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Emery-Valverde, le dessus du panier espagnol

Par Robin Delorme
Emery-Valverde, le dessus du panier espagnol

Plus qu’un duel entre deux des meilleures audiences d’Espagne, Séville-Bilbao marque la rencontre entre Unai Emery et Ernesto Valverde. Étendards d’une corporation espagnole qui ne s’est jamais aussi bien portée, ces deux entraîneurs ont déjà l’Europe à leurs pieds. Ou presque.

Remplies ras la gueule, les rives de la Ria de Bilbao s’affichent en bicolore. Rouge et blanc, cette foule fait un bruit du démon avant d’apercevoir la barque de ses héros et de s’émouvoir. Depuis trente et un ans, le peuple des Leones attend cet instant : fêter un titre. Le graal répond au nom de Supercoupe d’Espagne, une breloque dorée remportée magistralement face à l’ogre blaugrana. Justement, hormis sur les Ramblas barcelonaises gavées de titres, cette scène ne se répète qu’une fois outre-Pyrénées en cette année 2015. Quelques semaines plus tôt, Séville a également connu une fiesta monstre, suite attendue d’une Ligue Europa acquise face au Dnipro pour la seconde fois consécutive. Dans ces deux réjouissances, Ernesto Valverde et Unai Emery sont les chouchous respectifs des aficionados basques et andalous. Eux, les architectes de l’Athletic et du FC Séville, sont d’ailleurs les têtes de gondole d’une géniale génération d’entraîneurs espagnols. Chacun dans un style bien particulier, ils incarnent la réussite de la Liga sur le Vieux Continent avec une même maxime : « Profiter, c’est dépasser nos défis. »

Agité de la guérite vs photographe taiseux

Malgré des origines basques partagées, Unai Emery et Ernesto Valverde ne se sont jamais rencontrés sur les prés. La faute à quelques années de différence – l’entraîneur sevillista étant né en 1971, le second en 1964 -, et des carrières de joueur bien distinctes. Quand le señor Emery ne rencontre pas le succès en Primera et s’exile en Segunda, Valverde côtoie la dream team de Cruyff une saison durant avant de faire carrière à l’Athletic Bilbao. Deux trajectoires opposées qui ne les empêchent pas d’entamer leurs aventures sur les bancs au début du millénaire : à San Mamés en 2003 pour l’aîné, à Lorca en 2004 pour le cadet. Très vite, Unai Emery rencontre le succès et se fait un nom parmi les coachs de Liga Adelante. Idem, il est illico caractérisé comme un agité de la guérite. « Sur un banc de touche, il ne cesse d’aboyer. Il nous donne toujours des consignes qu’il nous répète pourtant avant le match. Je crois qu’il ne peut pas vivre un match en étant décontracté » , résume Timothée Kolodziejczak, sous ses ordres depuis l’été 2014, qui voit en lui « un bourreau de travail » , « un perfectionniste » et « un éternel insatisfait » .

Chez le natif de Viandar de la Vera, bourgade rurale d’Estrémadure, le caractère est tout autre. Plus taiseux que survitaminé, il offre une quiétude qui tranche face à l’excitation de certains de ses homologues. Une particularité en Espagne qui sied parfaitement à son autre passion : la photographie, qu’il découvre lors de sa seule saison au FC Barcelone. « Tant dans la photo que dans une équipe, tu cherches l’équilibre » , décrypte-t-il en 2007 au Mundo alors qu’il mène le navire des Pericos. « Les deux domaines dépendent des éléments dont tu disposes. Dans le cas du football, tu dépends de plusieurs variables : les joueurs, l’environnement du club, la philosophie, le type de jeu qu’aime le public. Et toutes ces variables doivent croire en ce que l’entraîneur fait. » De l’Espanyol – qu’il mène en finale de la C2 en 2007 ! – à l’Olympiakos, en passant par Valence, il arrive à fédérer l’intégralité de l’organigramme, du supporter lambda au président tout-puissant. Ce pouvoir de séduction découle de sa droiture, de son calme et de sa pédagogie. Autant de qualités qui, aujourd’hui, lui offrent une popularité folle dans les rues de Bilbao.

Les prochains coachs des Clásico ?

Quand certains ne voient l’Espagne du football que par l’unique prisme du toque, Unai Emery leur répond par une tactique autre. « Emery est un très fin observateur. Il va construire son équipe en fonction de la qualité de ses joueurs, et non d’une philosophie comme ça peut être le cas au Barça ou même au Rayo, confirme l’ancien défenseur niçois. D’une certaine façon, on est un peu plus amphibie. On peut aussi bien être un poil à gratter pour une équipe de possession que pour une équipe de contres. » Cette identité tranche avec celle d’Ernesto Valverde, adepte d’un jeu tout en intensité et en contrôle. Une variété de profils, donc, qui se retrouve autour d’un point fondamental : la gagne. Car Sevillistas comme Chés peuvent en témoigner, Unai Emery sait gagner. Une rengaine qui s’applique également à Athènes ou à l’Espanyol de Barcelone, où Valverde a orchestré ses premiers titres et exploits. La réussite des deux hommes implique forcément une rude séduction des grands d’Europe. Alors qu’Emery a déjà refusé des offres de millionnaires pour rester dans le barrio de Nervion, Valverde rempilerait bien pour un quatrième exercice à San Mamés. Avant de prendre la succession de Zidane ou de Luis Enrique ?

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