le problème était même ailleurs : « Avec Puel (le prédécesseur de Rodgers à Leicester, N.D.L.R.), on s’entendait bien, mais j’avais l’impression que le rythme de ses entraînements était trop lent, au point que c’était compliqué pour nous d’être rapides et agressifs en match. Tous les gens qui font du sport savent que si tu t’entraînes d’une certaine manière, tu ne pourras pas changer radicalement ta façon d’être en compétition… C’était comme si on préparait un marathon et que, le jour du match, on nous demandait de courir un 100m. On avait beau donner le meilleur de nous-mêmes, ça ne marchait pas, et c’était frustrant. »

Le premier changement apporté par Rodgers est justement le suivant : l’intensité. C’est d’ailleurs le premier marqueur de son Leicester, qui est devenu une machine à pressing assez incroyable. « J’ai toujours attendu ça de mes équipes, détaillait Rodgers à Jamie Carragher lors d’un entretien tactique pour Sky Sports il y a quelques jours. Lorsque je suis arrivé à Leicester, c’est donc la première chose que j’ai expliqué aux joueurs : comment presser. » Car presser, c’est cool, mais bien presser, c’est encore mieux : « Je me concentre d’abord sur la distance entre les joueurs. Je veux que mes équipes pressent haut, mais j’insiste surtout sur mon souhait de voir mes quatre défenseurs très resserrés entre eux, de façon à densifier au maximum le bloc. Dans notre pressing, Ndidi est évidemment important, mais la clé, c’est avant tout ces quatre mecs, les quatre défenseurs. Et j’ai la chance d’avoir un back four et un gardien de très haut niveau. Ils sont jeunes, mais ils ont la caisse pour faire exactement ce que je demande en matière de réduction de l’espace. »

J’ai toujours attendu ça de mes équipes. Lorsque je suis arrivé à Leicester, c’est donc la première chose que j’ai expliqué aux joueurs : comment presser.

Compact dans le jeu, Leicester l’est également avec le ballon, l’objectif permanent de Rodgers étant « d’étouffer » le rythme de la rencontre, ce qu’il peut parfaitement faire grâce aux profils (Pérez, Barnes, Maddison, Tielemans, Vardy, Ndidi, Iheanacho) qu’il a à disposition. Grâce à ça, les Foxes sont devenus bien plus imprévisibles que lors de la saison de leur titre historique : le match à Villa Park l’a parfaitement prouvé, Leicester dépliant sur la piste quatre façons différentes de marquer autour d’un collectif harmonieux et capable de se trouver dans n’importe quelle position.

« On veut faire quelque chose d’important »

Rodgers, lui, a conservé son principe tactique fondamental : l’utilisation d’un pivot seul. Seule différence, l’entraîneur nord-irlandais l’a accompagné de deux meneurs de jeu, Tielemans et Maddison. Un Maddison qui brille encore cette saison et que Brendan Rodgers comparait auprès de Carragher à son Jordan Henderson de Liverpool : « Tout le monde regarde James comme un joueur créatif, mais c’est aussi un joueur précieux défensivement. Il est efficace dans son pressing, réussit un gros nombre d’interceptions et est assez similaire à Henderson. C’est la consigne qu’on donne aussi à des mecs comme James et Youri : si vous voulez jouer au milieu et être les créateurs, vous devez aussi être capables de presser correctement. » C’est aujourd’hui la base du succès de ce Leicester, qui est l’équipe de Premier League qui tacle le plus (et réussit le plus de tacles), également porté par un Schmeichel de retour à son meilleur niveau, un Çağlar Söyüncü brillant, un Ricardo Pereira cinq étoiles et un Vardy toujours plus clinique. C’est surtout un groupe passé expert dans l’art de la transition défensive et qui n’a d’ailleurs encaissé aucun but sur une séquence de contre-attaque cette saison. Autre révélateur : Leicester a souffert face à Everton (2-1), a été bousculé par Watford (2-0), mais les Foxes n’ont pas flanché, ce qui pousse à l’optimisme concernant leur fin de saison alors que Liverpool va aller se fatiguer au Mondial des clubs. Brendan Rodgers et ses gars possèdent actuellement une avance confortable sur City (6 points) et interrogé récemment dans El Pais, Ayoze Pérez a refusé de se planquer : « Le club a l’ambition de faire quelque chose d’important. Ça va plus loin que Noël, et c’est justement là que tout risque de se jouer. On sait que tout peut arriver durant cette période. » Et Leicester est prêt.

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